Israël en guerre - Jour 430

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Interview

Allemagne : Deux femmes collectent des fonds pour des latrines à Gaza

Une Israélienne et une Palestinienne font équipe pour répondre à l'un des besoins les plus pressants des Gazaouis pendant la guerre : des installations sanitaires adéquates

Des toilettes en cours de construction dans un camp de personnes déplacées dans le sud de la bande de Gaza par des bénévoles grâce à des dons étrangers. (Crédit : Autorisation)
Des toilettes en cours de construction dans un camp de personnes déplacées dans le sud de la bande de Gaza par des bénévoles grâce à des dons étrangers. (Crédit : Autorisation)

Deux femmes vivant en Allemagne, l’une Israélienne et l’autre Palestinienne, ont uni leurs forces pour collecter des fonds afin d’acheter des équipements sanitaires pour la population civile meurtrie de la bande de Gaza.

Tom Kellner et Seba Abu Daqa récoltent des dons depuis fin décembre pour financer l’achat de toilettes, de douches et de tentes pour les camps de personnes déplacées dans la bande de Gaza, dans l’espoir d’atténuer la menace d’une crise sanitaire qui ne cesse de s’aggraver.

La guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas a entraîné la destruction de vastes zones de Gaza et le déplacement interne de la grande majorité de sa population (75 %, soit 1,7 million sur 2,3 millions d’habitants, selon les dernières données des Nations unies).

La guerre a éclaté lorsque des terroristes dirigés par le Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël le 7 octobre, tuant près de 1 200 personnes, principalement des civils, tout en prenant 253 otages de tous âges, en commettant de nombreuses atrocités et en utilisant la violence sexuelle comme arme à grande échelle. La plus jeune victime était âgé de 10 mois tandis que le plus jeune otage a un an. 130 otages enlevés par le Hamas lors de l’assaut sauvage du 7 octobre sont encore à Gaza – mais certains ne sont plus en vie.

Les déplacements de civils à l’intérieur de la bande de Gaza à la suite de l’incursion terrestre lancée par Israël à titre de représailles a entraîné ce qui est décrit comme une crise humanitaire pour les Palestiniens, qui vivent dans des ruines et des camps de tentes de réfugiés pour la plupart, ou qui ont pu fuir la zone pour l’étranger. Ces conditions ont entraîné l’apparition de diverses maladies, ce qui pourrait également nuire à la santé publique en Israël.

Les déplacés de Gaza vivent dans des conditions hivernales sordides, dans des endroits surpeuplés, avec peu d’eau potable pour boire et se laver. Ils sont exposés à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire et disposent de peu d’installations médicales en état de marche. Selon l’UNICEF, les cas de diarrhée sont montés en flèche chez les enfants.

Des toilettes construites par la société Gaza Life Power grâce à des dons étrangers dans un camp de personnes déplacées à al-Mawasi, dans le sud de la bande de Gaza, le 15 janvier 2024. (Crédit : Autorisation)

Pour apporter un peu de soulagement à cette crise éprouvante, Kellner et Abu Daqa ont décidé de se mobiliser et de lancer une campagne de crownfunding afin de trouver une solution à l’un des problèmes les plus urgents pour les personnes déplacées de Gaza : l’assainissement.

Le choix d’investir dans la construction de latrines s’est fondé sur une analyse de ce qui était urgent et de ce qui était faisable, ont déclaré les collectrices de fonds.

« Seba et moi avons beaucoup discuté de ce que nous pouvions faire, car toutes sortes de choses sont nécessaires à Gaza », a déclaré Kellner, originaire de Haïfa, qui a grandi en Galilée occidentale.

« Le vrai défi est qu’il est pratiquement impossible de faire entrer des produits à l’intérieur de Gaza, et nous cherchions donc quelque chose que nous pourrions aider à construire et qui ne nécessiterait pas d’importations de l’extérieur. Tous les matériaux nécessaires à la construction de ces toilettes se trouvent déjà à l’intérieur de la bande de Gaza, nous ne faisons que les acheter », a-t-elle expliqué.

Kellner et Abu Daqa vivent toutes deux en Allemagne, mais dans des villes différentes. Abu Daqa, originaire de la ville d’Abbasan, dans le sud de Gaza, est consultante en développement communautaire pour une organisation internationale à but non lucratif de défense des droits des femmes, tandis que Kellner est éditrice et violoncelliste.

Elles se sont rencontrées par l’intermédiaire d’un groupe de dialogue en ligne pour les Israéliens et les Palestiniens à l’étranger, lancé par Neve Shalom – Wahat al-Salam, un village de paix judéo-arabe situé à mi-chemin entre Jérusalem et Tel Aviv.

Dans une interview accordée au Times of Israel, elles ont expliqué ce qu’elles espéraient réaliser grâce à leur initiative.

« Notre objectif est de répondre aux besoins sanitaires de la population de Gaza », a déclaré Abu Daqa. « Il y a beaucoup de maladies qui vont affecter toute la région si elles ne sont pas traitées. Il ne s’agit pas seulement des Palestiniens. La situation sanitaire grave des habitants de Gaza affectera tout le monde autour d’eux », a-t-elle ajouté.

Seba Abu Daqa (à gauche) et Tom Kellner, une Gazaouie et une Israéliene vivant en Allemagne, qui ont lancé une collecte de fonds afin d’acheter des équipements sanitaires pour les Gazaouis déplacés dans le cadre de la guerre actuelle entre Israël et le Hamas. (Crédit : Autorisation)

En coopération avec une ONG palestinienne de développement communautaire, Kellner et Abu Daqa ont utilisé les fonds collectés pour acheter des matériaux de construction pour les unités à une entreprise basée à Gaza, notamment des toilettes, du bois pour les structures extérieures et des couvertures en plastique. Les toilettes sont reliées au système d’égouts.

Les travaux de construction ont été exécutés par des bénévoles locaux. Abu Daqa a géré les contacts avec eux, évaluant les besoins sur le terrain et surveillant les progrès.

Jusqu’à présent, l’initiative a permis la mise en place de 18 structures réparties entre Mawasi et Rafah, deux zones du sud de la bande de Gaza où la grande majorité des civils gazaouis ont été évacués – plus de 1,5 million, selon les estimations.

Un WC coûte environ 1 600 shekels, selon les deux femmes, mais le prix peut varier en raison des fluctuations constantes des coûts des matériaux de construction dans l’enclave déchirée par la guerre, compte tenu de leur imprévisible disponibilité.

Les deux femmes ont également envisagé d’acheter d’autres produits à usage sanitaire, tels que des couches, des serviettes hygiéniques et du papier hygiénique, mais pour l’instant, ces articles sont difficiles à trouver car ils doivent être importés de l’extérieur de la bande de Gaza. Les dons, collectés par l’intermédiaire de PayPal, ont également servi à l’achat de tentes construites à partir de matériaux recyclés – compte tenu de la pénurie de tentes neuves importées – et à la construction de douches avec des matériaux disponibles localement.

Les douches fonctionnent principalement avec de l’eau de puits salée. Dans certains endroits où l’eau n’est pas disponible, les gens doivent apporter leur propre eau en bouteille, qu’ils font chauffer devant les cabines de douche, a souligné Abu Daqa.

Ces structures rudimentaires peuvent néanmoins contribuer à atténuer les difficultés quotidiennes des personnes déplacées qui, dans de nombreux cas, ont quitté précipitamment leurs maisons avec seulement quelques effets personnels et passent une grande partie de leur journée à chercher de la nourriture, de l’eau et des produits de première nécessité.

« Beaucoup de personnes déplacées ont fui sans argent, et de nombreuses banques ne fonctionnent pas. Tout le monde n’est pas en mesure d’aller chercher des matériaux de construction et de bâtir quand ils ont des enfants à charge, alors qu’ils sont au milieu de nulle part sans toit au-dessus de leur tête », a déploré Abu Daqa.

Les membres de la famille Abu Jarad, déplacés par la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza, prenant leur petit-déjeuner dans un camp de tentes improvisé dans la région de Muwasi, au sud de Gaza, le 1er janvier 2024. (Crédit : Fatima Shbair/AP Photo)

Les deux femmes ont lancé leur initiative indépendamment de toute une série d’organisations humanitaires opérant actuellement dans la bande de Gaza, qui distribuent des fournitures de secours aux personnes déplacées, telles que de la nourriture, des couvertures et des matelas, des jouets pour les enfants, des « kits de dignité » contenant des articles d’hygiène personnelle, etc.

Les dons pour leur projet proviennent en grande partie d’Israël, grâce au réseau de militants pacifistes de Kellner, mais aussi d’Allemagne, d’autres pays européens et des États-Unis. Les réactions ont été minimes, malgré l’opposition généralisée de certains secteurs de la société israélienne à l’acheminement de l’aide humanitaire vers Gaza.

« J’ai été très surprise », a déclaré Kellner. « Je m’attendais à des critiques beaucoup plus sévères, mais les gens m’ont généralement beaucoup soutenue. »

Pour Abu Daqa, originaire de Gaza qui a émigré il y a 20 ans, l’initiative a une signification personnelle particulière, car sa famille est également déplacée dans le sud de la bande de Gaza.

Des personnes transportant de l’eau dans un camp de tentes improvisé pour les Palestiniens déplacés à Rafah, près de la frontière avec l’Égypte, dans le sud de la bande de Gaza, le 24 janvier 2024. (Crédit : AFP)

Ses proches ont réussi à louer un appartement à al-Mawasi, une zone désignée comme « zone humanitaire sûre » par l’armée israélienne au début de la guerre.

« Ce n’est pas ce qu’il y a de mieux, mais au moins ils ne sont pas dans une tente », a-t-elle reconnu. « Au début, ils se sentaient en sécurité parce qu’ils étaient à al-Mawasi, mais récemment il y a eu des bombardements et des opérations militaires là-bas, donc ce n’est pas sûr à 100 % comme nous le pensions. »

« Ils reçoivent surtout des kits ‘prêts à manger’, de temps en temps ils peuvent faire leurs propres repas. Mais ils n’ont pas d’électricité ni d’accès à l’eau potable », a-t-elle ajouté.

Bien qu’ils soient plus chanceux que la plupart des déplacés de Gaza qui s’abritent dans des tentes, certains membres de la famille d’Abu Daqa ont souffert de maladies dues aux mauvaises conditions d’hygiène, et la guerre leur a fait payer un lourd tribut psychologique.

« Ce n’est pas facile, ils sont traumatisés », a-t-elle déploré. « Ils ne peuvent pas bouger et, en plus, ils voient tant de morts et de destructions autour d’eux. »

Renne Ghert-Zand a contribué à cet article.

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