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Analyse

Inversant son approche, Washington vise le calme au Liban pour qu’il s’étende à Gaza

Joe Biden affirme désormais que la volonté du Hezbollah de se déconnecter de la bande de Gaza offre une opportunité et espère que le Hamas en tiendra compte

Jacob Magid

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

L'envoyé spécial américain Amos Hochstein (au centre) s'adressant aux médias après sa rencontre avec le président du Parlement Nabih Berri, à Beyrouth, au Liban, le 18 juin 2024. (Crédit : Bilal Hussein/AP)
L'envoyé spécial américain Amos Hochstein (au centre) s'adressant aux médias après sa rencontre avec le président du Parlement Nabih Berri, à Beyrouth, au Liban, le 18 juin 2024. (Crédit : Bilal Hussein/AP)

WASHINGTON – L’administration du président américain Joe Biden considère désormais l’obtention d’un cessez-le-feu au Liban comme le meilleur moyen de mettre fin à la guerre menée contre le groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza, ont déclaré deux responsables américains au Times of Israel mercredi, reconnaissant que Washington avait inversé son évaluation au cours des dernières semaines après avoir affirmé pendant des mois que le calme dans l’enclave était ce qui permettrait de désamorcer les tensions le long de la Ligne bleue.

Ce revirement fait suite à l’élargissement significatif des opérations israéliennes contre le groupe terroriste chiite libanais du Hezbollah à la mi-septembre, qui comprenaient des explosions des dispositifs de communication du groupe terroriste (dont Israël n’a pas revendiqué la responsabilité), l’élimination d’une grande partie de ses dirigeants et une incursion terrestre limitée qui a démantelé une grande partie de son infrastructure terroriste dans le sud du Liban.

Avant ces développements, les responsables américains ont souligné à maintes reprises le serment du Hezbollah de ne pas cesser ses attaques transfrontalières contre Israël tant qu’il n’y aurait pas de cessez-le-feu, ce qui signifiait que Jérusalem devait accepter que la route vers le calme le long de la frontière libanaise passe par l’enclave palestinienne.

« La première chose que nous voulons obtenir, c’est un cessez-le-feu à Gaza… parce que nous pensons que cela nous permettrait de débloquer une solution diplomatique de l’autre côté de la Ligne bleue », a déclaré le 17 septembre le porte-parole du Département d’État, Matthew Miller, en référence à la ligne de démarcation entre Israël et le Liban.

Le même message a été répété par les représentants de Biden en août, juillet, juin et mai, alors qu’ils donnaient la priorité aux efforts visant à obtenir la libération des otages et un accord de cessez-le-feu à Gaza.

Toutefois, face à l’intensification de l’opération militaire israélienne contre le Hezbollah, les responsables du groupe terroriste ont commencé à indiquer qu’ils étaient prêts à accepter un cessez-le-feu, qu’une trêve soit ou non conclue à Gaza au préalable.

Des sauveteurs de la défense civile cherchant des survivants sur le site d’une frappe aérienne israélienne sur le village de Haret Saida, près de la ville de Sidon, au sud du Liban, le 29 octobre 2024. (Crédit : Mahmoud Zayyat/AFP)

Les gains militaires réalisés par Israël et la volonté du Hezbollah de se dissocier de la guerre à Gaza ont permis aux États-Unis de progresser ces derniers jours vers un cessez-le-feu le long de la Ligne bleue.

En conséquence, l’envoyé spécial américain Amos Hochstein arrivera à Jérusalem jeudi pour rencontrer de hauts responsables israéliens au sujet de sa nouvelle proposition de cessez-le-feu au Liban.

Un projet de proposition américaine rapporté mercredi par la chaîne publique Kan décrit une période de mise en œuvre de 60 jours pour l’accord, au cours de laquelle Israël retirerait initialement ses troupes du sud-Liban et les forces armées libanaises (LAF) s’y déploieraient à la place, démantelant au passage les infrastructures restantes du Hezbollah.

Grâce à la mise en place de nouveaux mécanismes d’exécution, la proposition américaine vise à garantir la pleine application de la résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies, qui stipule que le Hezbollah doit se désarmer et se retirer au-delà du fleuve Litani, à une trentaine de kilomètres au nord de la frontière, et qui n’a pas été mise en œuvre depuis son adoption à la fin de la Deuxième Guerre du Liban, en 2006.

La résolution 1701 du Conseil de sécurité des Nations unies interdit au Hezbollah de maintenir une présence armée au sud du fleuve Litani. Le groupe terroriste chiite libanais a violé cette résolution de manière flagrante et lance, depuis le 8 octobre 2023, au lendemain du pogrom mené par le groupe terroriste palestinien du Hamas en Israël, des attaques contre Israël depuis la frontière.

La décision de Hochstein de se rendre en Israël fait suite à des indications de Jérusalem et de Beyrouth selon lesquelles ils étaient prêts à aller de l’avant avec la proposition américaine et que le Hezbollah était disposé à faire de même, a déclaré un responsable israélien au Times of Israel.

Le fonctionnaire israélien a précisé qu’un accord n’était pas probable avant l’élection présidentielle américaine de la semaine prochaine, mais il a estimé qu’un délai d’un mois pour son approbation était « très réaliste ».

Prendre le Hezbollah au mot

Des personnes regardant le nouveau chef du Hezbollah, Naïm Qassem, prononcer un discours télévisé dans la ville portuaire de Sidon, au Liban, le 30 octobre 2024. (Crédit : Bilal Hussein/AP)

Parallèlement, les États-Unis ont commencé à modifier leur rhétorique concernant le lien entre les guerres entre Israël et les groupes terroristes palestinien du Hamas et chiite libanais du Hezbollah et l’Iran.

« Nous avons toujours pensé que [le cessez-le-feu au Liban] devait être dissocié de Gaza », a déclaré Miller mercredi.

Les États-Unis se sont en effet prononcés contre la décision du Hezbollah de commencer à lancer des attaques quasi-quotidiennes contre Israël le 8 octobre 2023, et ont rejeté l’idée que cela équivalait à une solidarité avec les Palestiniens.

Dans le même temps, Washington a pratiquement adopté comme théorie opérationnelle l’affirmation du Hezbollah selon laquelle le calme à la frontière israélo-libanaise dépendait d’un cessez-le-feu à Gaza.

Des Palestiniens fouillant les décombres d’un bâtiment après une frappe israélienne, à Beit Lahiya, dans le nord de la bande de Gaza, le 29 octobre 2024. (Crédit : AFP)

Interrogé le mois dernier sur les raisons pour lesquelles le calme à Gaza devrait passer en premier, Miller a répondu : « C’est le fait que le Hezbollah a clairement indiqué qu’il n’y aurait pas de fin aux attaques terroristes contre Israël tant qu’il n’y aurait pas de cessez-le-feu à Gaza. »

Coincé à Gaza

Un responsable américain a déclaré au Times of Israel que la volonté du Hezbollah de se déconnecter de la guerre de Gaza augmentait non seulement les chances d’un cessez-le-feu au Liban, mais améliorait également les perspectives du Hamas d’assouplir sa position dans les pourparlers relatifs aux otages lorsqu’il comprendrait qu’il se bat de plus en plus seul contre Israël.

Les médiateurs américains, égyptiens et qataris ont cherché à relancer les négociations sur un accord de « trêve contre libération d’otages » depuis qu’Israël a éliminé le chef du Hamas, Yahya Sinwar, il y a deux semaines.

Washington a présenté la mort de Sinwar comme une occasion de faire une percée, arguant que le chef du groupe terroriste palestinien était le principal obstacle à la conclusion d’un accord.

L’Égypte et le Qatar sont moins convaincus, estimant que l’élimination de Sinwar décentralise le processus décisionnel du Hamas, compliquant ainsi les efforts déployés pour parvenir à un accord.

Néanmoins, l’Égypte a proposé un cessez-le-feu de 12 jours en début de semaine, au cours duquel quatre otages saisis par le Hamas lors de son assaut barbare et sadique seraient libérés en échange d’au moins 100 prisonniers palestiniens incarcérés pour atteinte à la sécurité en Israël. Au cours de ces 12 jours, les parties conviendraient de négocier un accord à plus long-terme sur les otages.

Les médiateurs s’efforcent de vendre la proposition aux parties, et le directeur de la CIA, William Burns est parti au Caire mercredi pour discuter davantage de l’offre.

Des manifestants réclamant la libération des Israéliens retenus en otage dans la bande de Gaza et des élections législatives anticipées, à proximité de la Knesset, à Jérusalem, le 28 octobre 2024. (Crédit : Arie Leib Abrams/Flash90)

Un second responsable américain a précisé que les États-Unis « travaillent simultanément sur Gaza et le Liban », notant que Hochstein et l’expert du Proche-Orient de la Maison Blanche, Brett McGurk, arriveront en Israël jeudi, le premier étant chargé de discuter du cessez-le-feu au Liban et le second visant à faire avancer une trêve à Gaza.

Toutefois, le fonctionnaire a reconnu que les négociations sur le Liban avaient actuellement plus de chances d’aboutir.

« L’espoir est que cela se traduise ensuite par un succès à Gaza », a déclaré le fonctionnaire américain.

La corrélation est-elle synonyme de causalité ?

Le directeur de la CIA William Burns (au centre) quittant les lieux après avoir témoigné devant le Sénat américain, sur la colline du Capitole, à Washington, le 11 mars 2024. (Crédit : Mandel Ngan/AFP)

Ce n’est pas la première fois que les négociations en vue d’un cessez-le-feu au Liban semblent plus avancées qu’à Gaza. Fin septembre, les États-Unis ont présenté une initiative en faveur d’un cessez-le-feu de 14 jours, estimant avoir obtenu le soutien de Jérusalem et de Beyrouth.

Mais cette initiative n’a pas eu le succès escompté, allant jusqu’à s’effondré complètement lorsqu’Israël a éliminé le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, deux jours plus tard.

Le premier responsable américain a affirmé que ce dernier cycle de négociations sur le Liban était différent parce que le Hezbollah avait « exclu Gaza de l’équation ». Le nouveau chef du Hezbollah, Naïm Qassem, a déclaré mercredi que son mouvement était prêt à conclure un cessez-le-feu avec Israël si les conditions étaient « convenables », tout en ne mentionnant pas la guerre en cours dans la bande de Gaza.

Un diplomate arabe, s’exprimant également sous le couvert de l’anonymat, s’est montré moins généreux dans son explication du changement d’approche des États-Unis, affirmant qu’il s’agissait plutôt de « lancer un maximum d’idées sur le mur en espérant qu’il y en ait une qui tienne ».

Ils ont essayé la stratégie « Gaza d’abord » et ces pourparlers sont toujours bloqués, alors maintenant ils inversent le scénario », a déclaré le diplomate.

« Si la stratégie du ‘Liban d’abord’ réussit et qu’un cessez-le-feu à Gaza s’ensuit, je ne suis pas sûr que la corrélation aura signifié la causalité », a-t-il ajouté, faisant valoir que chaque conflit se déroule à son propre rythme et qu’il se terminera en conséquence.

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