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Deux Américaines explorent la migraine dans un documentaire à ne pas manquer

"Out of My Head", à découvrir en streaming, montre comment les confinements ont empiré cette maladie invalidante chez ceux et celles qui en souffrent

La pandémie de COVID-19 a été très douloureuse pour toutes et pour tous – et les personnes souffrant de migraines n’ont pas fait exception. En fait, un grand nombre d’entre elles ont fait savoir qu’elles avaient davantage souffert en 2020 que d’habitude de ce type mystérieux de céphalée qui, s’il est répandu, reste encore peu connu.

Aucun meilleur moment n’aurait donc pu être choisi pour la sortie de « Out of My Head« , un documentaire visant à sensibiliser les spectateurs à la migraine, ce mal de tête pas comme les autres. Il est à découvrir en streaming sur différentes plateformes, notamment sur Amazon Prime, iTunes et Google Play, et il est également disponible en DVD.

Les personnes régulièrement atteintes de migraines sont dotées de systèmes nerveux et cérébraux inhabituellement sensibles et elles se portent généralement mieux quand elles s’astreignent à un mode de vie englobant un sommeil régulier, de bonnes habitudes alimentaires et de l’exercice, affirment les médecins. Avec la crainte entraînée par une possible propagation rapide du SARS-CoV-2, qui a imposé des quarantaines et des confinements répétés, inutile de dire que 2020 a été l’occasion de vivre une vie qui ne s’est guère distinguée par sa régularité. Sans oublier que de tels changements, et le stress qu’ils induisent, sont communément déclencheurs de migraines.

Compliquant davantage les choses, les maux de tête sévères entrent dans la gamme des symptômes ordinaires de la COVID-19, ce qui a rendu difficile pour les malades atteints de migraine de savoir faire la part des choses entre simple migraine et possible manifestation du coronavirus. Une confusion susceptible de renforcer l’angoisse et l’appréhension – sachant aussi que la conscience d’être atteint par une pathologie, quelle qu’elle soit, peut entraîner des épisodes migraineux prolongés chez les patients.

« C’est une maladie neurologique. On a l’impression qu’il s’agit juste d’un mauvais mal de tête, mais c’est bien davantage que ça. Ce n’est bien sûr pas mortel, mais les gens, généralement, ne parviennent pas à comprendre l’impact dévastateur d’une migraine », commente la productrice du film, Jacki Ochs, alors qu’elle s’exprime auprès du Times of Israel.

Ochs, 69 ans, s’est alliée à l’autrice et réaliste Susanna Styron, qui est aussi son amie de longue date, lorsque cette dernière a voulu raconter son expérience de mère. Emma, sa fille, a commencé à souffrir de migraines à l’âge de 14 ans. L’histoire d’Emma, qui est essentiellement présentée sous forme de dessin animé, sert de pilier narratif au documentaire.

« Out of My Head » montre qu’en plus de céphalées douloureuses, la migraine implique toute une série de symptômes handicapants et effrayants (même s’ils ne sont que temporaires) tels que l’aphasie, la paralysie et la perte de la vue. De plus, les chercheurs n’ont pas encore de certitude absolue concernant la cause sous-jacente de la maladie dans le cerveau.

Un extrait de « Out Of my Head » : La réalisatrice tente de réconforter sa fille pendant une migraine. (Crédit : Maya Edelman)

Au-delà de la science, ce film touchant explore la migraine sous différents angles fascinants : Personnel, social, politique, historique et créatif. Les spectateurs apprennent ainsi que pour les personnes migraineuses (75 % d’entre elles sont des femmes) et pour leurs familles, la maladie a un impact sur l’existence qui est souvent négatif mais parfois – et c’est surprenant – positif.

Par exemple, Lisa Sokolov, qui est professeure à l’université de New York mais aussi compositrice et chanteuse de jazz, a développé une méthode vocale d’improvisation appelée Embodied VoiceWork. Alors qu’elle avait été créée à l’origine par Sokolov, qui est aujourd’hui âgée de 66 ans, pour lutter contre la douleur qu’elle ressentait lors de ses épisodes de migraines en travaillant sur le rythme de la respiration, elle l’enseigne dorénavant partout dans le monde, notamment en Israël, et dans de multiples configurations.

« J’ai appris à séparer l’événement neurologique de l’anxiété qu’il cause. J’ai trouvé en moi le calme nécessaire pour ce faire par la respiration et sa résonance, et la durée de mes migraines maintenant se compte en minutes, plus en jours », confie Sokolov au Times of Israel.

Lisa Sokolov, professeure à l’université de New York et musicienne. (Crédit : William Ellis)

Pour sa part, après avoir été assommé par ses migraines chroniques pendant presque six mois en 2006, Andrew Levy, professeur d’anglais à l’université de Butler, a commencé à étudier la créativité qui pouvait émaner des migraines chez certains malades. Un grand nombre des plus importants penseurs, écrivains et artistes du monde – avec parmi eux Thomas Jefferson, Sigmund Freud, Friedrich Nietzsche et Virginia Woolf – souffraient de migraines. Et, entre deux crises, leur malheur les a finalement amenés à des niveaux supérieurs qui auront entraîné des œuvres d’exception.

Un grand nombre des plus importants penseurs, écrivains et artistes du monde – avec parmi eux Thomas Jefferson, Sigmund Freud, Friedrich Nietzsche et Virginia Woolf – souffraient de migraines

Levy, 58, ans, raconte leur histoire ainsi que la sienne dans A Brain Wider Than the Sky: A Migraine Diary. Dans cet ouvrage publié en 2009, Levy détaille la manière dont l’auteur anglais, Lewis Carroll, aurait utilisé ses propres expériences de la migraine pour nourrir le monde fantastique qu’il présente dans son livre pour enfants emblématique Alice aux pays des merveilles. Un grand nombre des descriptions bizarres figurant dans le livre reflète plusieurs des symptômes neurologiques caractéristiques de la migraine et en effet, pour de nombreuses personnes concernées, l’apparition d’une crise ressemble beaucoup à une chute dans un terrier de lapin.

Le professeur Andy Levy, professeur à l’université Butler. (Crédit : Randy Johnson)

« Nous-mêmes sommes descendus dans ce terrier lorsque nous avons découvert ce monde tout entier de la migraine et de la créativité. Nous avons tous été fascinés par ce côté ‘Alice au pays des merveilles’ et nos recherches et nos interviews nous ont menés à Klaus Podoll, médecin au département de psychiatrie et de psychologie de l’hôpital universitaire Aachen de l’université RWTH Aachen en Allemagne, qui étudie les liens entre art et migraines », explique Styron.

Pour certains, la migraine s’apparente à une expérience religieuse ou métaphysique.

« C’est comme si Dieu vous donnait un coup de poing sur le côté du visage », dit Levy dans le documentaire en évoquant la souffrance physique qu’entraîne une migraine ainsi que le rappel à l’ordre que représente l’apparition d’une crise, en particulier pour ceux qui souffrent de migraine chronique.

« C’est un moment où on repense tout. On réalise le contrôle qu’on peut avoir sur notre vie, ou celui qu’on ne peut précisément pas avoir et c’est toujours l’occasion de réexaminer la manière dont on souhaite vivre, ce qui est important ou non dans la vie », dit Levy au Times of Israel.

Ochs et Styron, qui est âgée de 65 ans, ont découvert que nombreux sont ceux qui ne prennent pas la maladie suffisamment au sérieux, la souffrance des personnes touchées n’étant pas visible à l’œil nu. Et c’est le cas notamment de certains médecins.

« Tout dépend des descriptions que vous allez faire et de votre expérience, contrairement au cancer qu’on peut définir et sur lequel tout le monde s’accorde », note Levy.

La productrice de ‘Out of My Head’ Jacki Ochs, à gauche, et l’autrice/réalisatrice Susanna Styron. (Crédit : Teri Slotkin)

Il a fallu aux réalisatrices huit années pour terminer « Out of my head », principalement parce que la communauté du cinéma ne trouvait pas le sujet « assez sexy », s’exclame Ochs, amusée.

Elle et Styron ont finalement collecté des fonds par le biais d’une campagne de financement participatif sur Kickstarter et elles sont parvenues à convaincre les fondations et organisations concernées, qui n’avaient aucune expérience dans le financement des documentaires, qu’un film pourrait aider à modifier de manière positive la perception de la maladie auprès du grand public.

Selon elles, les malades ont eu une réaction excellente après la projection du film. Et – plus important encore – les spectateurs sans connexion familiale ou personnelle avec la migraine se sont dits réceptifs au documentaire.

« Nous avons même rencontré une neurologue spécialisée dans les maux de tête qui nous a dit que c’était la première fois qu’elle comprenait vraiment l’épreuve traversée par ses patients », dit Styron.

Le professeur Rami Burstein. (Autorisation)

La recherche sur les migraines a gagné en respectabilité dans le milieu scientifique, ces dernières années. Selon le docteur Rami Burstein, spécialiste des migraines né en Israël, ce n’était pas le cas lorsqu’il est arrivé à l’université de Harvard, il y a 25 ans. Alors qu’il est devenu aujourd’hui professeur d’anesthésie et de neurosciences à la faculté de médecine de Harvard et vice-président des neurosciences au département d’anesthésie et des soins intensifs au centre médical Beth Israel, Burstein se rappelle d’une conférence à laquelle il avait assisté.

« Je n’oublierai jamais cet intervenant qui avait déclaré que la migraine était un trouble psychologique lié aux femmes hystériques et qu’elle ne nécessitait pas une chaire à Harvard », dit Burstein au Times of Israel.

« Je suis heureux que les stigmates sociaux aient enfin disparu, au moins dans le monde occidental, et que la migraine soit reconnue comme un trouble neurologique entraîné par un cerveau anormalement sensible. Et heureusement, les gens – en particulier les femmes – répugnent moins à demander de l’aide de manière à moins souffrir, » continue-t-il.

Je n’oublierai jamais cet intervenant qui avait déclaré que la migraine était un trouble psychologique lié aux femmes hystériques

La migraine se manifeste différemment d’une personne à l’autre et elle peut même changer de nature avec le temps – c’est la raison pour laquelle Burstein la qualifie de « cible mouvante », reconnaissant les nombreux défis qui restent à relever dans l’aide à apporter aux patients.

C’est seulement récemment et pour la première fois en l’espace de deux décennies qu’une nouvelle catégorie de médicaments destinés à soigner spécifiquement la migraine a été approuvée par la FDA. Il s’agit d’anticorps inhibiteurs de la CGRP (peptide lié au gène de la calcitonine), qui bloquent les effets d’une petite protéine impliquée dans la transmission de la douleur lors d’un épisode de migraine. Au début des années 2000, Teva Pharmaceutical Industries Ltd., dont le siège est en Israël, a sorti sa version de ce traitement préventif.

Image de ‘Out of My Head’: Emma bat en retraite dans sa chambre plongée dans le noir pour calmer sa migraine. (Crédit : Maya Edelman)

Ce qui a été une bonne nouvelle pour ceux qui répondent bien à ce médicament, mais un pourcentage considérable de patients n’ont pas bénéficié, hélas, de cette avancée. Et comme Levy le souligne dans le film, la souffrance entraînée par les migraines n’entraîne pas de révélation spirituelle ou de grandes inspirations artistiques chez la majorité des malades.

Alors que les chercheurs sont toujours en quête d’une solution miracle, il est intéressant de noter que les remèdes recommandés par les anciens sages juifs valent encore qu’on s’y arrête.

Selon le livre de Levy, Moïse Maimonide, le philosophe et médecin juif du 12e siècle, avait suggéré un « morceau de pain ou un morceau de pain grillé dans du vin pur dans certains cas, ou un bain dans une eau chaude mais sans excès dans les autres cas ».

Et les rabbins du Talmud avaient pleinement conscience que les personnes atteintes de migraines ne voulaient qu’une seule chose : s’isoler dans une pièce obscure. Les rabbins « réfléchissaient aux questions sociales et ils avaient interdit, avec beaucoup de sagesse, aux personnes non-atteintes de venir voir ou de parler à un homme ou à une femme souffrant de migraine », écrit Levy.

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