Donald Trump élu président des États-Unis : un tsunami et une page blanche
Le candidat Trump a incité à la haine contre des pays et des religions. Sa campagne a dangereusement flirté avec l’antisémitisme. Il a une histoire de déclarations et de comportement avec les femmes atroce. Il est tout simplement fantaisiste d’attendre qu’il subisse à présent une métamorphose
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Nous n’avons pas tous eu tort. Certains d’entre nous n’ont pas diminué les chances d’élection de Donald J. Trump à la présidence américaine. Certains d’entre nous ont pensé qu’il avait été assez bon dans les débats pour légitimer sa candidature auprès des électeurs hésitants, et ont reconnu l’attrait des Américains amers et frustrés pour ces solutions pragmatiques à leurs maux évidents. Certains d’entre nous ont internalisé l’animosité spectaculaire envers Hillary Clinton, en tant que figure de proue d’un establishment haï, – et en tant que femme.
Nous n’avons pas tous fait totalement confiance aux sondages d’opinion qui annonçaient sans cesse une victoire de Clinton. Depuis ce rivage, où la réputation des études d’opinion publique a été faite par leur annonce erronée de l’élection de Shimon Peres en tant que Premier ministre en 1996, puis érodée par les erreurs des deux décennies suivantes, avant d’être enterrée par les sondages ridicules de 2015 qui voyaient l’Union sioniste de Isaac Herzog battre à plate couture le Likud de Benjamin Netanyahu, il n’a pas semblé particulièrement improbable que les experts se soient trompés, que leurs échantillons n’aient pas été représentatifs, qu’ils aient trop cru à leurs algorithmes.
Mais alors que l’Amérique élisait mardi Trump pour la diriger, rien de cela n’a rendu ce résultat moins spectaculaire.
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Le peuple américain a parlé, haut et fort. Il a choisi, les yeux grands ouverts, un homme sans aucune expérience politique. Mais certes, il peut s’entourer d’experts, et pourrait prouver qu’il a le genre d’instinct pour prendre les bonnes décisions qui a fait de Ronald Reagan (qui, bien sûr, n’était pas juste un acteur, mais avait gouverné la Californie) un président qui a tant réussi.
Il a choisi un président fort aux répliques incisives, mais aux politiques peu détaillées. A nouveau, il pourra cependant se tourner dans toutes les directions pour entendre les avis les plus sages quand il dirigera les politiques intérieures et extérieures de l’Amérique.
Le peuple américain a aussi choisi une personne qui manque singulièrement de grâce. Un agitateur. Un candidat qui a promis d’emprisonner son opposante. Un candidat qui a incité à la haine contre des pays et des religions. Un candidat dont le comportement de certains de ses partisans versait dans l’antisémitisme, et dont le propre discours et la propre campagne en étaient dangereusement proches. Un homme avec une histoire de déclarations atroces, tout comme le serait son comportement envers les femmes. Un personnage inacceptable pour certains, au sein de la direction de son propre parti.
Il demeure tout simplement fantaisiste d’attendre qu’il subisse à présent une subite métamorphose.
Le peuple a parlé, prouvant une fois encore que la démocratie est vraiment, comme l’avait noté Churchill, la pire forme de gouvernement… à l’exception de toutes les autres formes qui ont été essayées à l’occasion.
Pour Netanyahu, le couronnement d’un allié à la vision du monde partagée
Si les sondeurs devaient être crus – mais pourquoi le seraient-ils ? – les Israéliens auraient préféré Hillary Clinton. En partie, j’imagine, en raison d’un dégoût de l’homme. Après tout, ils ont dit aux mêmes sondeurs qu’ils pensaient que les politiques de Trump pourraient être meilleures pour Israël que celles de Clinton. En partie aussi, parce qu’ils ont peut-être pensé savoir où ils en étaient avec elle. Pour nous, comme pour les Etats-Unis et le reste du monde, nous faisons désormais face à une page blanche. Le président élu n’a pas de bilan de gouvernance, pas de bilan de vote pour indiquer son futur comportement.
Nous, en Israël, avons toujours apprécié trois qualités chez les présidents américains. D’abord, en tant que pays dépendant de notre alliance avec les Etats-Unis, nous cherchons un président qui a de l’empathie pour l’Etat juif, apprécie à juste titre notre légitimité, et est engagé personnellement pour assurer notre survie.
Ensuite, nous espérons d’un président qu’il soit profondément conscient des défis que nous affrontons dans un Moyen Orient impitoyable, une région où tout le monde ne veut pas vivre et laisser vivre, et où beaucoup se font laver le cerveau pour tuer et être tués.
Et enfin, nous cherchons un président qui sera fiable pour nous soutenir, en tout temps, mais particulièrement quand le besoin s’en fait sentir. Nous ne demandons pas aux citoyens d’un autre pays que le nôtre de risquer leurs vies pour notre défense, mais nous dépendons du soutien américain, militairement, économiquement, diplomatiquement, moralement, pour faire en sorte que nous puissions nous défendre nous-mêmes.
Donald Trump a-t-il manifesté une affinité émotionnelle particulière avec Israël ? Reconnaît-il le mal que les hommes peuvent faire dans cette partie du monde et d’autres ? Sera-t-il de notre côté de manière fiable ?
Aux deux premières questions, même beaucoup de ses détracteurs reconnaitraient que la réponse raisonnable est oui. A la troisième, nous le découvrirons au fur et à mesure, alors que nous, les Etats-Unis et le reste du monde apprendrons à connaître une réalité que beaucoup d’experts auto-proclamés ont tant refusé d’envisager : celle de vivre dans un monde où les États-Unis d’Amérique sont dirigés par le président Donald Trump.
De manière plutôt désespérée, le chef de l’opposition israélien, Isaac Herzog, s’est précipité mercredi pour décrire la victoire comme la preuve d’un changement à l’échelle mondiale dont il finira par bénéficier, décrivant le résultat de l’élection comme une partie d’un « tsunami économique, social et de leadership, touchant de nombreux pays, qui entraînera aussi un changement en Israël. »
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, voit, avec certitude, la victoire de Trump assez différemment, comme le couronnement d’un allié qui partage sa pensée d’une force projetée, et qui partage largement son avis sur l’accord nucléaire iranien et le conflit palestinien, les deux sujets qui sont au cœur de ses frictions avec le président Barack Obama.
Dans les heures qui ont suivi la confirmation de la victoire, en effet, différents membres de la coalition ont salué le président élu Trump comme l’un des leurs.
La ministre de la Justice Ayelet Shaked, à l’instar du maire de Jérusalem, a annoncé sur Twitter son anticipation heureuse du déménagement promis par Trump de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem. Et le ministre de l’Education Naftali Bennett a déclaré que « l’ère d’un état palestinien est terminée », étant donné la position de Trump sur ce sujet, « comme [cela est] écrit dans son programme ».
Eh bien, peut-être. Ou peut-être pas. Parce que Herzog a raison sur une chose. L’élection de Trump au poste le plus puissant du monde libre est un tsunami, c’est vrai. Et l’on ne connait tout simplement pas ses conséquences.
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