Corbyn est un antisémite. Le Labour doit le mettre à la porte
Il soutient ceux qui appellent à "éradiquer le sionisme" ; compare la politique d'Israël aux nazis ; son parti n'adopte pas la définition de l'antisémitisme parce qu'il la viole
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Jusqu’à il y a quelques années, lors de la conférence annuelle de l’AIPAC à Washington, DC, un dîner de gala était organisé pour tous les milliers de participants qui avaient commencé par une démonstration extraordinaire de force politique : l’appel. Sur la scène centrale du vaste hall du centre des congrès de la capitale américaine, deux ou trois personnalités de l’AIPAC lisaient avec enthousiasme des centaines de noms – des hauts fonctionnaires, des membres du Congrès, des ambassadeurs et d’autres personnalités présentes – et la foule applaudissait et les acclamait. Le processus se prolongeait pendant des lustres ; il y avait tant de personnes dont le nom méritait d’être cité et applaudi pour avoir fait preuve de leur engagement envers les liens des États-Unis avec Israël.
Ayant passé les 20 premières années de ma vie en Grande-Bretagne, j’ai trouvé cette démonstration d’influence politique ostentatoire choquante et quelque peu déconcertante. Là où j’avais grandi, les Juifs ne claironnaient pas l’influence qu’ils pouvaient avoir ; ils gardaient la tête basse.
De nombreux Juifs ont atteint des positions de premier plan en Grande-Bretagne, et de nombreux Britanniques éminents ont consacré leur énergie à des causes juives et israéliennes.
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Mais si la parade annuelle de l’AIPAC – interrompue ces dernières années, en grande partie parce qu’elle a duré trop longtemps – a souligné à quel point les millions de Juifs des États-Unis mènent confortablement et avec fierté une vie juive publique, les quelque 300 000 Juifs du Royaume-Uni n’ont jamais considéré leur présence tolérée comme acquise.
La Grande-Bretagne pourrait bientôt élire un raciste et un antisémite comme Premier ministre
Remontez un siècle en arrière et vous verrez que David Lindo Alexander, le président de l’organe représentatif des Juifs britanniques, le Board of Deputies, a écrit une lettre au Times à la fin du printemps 1917 pour tenter de devancer la déclaration Balfour, dans la crainte apparente que cela conduise les Juifs britanniques et les autres Juifs de diaspora à se faire transférer en Palestine.
« L’établissement d’une nationalité juive en Palestine, avertissent Alexander et un deuxième dirigeant juif britannique éminent avec horreur, aura pour effet dans le monde entier de faire des Juifs des étrangers dans leur pays natal et de saper leur position durement acquise comme citoyens et ressortissants de ces pays ».
Dans les années 1980, et même avec la philosémite et résolument pro-israélienne Margaret Thatcher comme Première ministre et le grand rabbin Immanuel Jakobovits comme principal conseiller non officiel, les Juifs britanniques ont continué à insister pour ne pas attirer l’attention sur leur influence encore en place.
Cela a été illustré par la mesure dans laquelle les divers ministres des gouvernements de Thatcher, qui étaient juifs – Keith Joseph, Leon Brittan, Malcolm Rifkind et Nigel Lawson, pour n’en nommer que quatre parmi les plus importants – ont minimisé leur judéité.
Et pourtant, aujourd’hui, tout cela a changé. La communauté juive anglaise fait délibérément la une des journaux comme rarement, voire jamais, auparavant. Elle organise des marches et des manifestations. Elle organise des rassemblements à l’extérieur du Parlement. Ses dirigeants donnent des interviews retentissantes. Ses journaux lancent des mises en garde et des revendications.
Autrement dit : elle est passée de l’ombre à la lumière. Et elle le fait parce qu’elle craint que la Grande-Bretagne n’élise bientôt un raciste et un antisémite comme Premier ministre.
Il ne recherche pas la paix
Jeremy Corbyn, le chef du Parti travailliste – qui était autrefois le foyer politique naturel d’une communauté juive de classe ouvrière – n’est pas prêt à gagner les prochaines élections.
Mais puisqu’il a mené les travaillistes à une performance bien meilleure que prévu lors du vote de l’an dernier, et que le Parti conservateur au pouvoir (Tories) semble déterminé à se frayer un chemin jusqu’au 10 Downing Street – en se déchirant dans un paroxysme de luttes intestines et d’incompétence, largement à cause de la décision britannique de quitter l’Union européenne – la perspective d’un Corbyn comme Premier ministre s’avère parfaitement réaliste.
A la manière des ayatollahs iraniens, Corbyn et ses défenseurs dans la lutte contre l’antisémitisme du Parti travailliste veulent nous faire croire qu’ils détestent Israël mais n’ont absolument rien contre les Juifs
Le Parti travailliste de Corbyn est devenu un foyer d’antisionisme et d’antisémitisme – à l’image radicale de la gauche dure de son dirigeant. Sa défense et celle de ses loyalistes, lorsqu’il est accusé de ne pas s’attaquer au fléau, consiste à tenter de faire la distinction entre les deux : Oui, ils reconnaissent fièrement que Corbyn et beaucoup d’autres travaillistes critiquent profondément Israël et sa politique à l’égard des Palestiniens, mais les allégations d’antisémitisme ne sont pas seulement sans fondement mais sont délibérément fabriquées afin de museler leurs critiques légitimes de l’État juif.
À la manière des ayatollahs iraniens, ils veulent nous faire croire qu’ils détestent Israël, mais qu’ils n’ont rien contre les Juifs.
C’est dans ce contexte que j’ai trouvé la semaine dernière une référence au parrainage par Corbyn, dans les années 1980, d’un groupe appelé Labour Movement Campaign for Palestine, qui éclaire et qui est effroyable.
Le programme officiel de ce groupe déclarait son « opposition à l’Etat sioniste comme étant raciste, exclusiviste, expansionniste et une agence directe de l’impérialisme ».
Lors d’une conférence tenue en 1984, elle a exigé que les institutions clés du Parti travailliste « soutiennent le peuple palestinien dans sa lutte pour un Etat démocratique et laïque dans l’ensemble de la Palestine« . [Mes italiques.] Au cas où quelqu’un passerait à côté de la question, le Labour Movement Campaign for Palestine a proclamé dans les documents qu’il a publiés pour cet événement de 1984 qu’il ne cherchait rien de moins qu’à « éliminer le Sionisme ».
Selon le livre de Dave Rich de 2016 « The Left’s Jewish Problem », Corbyn a parrainé et soutenu ce groupe « tout au long des années 1980 », est intervenu régulièrement dans ses manifestations et a personnellement présidé la conférence de 1984. Rich, qui se réfère également au mouvement sous le nom de « Labour Committee on Palestine », dit qu’il était dirigé par un juif antisioniste nommé Tony Greenstein, qui a été exclu du Parti travailliste il y a six mois pour antisémitisme.
Rich note que la conférence de 1984 a été organisée par le Greater London Council de Ken Livingstone. Livingstone, ancien maire de Londres et proche allié de longue date de Corbyn, a démissionné du parti travailliste il y a trois mois, après avoir été suspendu du parti après avoir déclaré qu’Hitler « soutenait le sionisme avant de devenir fou et de tuer six millions de Juifs ».
M. Corbyn, qui a salué la décision de M. Livingstone de démissionner comme étant « une bonne chose », avait jusqu’à présent rejeté les appels des députés et des partisans travaillistes à son expulsion.
Le chef de l’opposition de Sa Majesté et ses loyalistes cherchent à présenter Corbyn comme un opposant énergique à l’occupation, un critique acharné des actions « illégales et inhumaines » de l’armée israélienne à Gaza, un partisan du boycott des produits des implantations et qui reconsidère la vente des armes britanniques à Israël, et qui recherche la paix (même s’il regrette à contrecœur d’avoir qualifié d’ « amis” des agents des groupes terroristes palestinien et libanais du Hamas et du Hezbollah quand il les a invités au Parlement en 2009 ou quand il a été surpris lors du dépôt de couronnes dans un cimetière en Tunisie, près des tombes des terroristes palestiniens) … mais tout sauf un antisémite et un raciste.
Pourtant, pendant des années, il a été actif au sein d’une organisation qui, tout comme le Hamas, le Hezbollah et l’Iran, a annoncé l’objectif d’éliminer Israël. Comme Jonathan Freedland, le chroniqueur du Guardian qui a mentionné le rôle de Corbyn dans le Labour Movement Campaign for Palestine dans un article publié mercredi dernier, l’a brièvement noté, la position de Corbyn au sujet de Israël/Palestine « ne consistait pas à être un médiateur entre deux peuples en conflit mais plutôt ‘pour éliminer le Sionisme' ».
Corbyn ne voulait pas soigner. Il n’a pas préconisé une solution à deux États. Il ne s’opposait pas à des politiques israéliennes spécifiques. Il voulait qu’Israël n’existe pas.
Soutenir une plate-forme qui appelle à l’élimination du seul État juif du monde, qui a été ressuscité en 1948 sur la base d’un vote de l’ONU un an plus tôt, est de l’antisémitisme de premier ordre, un préjugé contre les juifs. Préconiser que la nation juive, de façon spécifique, n’a aucun droit à la souveraineté, que son mouvement national doit être éradiqué – c’est de la discrimination et de l’incitation. Affirmer que le peuple juif n’a aucun droit à la souveraineté dans le seul endroit au monde où il a jamais été souverain, où il n’a jamais voulu partir et où il a toujours cherché à revenir ; exiger, non pas qu’Israël vive pacifiquement aux côtés d’un État palestinien, mais qu’il soit entièrement remplacé par un État palestinien, cela est inacceptable.
Il est intolérable que le futur Premier ministre du Royaume-Uni ait défendu une telle position pendant des années, puis qu’il a par la suite rencontré et fait les éloges de membres d’organisations terroristes qui, de l’aveu général, se sont engagées à détruire Israël.
« Jeremy a une longue tradition de solidarité avec le peuple palestinien et d’engagement avec les acteurs du conflit pour soutenir la paix et la justice au Moyen Orient », a déclaré dimanche un porte-parole de Corbyn, en réponse aux photos récemment publiées du dirigeant travailliste participant à une table ronde en 2012 à Doha avec plusieurs terroristes palestiniens condamnés pour meurtre. Et il n’était pas là pour soutenir la paix et la justice.
S’opposer aux politiques spécifiques d’un gouvernement israélien n’est en aucun cas nécessairement raciste ; s’opposer au sionisme dans son ensemble l’est certainement. Le sionisme défend une patrie souveraine juive ; il n’exige pas une patrie juive aux dépens des Palestiniens ; il ne contredit pas une solution à deux États. En effet, l’heure de la réalisation du sionisme est venue avec l’adoption par l’ONU d’une solution à deux États en 1947 – la relégitimation de la souveraineté juive et la création envisagée d’un État arabe. Cette solution a été acceptée par les pionniers sionistes israéliens, mais rejetée par les dirigeants arabes qui, plutôt que d’appuyer une toute première Palestine indépendante, ont plutôt choisi d’essayer de tuer Israël à sa renaissance.
Le cœur de la crise
Dans la grande quantité d’articles consacrés à Corbyn et à l’antisémitisme du Parti travailliste, je suis frappé par l’absence de gros titres sur les années de soutien et d’activisme de Corbyn en faveur d’une organisation qui appelait à la disparition d’Israël – soutien et activisme dont, pour autant que l’on sache, il ne s’est jamais excusé. Il y a eu un article dans le Jewish Chronicle il y a deux ans. Des références dans le livre de Dave Rich. Aujourd’hui une mention dans une tribune du Guardian.
Mais le soutien continu de Corbyn à la cause de l’État palestinien « dans toute la Palestine » est au cœur de la crise qui entoure sa possible direction de la Grande-Bretagne. Elle sous-tend son adhésion aux terroristes, son incapacité à s’attaquer aux antisémites travaillistes et sa résistance à l’adoption par le Labour de la définition de l’antisémitisme de l’Alliance internationale pour la mémoire de la Shoah (« International Holocaust Remembrance Alliance – IHRA »).
Bien sûr, son parti n’a pas pu adopter la définition complète de l’IHRA ; Corbyn l’a violée à plusieurs reprises : Parmi les exemples d’antisémitisme contemporain cités dans la définition de l’IHRA, on peut citer « le déni du droit du peuple juif à l’autodétermination, par exemple en prétendant que l’existence d’un État d’Israël est une entreprise raciste » et « la comparaison de la politique israélienne contemporaine avec celle des nazis ».
Son activisme au nom du Labour Movement Campaign for Palestine contrevient à la première clause, comparant les actions israéliennes en Cisjordanie à l’occupation de l’Europe par les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale, comme le montre une vidéo de 2013 qui a fait surface ce mois-ci, et viole cette dernière.
En septembre 2016, lors d’un autre pic de la crise sur l’antisémitisme du Labour, Corbyn a admis à contrecœur, apparemment pour la première fois, qu’“Israël a le droit d’exister… dans le cadre des frontières originelles de 1948″ (quoi que cela puisse signifier). Mais à peine un an plus tôt, il avait réussi l’exploit étonnant, lors d’un discours de huit minutes à une réunion des Amis travaillistes d’Israël – sa première apparition en tant que chef de parti lors d’un rassemblement lié à Israël – de ne pas même prononcer le nom d’“Israël”.
« Dites le mot Israël. Dis le mot Israël », cria un manifestant, en vain.
En 2011, dans une interview accordée à la PressTV iranienne, il a déploré ce qu’il a qualifié de « parti pris de la BBC pour dire qu’Israël a le droit d’exister ». Vraisemblablement, de l’avis de Corbyn, une BBC impartiale et objective estimerait qu’Israël n’a pas le droit d’exister.
Ce mois-ci, dans une tribune du Guardian, il a insisté sur le fait que « dans les années 1970, certains à gauche ont fait valoir à tort que ‘le sionisme est du racisme’. C’était une erreur, mais affirmer que ‘l’antisionisme, c’est du racisme’ maintenant, c’est aussi une erreur ». Ceci dans un article prétendument destiné à réparer ses liens avec la communauté juive.
Voilà avec qui les Juifs anglais ont affaire. C’est lui qui a fait sortir la communauté de sa règle « ne pas faire de vagues ». Sans le nombre, l’influence ou la confiance des juifs américains, comme en témoignent des organisations comme l’AIPAC, la communauté juive de Grande-Bretagne n’a pas eu d’autre choix que de se placer, comme jamais auparavant, au centre d’une bataille politique clé. C’est parce que Jeremy Corbyn, et le Parti travailliste avec lui à sa barre, sont une menace pour les Juifs britanniques.
Jeremy Corbyn a écrit dans sa chronique du 3 août du Guardian que « c’est la responsabilité des travaillistes d’éradiquer l’antisémitisme dans notre parti » et s’est engagé à le faire. Mais pour que le Parti travailliste puisse éradiquer l’antisémitisme, il doit commencer par expulser Jeremy Corbyn.
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