Affaire Khashoggi: les USA sanctionnent 17 responsables saoudiens
Les sanctions imposées visent des "violations graves des droits de l'homme" et consistent à bloquer tous les biens ou avoirs aux Etats-Unis ; le Canada envisage aussi des sanctions

Les Etats-Unis ont annoncé jeudi des sanctions financières ciblées contre 17 responsables saoudiens impliqués dans le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi, dont des proches du prince héritier Mohammed ben Salmane.
Parmi les personnes visées par ces mesures figurent des membres de la garde rapprochée du prince, Saoud al-Qahtani et son « subordonné » Maher Mutreb, ainsi que le consul général d’Arabie saoudite à Istanbul Mohammad Al-Otaibi, a déclaré le Trésor américain dans un communiqué.
« Les responsables saoudiens que nous sanctionnons ont été impliqués dans le meurtre odieux de Jamal Khashoggi. Ces individus qui ont ciblé et brutalement tué un journaliste qui résidait et travaillait aux Etats-Unis doivent payer le prix de leurs actes », a estimé le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin.
« Les Etats-Unis continuent à travailler pour établir scrupuleusement tous les faits, et nous tiendrons pour responsables tous ceux qui sont impliqués, afin de rendre justice pour la fiancée, les enfants et la famille de Khashoggi », a-t-il ajouté, appelant Ryad à « prendre les mesures adéquates pour que les opposants politiques ou les journalistes ne soient plus pris pour cibles ».
L’administration de Donald Trump, proche alliée du royaume saoudien, avait déjà révoqué les visas américains de 21 Saoudiens pour leur implication dans le meurtre, perpétré le 2 octobre dans le consulat d’Arabie saoudite à Istanbul.
Ils avaient toutefois prévenu que d’autres sanctions pourraient suivre une fois la lumière faite sur la mort du journaliste, chroniqueur du Washington Post.
Les sanctions imposées jeudi visent des « violations graves des droits de l’homme ». Elles consistent à bloquer tous les biens ou avoirs des personnes visées aux Etats-Unis, et à interdire aux ressortissants américains de faire affaire avec elles.
Les sanctions américaines semblent s’appuyer sur l’enquête saoudienne, le jour même où le procureur général du royaume a requis la peine de mort contre cinq accusés tout en dédouanant totalement le prince héritier, souvent montré du doigt par les observateurs.
Les Etats-Unis ont haussé le ton face au scandale planétaire, mais n’ont donné jusqu’ici aucun signe de vouloir lâcher Mohammed ben Salmane, soulignant que l’alliance avec Ryad reste incontournable.

« Saoud al-Qahtani est un haut responsable du gouvernement d’Arabie saoudite qui a participé à la planification et à l’exécution de l’opération qui a mené au meurtre de M. Khashoggi », affirme le Trésor américain.

« Cette opération a été coordonnée et exécutée par son subordonné Maher Mutreb, et a impliqué la participation d’au moins 14 autres responsables gouvernementaux saoudiens », également sanctionnés, comme le consul général. « Tous ces individus sont sanctionnés pour s’être rendus responsables ou complices de graves violations des droits de l’homme », explique encore le Trésor.
Le Canada pourrait imiter les Etats-Unis et imposer à son tour des sanctions contre des dirigeants saoudiens impliqués dans le meurtre du journaliste Jamal Khashoggi, a indiqué jeudi la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland.
« Le Canada salue la décision des Etats-Unis », qui ont annoncé des sanctions financières ciblées contre 17 responsables saoudiens dans le cadre d’une loi dite Magnitsky, a précisé Mme Freeland lors d’une visite dans l’Ontario.
« Nous avons également une loi Magnitsky et c’est un outil très utile pour notre politique étrangère », a-t-elle poursuivi lors d’un point de presse. « C’est assurément quelque chose que le Canada va étudier activement dans les prochains jours ».

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau avait prévenu qu’il y aurait des « conséquences » après ce meurtre, tout en précisant qu’il serait « extrêmement difficile » d’annuler un important contrat de vente d’armes canadiennes à l’Arabie saoudite, comme le réclament notamment les défenseurs des droits de l’homme.
« Nous étudions nos options », a-t-il déclaré fin octobre, pressé d’indiquer si le Canada allait emboîter le pas à l’Allemagne qui a suspendu ses ventes d’armes à Ryad et exhorté les Européens à faire de même tant que l’Arabie saoudite n’aurait pas fait toute la lumière sur le meurtre de Jamal Khashoggi.
Les relations entre le Canada et le royaume saoudien traversent une grave crise depuis plusieurs mois. Ryad avait annoncé début août l’expulsion de l’ambassadeur du Canada, rappelé le sien et gelé tout nouveau commerce ou investissement avec le Canada, après la dénonciation par Ottawa de l’arrestation de militants saoudiens des droits de l’homme.