L’accord avec le Liban garantit la sécurité des Israéliens – Envoyé américain
Amos Hochstein a estimé que le fait que deux pays ennemis soient parvenus à un accord sur la frontière maritime est "extrêmement significatif"
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
WASHINGTON – L’émissaire de l’administration Biden pour l’énergie a insisté jeudi sur le fait que l’accord maritime, qu’il a négocié entre Israël et le Liban, garantira la sécurité de l’État juif, et il s’est opposé aux affirmations de ceux qui ont prétendu que Jérusalem, en acceptant l’accord, avait cédé aux menaces terroristes.
Amos Hochstein a décrit le pacte historique, qui délimitera une frontière maritime et divisera les réserves de gaz offshore entre les deux pays, comme un accord « gagnant-gagnant » lors de deux interviews accordées à une heure de grande écoute sur les deux plus grandes chaînes de télévision israéliennes.
« Israël a longuement négocié sur la question des arrangements sécuritaires à proximité de la côte et le pays a obtenu ce qu’il voulait », a-t-il déclaré à la Douzième chaîne.
Il a noté que le dernier cycle de négociations avait réussi, après onze ans d’efforts diplomatiques pour la plupart infructueux, lorsqu’il avait « décidé de changer l’équation » en reconnaissant que chacune des deux parties avait des objectifs distincts dans le cadre du conflit maritime qui les opposaient – des objectifs qui n’étaient pas pour autant nécessairement mutuellement exclusifs.
L’accord donne à Israël des droits exclusifs sur le gisement de Karish mais le pays cède néanmoins le gisement de Cana qui était convoité par l’État juif – même si Jérusalem recevra une part des revenus provenant des richesses gazières potentielles extraites des fonds marins dans le cadre d’un bail libanais.
« Que veut vraiment Israël au bout du compte ? Israël veut avoir sa part du gâteau. C’est une réalité », a déclaré Hochstein à la Treizième chaîne.
« Mais Israël veut surtout la sécurité et la stabilité dans la mer Méditerranée. Parce que la dépendance d’Israël à l’égard de la mer Méditerranée est le résultat de son succès massif dans l’exploitation d’une telle quantité de gaz naturel », a ajouté Hochstein.
Les gouvernements israélien et libanais ont tous deux soutenu le texte final de l’accord la semaine dernière, mais Netanyahu a déclaré qu’il ne se considérerait pas lié par cet accord s’il parvenait à reprendre le pouvoir après les élections législatives du 1er novembre, qualifiant le pacte de « capitulation » d’Israël face aux menaces proférées par le groupe terroriste du Hezbollah.
La semaine dernière, Hochstein avait qualifié la rhétorique de Netanyahu sur la question de posture politique visant à gagner des voix.
« Il y a toujours beaucoup de rhétorique enflammée dans les campagnes politiques, surtout à l’approche des élections », avait déclaré Hochstein à la Douzième chaîne, indiquant que Netanyahu n’avait pas été opposé à un accord qui présentait des paramètres similaires.
« Je pense que l’intérêt dominant de l’establishment de la sécurité nationale israélienne, de ce gouvernement et des gouvernements précédents est qu’ils ont tous souhaité un arrangement selon ces lignes », avait-il ajouté.
Le médiateur avait également noté que le Liban avait, lui aussi, fait des concessions dans le cadre de l’accord, indiquant que Beyrouth ne voulait pas initialement reconnaître officiellement la limite de la ligne de bouées qu’Israël avait unilatéralement établie en 2000 et qui s’étend sur environ cinq kilomètres au large de Rosh Hanikra – mais que le pays avait accepté de le faire d’une « manière juridiquement contraignante », transformant la limite en frontière.
« La partie la plus importante – les cinq premiers kilomètres – est ce qui importe en matière de sécurité. Là où vous vous trouvez quand vous êtes à 30 kilomètres du rivage, en mer, ce n’est pas important. Israël a dorénavant la capacité de contrôler ce qui se passe jusqu’à cette ligne et d’avoir une visibilité. C’est une sécurité énorme pour Israël », a-t-il estimé.
« Savoir qu’il n’y aura pas de menace de missiles depuis le gisement [de gaz] de Karish jusqu’au sud apporte également une sécurité supplémentaire à Israël », a affirmé Hochstein lors de l’interview sur la Douzième chaîne. « Israël a donc obtenu la stabilité et la sécurité. »
Ses propos ont largement fait écho à ceux des dirigeants israéliens. Mardi, le Premier ministre Yair Lapid avait déclaré que l’accord « renforcerait la sécurité d’Israël, injecterait des milliards dans l’économie israélienne et assurerait la stabilité de la frontière nord du pays ».
Hochstein a affirmé que les concessions faites par Israël sur le champ de Cana, qui chevauche les zones économiques exclusives des deux pays mais qui sera contrôlé par le Liban, étaient insignifiantes.
« Israël n’a renoncé à aucun gaz, n’a renoncé à aucune ressource. Le champ de gaz en question, situé sur la frontière à l’intérieur des eaux contestées, n’a encore jamais été foré. Nous ne savons même pas s’il y a du gaz là-bas », a-t-il dit.
L’accord prévoit qu’Israël sera indemnisé pour le gaz extrait de Cana de son côté de la frontière, ce qui représentera 17 % des recettes totales.
Quant au Liban, Hochstein a déclaré que l’accord lui offrait « suffisamment d’argent pour arrêter le déclin, l’effondrement et la dévastation absolue de son économie et pour commencer à redresser la situation ».
« C’est un premier signe d’espoir », a-t-il poursuivi, affirmant qu’il est dans l’intérêt d’Israël que le Liban prospère économiquement.
Interrogé sur les garanties qu’Israël a reçues pour que les revenus du gaz ne finissent pas dans les coffres du groupe terroriste du Hezbollah, soutenu par l’Iran, qui joue un rôle dans le gouvernement libanais naissant, Hochstein s’est contenté de dire qu’il faudrait attendre des années avant de tirer des revenus du gisement et que le principal bénéficiaire en serait le peuple libanais.
« Le gaz ira dans les centrales électriques afin de s’assurer qu’un pays qui souffre de n’avoir droit qu’à moins de deux heures d’électricité par jour pourra enfin commencer à relancer son économie et redonner de l’espoir à son peuple », a déclaré Hochstein.
L’envoyé américain a reconnu qu’il y avait eu des propositions plus favorables à l’une ou l’autre des parties, mais qu’elles n’étaient pas pertinentes – n’ayant mené qu’à des impasses lors des précédentes négociations sous les administrations Obama et Trump.
Dans les deux interviews, l’envoyé de Biden a été interrogé sur le fait qu’il eut été préférable d’attendre les élections israéliennes pour finaliser l’accord, au vu de la proximité du scrutin.
Hochstein a fait valoir qu’il aurait été idéal de parvenir à un accord plus tôt, mais que les pourparlers se sont déroulés « sans relation aucune avec les échéances politiques ».
« Nous avons finalement eu une opportunité. [Et] si vous attendez le bon moment dans le calendrier politique, il n’y a aucune garantie que cette opportunité revienne et se représente », a-t-il déclaré.
« L’urgence réside dans le fait que lorsqu’il y a une preuve de bonne volonté… de la part de deux États ennemis… il faut saisir cette opportunité qui permet de fournir à Israël des garanties de sécurité et d’assurer la stabilité et la sécurité d’Israël et qui permet aussi, de l’autre côté, d’offrir de l’espoir et des opportunités économiques au Liban », a ajouté Hochstein.
Netanyahu et d’autres ont affirmé que le gouvernement de Lapid, qui n’a pas de majorité à la Knesset, n’avait pas le pouvoir nécessaire pour approuver un accord d’une telle portée, mais cette affirmation a été réfutée par la procureure-générale d’Israël et par la Cour suprême.
Plus tôt dans la journée de jeudi, le président libanais Michel Aoun avait annoncé que Beyrouth avait formellement accepté l’accord négocié par les États-Unis, mais il avait souligné « qu’aucune normalisation avec Israël n’avait eu lieu ».
Il avait également affirmé que « l’accord indirect répondait aux demandes libanaises et garantit tous les droits ».
Néanmoins, Hochstein a dépeint l’accord comme une percée historique qui « met fin à une période de conflit » entre ces deux pays ennemis.
« Le Liban a toujours dit qu’il ne conclurait jamais d’accord avec Israël, et Israël n’a jamais été en mesure, depuis sa création, de conclure un accord avec le Liban sur quelque question que ce soit – et certainement pas sur la délimitation des frontières », a-t-il déclaré. « Compte-tenu des paramètres et au vu du contexte, je pense que cet accord a une signification majeure. »