Décès d’Édith Moskovic, enfant juive cachée durant la guerre
Pendant la guerre, la jeune Édith s’est retrouvée à vivre dans un grenier, enfermée à clé, dans le noir ; elle a ensuite été aidée par l’infirmière Renée Jacqmotte, reconnue Juste
Édith Moskovic, survivante de la Shoah, est décédée le 8 juin dernier à Montpellier à l’âge de 90 ans.
Née le 12 août 1931 à Sevlusi (Hongrie), sa famille s’est exilée à Bruxelles en 1935 en raison de l’antisémitisme, puis en région occitane, en France, en 1940.
Édith Moskovic a été arrêtée fin 1941 par la gendarmerie française, avec ses sept frères et sœurs. Elle a été internée au camp du Récebédou en Haute-Garonne.
« La police française nous a sortis du lit sans nous donner d’explications », racontait Edith Moskovic, à 20 Minutes, en 2013. On s’est retrouvé dans un camp du département. On avait des poux, la gale… Les wagons à bestiaux nous attendaient. Dès lors, on nous a volé notre enfance à tous. »
Finalement, aidée par des gardiens, la famille est parvenue à s’évader pour rejoindre la ligne de démarcation à Abbeville, en Picardie, et revenir à Bruxelles – où ils ont retrouvé leur maison dévastée.
« Mon père a soudoyé [les gardiens] avec un peu d’argent et son alliance. Une nuit, ils ont coupé les barbelés et nous nous sommes enfuis. »
Puis, « les rafles ont commencé. J’ai vu notre voisine tirée par les cheveux par un policier ».
En 1942, le père a envoyé ses huit enfants dans différentes familles, inconnues, pour qu’ils soient cachés. Édith s’est retrouvée à vivre dans un grenier, enfermée à clé, dans le noir.
« Je ne sais pas combien de temps ça a duré. Un matin, un jeune homme m’a demandé de le suivre. Et d’oublier mon nom », a-t-elle dit. Sous une nouvelle identité, elle a ainsi été envoyée dans une institution catholique pour handicapés mentaux à Ottignies, en Belgique, dirigée par l’infirmière Renée Jacqmotte, reconnue Juste parmi les nations.
Un jour, à la fin de la guerre, la petite fille a aperçu son père, « au bout du chemin. Quand il m’a prise dans ses bras, j’ai su que le cauchemar était terminé ».
Toute sa famille, qu’elle a retrouvée à la fin de la guerre, a survécu.
Édith Moskovic est devenue par la suite secrétaire médicale, s’est installée à Montpellier, s’est mariée et a eu des enfants. Après s’être longtemps tu sur son enfance, elle a commencé à témoigner en 1998, au moment de son départ en retraite, et s’était depuis exprimée devant de nombreux élèves.
Déléguée en Languedoc-Roussillon du Comité français pour Yad Vashem, elle est devenue chevalier de la Légion d’honneur en 2009. Elle a obtenu la médaille d’honneur de Zakhor pour la Mémoire en 2007.
Le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) du Languedoc-Roussillon a évoqué une grande dame, « qui a montré à quel point les témoignages et le devoir de mémoire permettent de lutter contre l’antisémitisme qui a brisé tant de vies ».
« Des classes entières de collégiens et lycéens ont été touchées par la force grave, l’émotion et la douceur de son message ainsi que par ses témoignages lors des voyages à Auschwitz ou dans les autres lieux de mémoire », a ajouté Perla Danan, déléguée régionale du CRIF. « Avec la disparition des témoins et rescapés de la Shoah, il appartient à chacun de porter son message de vigilance. »
Michaël Delafosse, maire de Montpellier, a lui salué la mémoire de celle qui a consacré sa vie a témoigner auprès des jeunes générations.