Knesset : Pas de mères porteuses pour les couples homosexuels
"Nous sommes assez bons pour servir le pays mais pas pour être parents", a déploré le député Itzik Shmuli au cours d'une réunion de commission émouvante
La commission du Travail, des affaires sociales et de la santé a amendé lundi un projet de loi portant sur les mères porteuses pour élargir l’éligibilité à la procédure aux femmes célibataires mais en refusant aux couples homosexuels le droit d’avoir des enfants par ce biais.
Selon le projet de loi actuel, les femmes célibataires dans l’incapacité d’avoir des enfants pour des raisons médicales auront dorénavant l’autorisation de faire appel à une mère porteuse. Jusqu’à présent, ce droit n’avait été accordé qu’aux couples mariés hétérosexuels.
Autre changement, le recours à une mère porteuse ne se limitait qu’à deux enfants au sein d’une famille. Ce nouvel amendement fait passer ce chiffre à cinq.
De plus, l’âge limite des mères porteuses a été élevé de 38 à 39 ans, et une mère porteuse pourra dorénavant donner naissance à cinq enfants (dont les siens) au lieu de quatre, comme le spécifiait la loi auparavant.
Amir Ohana, député du Likud et homosexuel, a proposé un amendement pour inclure les couples de même sexe dans le projet, ce qui a été rejeté. Lors d’un échange rempli d’émotion, il a raconté à la commission les combats qu’il devait mener, à commencer dans sa propre famille.
« Quand mon mari et moi-même avons voulu élever une famille, nous avons dû voyager à des milliers de kilomètres, dans un autre pays. Les jumeaux sont nés prématurément et nous ne nous trouvions pas à leurs côtés », a-t-il raconté.
« J’ai dû retourner la terre entière pour trouver un Juif, qui ne me connaissait pas mais qui vivait à proximité, pour être avec eux. Je ne défie pas le rabbinat et je ne vais pas contre la religion, je ne fais que demander un semblant d’humanité ».
Le député Itzik Shmuli (Union sioniste) a pour sa part dit à la commission que les discriminations qui nient aux couples de même sexe les mêmes droits sont « une insulte ».
« Je veux être père et je ne peux pas être père. Pour le devenir, je dois aller dans un pays étranger, payer 140 000 dollars et espérer que tout aille bien. Ma vie est remplie, mais il y a toujours quelque chose qui me manque et qui m’accompagne partout où je vais », a expliqué Shmuli.
« Nous sommes assez bons pour servir le pays mais pas pour être parents. C’est une situation qui est simplement discriminatoire, douloureuse, remplie d’insultes et de malhonnêteté. C’est mal ».
Le projet de loi a été adopté avec une majorité de 8 voix contre 4. Ceux qui ont voté en sa faveur sont les députés Eli Alaluf (Koulanou), Nava Boker (Likud), Avraham Neguise (Likud), Michael Michaeli (Shas), Yisrael Eichler (YaHadout HaTorah), Moti Yogev (HaBayit HaYehudi), Tali Ploskov (Koulanou), Akram Hasson (Koulanou).
Quatre députés ont voté contre : Yael German (Yesh Atid), Ilan Gilon (Meretz), et Michal Biran et Itzik Shmuli de l’Union sioniste.
Dans un échange cinglant, Biran a critiqué Alalouf pour son soutien apporté au texte.
« Je ne comprends pas comment vous pouvez vous montrer si lâche », a-t-elle accusé. « Comment pouvez-vous tendre ainsi la main à l’homophobie ? Les gens expriment de la haine, des incitations à l’égard des homosexuels et vous leur apportez votre appui par votre inaction ».
Le militant agissant dans la défense des droits de la communautés gay Oded Fried a fustigé le projet de loi, disant que « nous devons mettre un terme à ce mensonge connu sous le nom de loi sur les mères porteuses. C’est une loi contre les familles gay et contre le droit fondamental à fonder une famille ».
La constitution même de la coalition rend difficile l’adoption de lois en faveur des droits des homosexuels. Les partis religieux, qui s’opposent traditionnellement à de telles législations, détiennent un pouvoir significatif au sein de la coalition.
Le ministère des Affaires sociales avait annoncé l’année dernière son opposition à l’adoption par les couples homosexuels en Israël parce qu’elle placerait un « fardeau supplémentaire » sur les enfants.
Mais suite à la vive indignation qui avait suivi cette annonce, alors que des milliers d’Israéliens étaient descendus dans les rues de Tel Aviv pour protester contre ce qui, selon eux, était une politique discriminatoire, le ministère avait fait volte-face moins d’un mois plus tard et estimé que c’était le rôle de la Knesset de répondre à la question à travers une législation.