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Entre tradition et modernité : Une application spécialisée dans la halakha

Besoin de conseils sur la loi juive ? Il suffit d’envoyer un SMS anonyme à un panel d’experts rabbiniques pour recevoir une réponse en quelques heures avec ShailaText

Yaakov Schwartz est le rédacteur adjoint de la section Le monde juif du Times of Israël

Illustration : Un Haredi consulte son téléphone portable à Jérusalem (Crédit : Svarshik/iStock de Getty Images)
Illustration : Un Haredi consulte son téléphone portable à Jérusalem (Crédit : Svarshik/iStock de Getty Images)

Lorsque le rabbin Gershon Lopian, l’une des principales autorités en matière de droit juif à Londres, avait pris sa retraite de son poste à la tête de la synagogue de la Fédération Yeshurun, dans la banlieue d’Edgware, il avait attendu à côté de son téléphone que les questions lui viennent – ce qui n’avait pas manqué d’arriver.

Disponible pratiquement jour et nuit, Lopian répondait aux questions parfois très personnelles de ses concitoyens sur la halakha – la loi juive -, que ce soit en matière de casheroute, de pratiques commerciales équitables, du Shabbat et des jours fériés, de la pureté familiale, etc…

Pour les Juifs orthodoxes, soumis à un tel nombre d’interdits qu’il leur faut une autorité légale pour en connaître tous les détails, prendre son téléphone pour consulter un rabbin n’a rien d’exceptionnel – mais le fait que Lopian répondait en personne l’était davantage.

Lorsque Lopian était décédé en 2014, il avait semblé à tous que seule une équipe de rabbins serait en mesure de combler le vide qu’il laissait derrière lui.

C’est alors que ses étudiants ont eu l’idée de lancer ShailaText, plate-forme mobile gratuite dédiée à la mémoire de Lopian où tout le monde peut poser anonymement des shailas par SMS – shaila est le mot hébreu pour designer les questions mais il fait aussi référence aux demandes de renseignements sur la loi juive.

La réponse est apportée par un groupe de rabbins, avec rapidité et efficacité.

Géré et financé par la Fédération Kehillas, organisation-cadre des communautés orthodoxes du Royaume-Uni, cette plate-forme est rapidement devenue incontournable, répondant à une multiplicité de besoins communautaires, en ligne et hors ligne.

ShailaText a commencé modestement, avec quatre rabbins qui ont pris le relais de feu Lopian.

Pour préserver l’anonymat des personnes qui sollicitent ce service, un employé du bureau de la Fédération transmet les questions à un groupe WhatsApp afin que les rabbins puissent en débattre. À leur tour, ils apportent une réponse, qui est transmise à l’envoyeur.

En peu de temps, cette version moderne du questionnement s’est popularisée.

Lancé en juin 2015, ShailaText comptait, un an plus tard, 1 200 utilisateurs uniques auteurs de près de 7 000 questions, rappelle au Times of Israel le rabbin Avi Lazarus, Directeur de la Fédération Kehillas.

Ce mois-ci – qui coïncide avec l’anniversaire de la mort de Lopian – le service compte pas moins de 10 000 utilisateurs uniques et il a reçu sa 100 000e question.

L’équipe est désormais composée de neuf rabbins à plein temps, qui peuvent traiter jusqu’à 250 questions par jour avant les grandes fêtes, et en-dehors, de 40 à 60 saisines quotidiennes.

Le service s’est également doté d’une application back-end pour faire face au volume important des demandes.

Capture d’écran du site Internet ShailaText. (Capture d’écran utilisée conformément à l’article 27a de la loi sur les droits d’auteur.)

Le site Internet ShailaText garantit une réponse dans les quatre heures ouvrables, « mais en réalité, on est plus proche d’une heure », explique Lazarus.

À mesure que les demandes affluent, le service se perfectionne.

Désormais, les questions sont triées par catégorie et confiées au rabbin dont l’expertise est la meilleure dans chaque domaine, comme celui de la casheroute.

Les personnes ayant des questions sur les taxes perçues sur les produits importés par Israël peuvent soumettre leurs questions à MaaserText, service autonome dont le panel de rabbins a une profonde connaissance du sujet.

Et cette année, la Fédération a lancé ShemittaLive, ressource en ligne pour ceux qui souhaitent des informations sur la septième année de jachère agricole.

Le succès de ShailaText a incité la Fédération à répondre à d’autres besoins communautaires, ce qui a conduit à la création de Kehilla Services, qui offre un large éventail de services en matière de vie juive pratiquante.

Les personnes désireuses de se défaire correctement de textes sacrés inutilisables ou de certains objets rituels – qui doivent être enterrés dans un cimetière juif – peuvent y trouver l’emplacement de boîtes de dépôt installées dans la banlieue de Londres.

Pour les questions concernant la technologie et le Shabbat, comme les fours et autres cuisinières disposant d’un « mode Shabbat », il existe FedTech, qui non seulement donne des conseils aux consommateurs sur les produits véritablement conformes, mais qui est également consulté par les principaux producteurs d’appareils ménagers, précise Lazarus.

La pandémie de coronavirus a causé des difficultés à ceux qui souhaitaient se conformer aux lois exigeant que l’argenterie, les ustensiles de cuisine et autres articles de cuisine soient immergés dans un bain rituel avant utilisation. En effet, face au confinement et à la fermeture des bains rituels, cette immersion était impossible.

À cette fin, Kehilla Services a créé une plate-forme en ligne permettant à ceux qui le souhaitent de vendre temporairement leurs articles à une personne non juive, contournant ainsi l’exigence, puisqu’ils n’en étaient pas techniquement les propriétaires.

Passer à la haute technologie n’a rien enlevé à la touche personnelle si caractéristique des communautés orthodoxes, souvent chaleureuses et accueillantes en raison de leur petite taille et de leur mode de vie communautaire.

Le rabbin Yisroel Moshe Guttentag, l’un des experts de ShailaText, évoque une question arrivée tardivement à la veille de la fête de Pourim, célébrée cette année le 6 mars dernier.

« Il était très tard dans l’après-midi, et quelqu’un a posé la question : ‘Ma femme et moi sommes tous les deux malades : devons-nous absolument entendre la méguila [Livre d’Esther] ?’ » se rappelle Guttentag.

« Nous avons répondu : « Où habitez-vous ? »

Quelqu’un était sur place, avec eux, avant le coucher du soleil.

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