Un commissaire européen demande des sanctions contre les usagers de Pegasus
Didier Reynders demande aux États membres d'enquêter sur l'utilisation présumée du logiciel de l'entreprise israélienne NSO qui a servi à des espionnages illégaux

Le commissaire européen à la Justice a appelé mercredi à poursuivre ceux qui ont utilisé à mauvais escient le logiciel espion israélien controversé connu sous le nom de Pegasus. Il aussi demandé à protéger les droits des activistes, des journalistes et des politiciens.
Didier Reynders a déclaré que la Commission européenne condamnait les tentatives présumées de la part d’agences de sécurité nationale de divers pays d’accéder à des informations sur des dissidents – un travail d’espionnage mené à l’aide du logiciel d’écoutes téléphoniques du NSO Group, rapporte The Guardian.
« Toute indication qu’une telle intrusion dans la vie privée a effectivement eu lieu doit faire l’objet d’une enquête approfondie et tous les responsables d’une éventuelle violation doivent être traduits en justice », a déclaré Reynders au début d’un débat au Parlement européen sur le scandale, a noté le journal.
« C’est là, bien sûr, la responsabilité de chaque État membre de l’UE et je m’attends à ce que, dans le cas de Pegasus, les autorités compétentes examinent en profondeur les allégations et qu’elles puissent rétablir la confiance », a-t-il ajouté.
En juillet, un consortium mondial de médias avait publié un rapport accablant sur la manière dont les clients du NSO Group avaient espionné depuis des années des journalistes, des militants des droits de l’Homme, des dissidents politiques et des personnes de leur entourage. Amnesty International avait déclaré avoir eu la preuve absolue que 37 infections au logiciel-espion avaient réussi, sur la base d’une liste de cibles qui a fuité. L’origine de la fuite reste indéterminée.
L’une des victimes aurait été la fiancée du journaliste du Washington Post Jamal Khashoggi, ciblée par le logiciel-espion quatre jours seulement après l’assassinat de ce dernier dans le consulat saoudien d’Istanbul en 2018. La CIA a attribué le meurtre au gouvernement saoudien.

Les récentes révélations ont également suscité des appels à une enquête pour savoir si le gouvernement de droite hongrois a utilisé Pegasus pour surveiller secrètement des journalistes, des avocats et des personnalités du monde des affaires critiques du gouvernement.
« Permettez-moi de dire d’emblée que la Commission condamne totalement tout accès illégal aux systèmes ou toute forme de piége ou d’interception illégale des communications de la part d’éventuels utilisateurs appartenant à la communauté européenne », a déclaré M. Reynders mercredi.
« C’est un crime commis dans l’ensemble de l’Union européenne », a-t-il ajouté.
La France tente également de faire la lumière sur les informations affirmant que le président Emmanuel Macron et des membres de son gouvernement auraient été ciblés en 2019 par un service de sécurité marocain non identifié utilisant Pegasus. Le Maroc, un allié clé de la France, a démenti ces informations et a pris des mesures juridiques pour contrer ces allégations à l’encontre du royaume nord-africain dans le contexte de ce scandale lié au logiciel espion.
NSO a insisté sur le fait que son logiciel était destiné à être utilisé uniquement dans la lutte contre le terrorisme et d’autres crimes, et que la liste des cibles qui a été signalée n’était pas liée à la société.
La semaine dernière, le ministre des Affaires Etrangères Yair Lapid a minimisé les critiques concernant la réglementation israélienne du NSO Group, et a promis d’intensifier les efforts pour s’assurer que le logiciel espion controversé de la société ne tombe pas dans de mauvaises mains.