Un soldat en permission arrêté, suspecté d’avoir tué un oléiculteur palestinien
Les avocats du militaire insistent sur le fait qu'il a agi en état de légitime défense, qu'il a tiré des coups de semonce, et qu'il n'a touché personne
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Un soldat israélien qui n’était pas en service a été arrêté dimanche par la police militaire. Il est soupçonné d’avoir abattu un Palestinien qui aurait récolté des olives près du village d’As-Sawiya, dans le nord de la Cisjordanie, le samedi 28 octobre.
Selon Tsahal, « une confrontation s’est développée pendant Shabbat entre un certain nombre de Palestiniens et de civils israéliens près de l’implantation de Rehelim dans le district de Samarie », désignant le nord de la Cisjordanie par son nom biblique.
Tsahal a déclaré que « le soldat en permission est soupçonné d’avoir utilisé son arme militaire et d’avoir tiré, causant la mort du Palestinien », et que le soldat a été arrêté dimanche « pour les besoins de l’enquête ».
Dans une vidéo qui a circulé sur les réseaux sociaux – elle ne montre pas le début de l’incident – il semble y avoir un groupe d’au-moins quatre résidents d’implantations, vêtus de blanc et portant des kippas blanches près d’une oliveraie. Un bruit semblable à celui d’une détonation est audible.
La vidéo ne montre aucun Palestinien, ni personne d’autre, à proximité des résidents d’implantations, mais l’un d’entre eux tire néanmoins un coup de feu avec son fusil d’assaut.
La vidéo ne montre pas qui ou quoi a été touché par le coup de feu, cependant, et il n’est pas clair si la vidéo a été filmée au moment précis où Saleh a été abattu, ou à un autre moment de cet incident.
Les civils israéliens ne sont pas autorisés à posséder des fusils d’assaut, et donc toute personne en portant un – dans la vidéo – est soit un soldat qui n’est pas en service, soit un membre d’une équipe de sécurité civile.
Selon l’agence de presse officielle de l’Autorité palestinienne, Wafa, Saleh a été tué alors qu’il récoltait des olives.
Les avocats du soldat soupçonné d’avoir tué Saleh contestent toutefois cette version et affirment qu’il a été attaqué par « un certain nombre de Palestiniens qui ont jeté des pierres sur lui et sa famille alors qu’ils se promenaient dans les champs près de l’implantation où ils vivent, Rehelim ».
Selon Me Adi Keidar, membre de l’organisation Honenu, qui fournit une aide juridique, généralement à des personnes de droite soupçonnées d’activités anti-palestiniennes, les jets de pierres mettaient des vie en danger et le soldat qui n’était pas en service a donc d’abord tiré des coup de semonce, en l’air pour faire fuir les lanceurs de pierres et, cela ayant échoué, il a tiré au sol près de leurs jambes, mais n’a touché personne.
Les résidents d’implantations ont ensuite quitté la zone et signalé l’incident aux autorités, a déclaré Keidar, affirmant que le suspect n’avait pas causé la mort de Saleh.
Dror Etkes, qui milite depuis des années contre les implantations, a souligné que l’oliveraie palestinienne où Saleh a été abattu se trouve à quelque 570 mètres de la seule oliveraie appartenant à des résidents d’implantations dans la région, qui est située juste à l’extérieur de Rehelim.
Le quotidien Haaretz rapporte qu’un cousin de Saleh a déclaré que ce dernier se trouvait à quelque 600 mètres de l’implantation de Rehelim avec sa femme et ses deux enfants, et qu’il n’y avait pas eu d’affrontement entre résidents d’implantations et Palestiniens avant qu’il ne soit abattu.
De manière tout à fait inhabituelle, le chef du Conseil régional de Samarie, Yossi Dagan, a publié une déclaration le jour même – à Shabbat – insistant sur le fait que les résidents d’implantations impliqués se trouvaient à proximité de leur oliveraie, près de Rehelim, et qu’ils avaient été « attaqués par des dizaines de Hamasnikim [terroristes palestiniens affiliés au Hamas en hébreu] sous le prétexte de récolter des olives ».
Dagan a déclaré qu’il exigeait que « la récolte d’olives à proximité des implantations [israéliennes] » en Cisjordanie soit immédiatement arrêtée, affirmant que cela était « utilisé comme une plateforme pour le terrorisme. »
Etkes, le militant anti-implantation, a insisté sur le fait que la vidéo montrait que les résidents d’implantations ne s’étaient pas trouvés à proximité de Rehelim lors de la fusillade montrée sur les images, et qu’ils n’étaient pas en danger.
En outre, il a affirmé que les résidents d’implantations extrémistes exploitent la guerre à Gaza depuis les massacres perpétrés par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël pour attaquer et expulser les Palestiniens de leurs terres en Cisjordanie.
« Il y a eu une série d’attaques violentes qui s’intensifient chaque jour contre les Palestiniens », a déclaré Etkes.
מטע הזיתים היחיד שלמיטב ידיעתי ניטע על ידי מתנחלים סביב רחלים מסומן בירוק. מדובר בכ1.7 דונם. המקום בו המתנחל עומד כאשר הוא יורה נמצא במרחק של 570 מטר בקו אוויר מהמטע הזה. כלומר, אין סכנה למתנחלים ואין מטע זיתים של "משפחה נורמטיבית". יש הרג פושע (חשד לרצח) של פלסטיני בזמן מסיק. pic.twitter.com/t0wTyhBbtL
— Dror Etkes (@dror_etkes) October 29, 2023
« L’objectif officiel de ces attaques est l’expulsion maximale des Palestiniens d’un maximum de territoire. »
Les organisations de gauche Yesh Din et La Paix Maintenant, qui s’opposent aux implantations et au contrôle israélien de la Cisjordanie, ont à plusieurs reprises attiré l’attention sur un grand nombre d’attaques violentes contre des Palestiniens en Cisjordanie depuis le 7 octobre, qui ont conduit au meurtre, apparemment par des résidents d’implantations, de sept civils palestiniens, ainsi qu’à de nombreux cas où des Palestiniens ont été chassés de chez eux.
Dimanche, une trentaine d’organisations à but non lucratif, dont Yesh Din et B’Tselem, ont publié une déclaration appelant la communauté internationale à « mettre un terme à la vague de violence des résidents d’implantations, soutenue par l’État, qui a conduit et conduit encore au transfert forcé de communautés palestiniennes en Cisjordanie ».
Ils ont déclaré que « pas moins de 13 communautés d’éleveurs ont été déplacées » et que « beaucoup d’autres risquent d’être forcées de fuir » si aucune mesure n’est prise.
Le président américain Joe Biden et son administration se sont exprimés à plusieurs reprises contre la violence des résidents d’implantations.