Les héros juifs de l’ouragan Harvey
Alors que les inondations ont atteint le deuxième étage des habitations, que 30 000 personnes ont été déplacées et que 100 000 n'ont pas l'électricité, voilà quelques-unes de ces personnes qui ont risqué leur vie pour sauver celle des autres
Après s’être assuré que son épouse Basya et leurs trois enfants étaient sains et saufs et ne manquaient de rien, Tomer Ben Shushan a profité d’une brève accalmie des pluies torrentielles entraînées dimanche soir par la tempête tropicale Harvey pour « s’approprier » un camion de secours.
Avec un ami, Ben Shushan a bravé une cinquantaine de kilomètres dans les rues de Houston sous les eaux pour aller récupérer le véhicule de construction appartenant à des amis en commun, un camion lourd doté d’une petite grue, qui était stationné à proximité de l’aéroport intercontinental George Bush de la ville. Le semi-remorque était tellement gorgé d’eau qu’il a fallu le démarrer en poussant.
Avec un niveau de pluie record et des inondations qui ont pris par surprise les habitants de Houston les plus aguerris à ce type de catastrophe, des centaines de personnes ont été sauvées par les forces publiques comme par des citoyens privés des étages de leurs habitations lourdement submergées par l’eau. Les responsables estiment que 30 000 personnes seront laissés temporairement sans-abri après l’ouragan Harvey.
Les pluies sont tellement fortes que le département de la police de Houston a averti les résidents de ne pas monter au niveau des greniers pour éviter la progression des eaux à moins d’être en possession d’une « hache ou de n’importe quel autre moyen de percer le toit ».
Ben Shushan et son ami, qui sont tous les deux d’ex-soldats de l’armée israélienne, ont expliqué qu’ils mettaient leur expérience militaire au service des familles et des personnes âgées dans l’incapacité d’échapper à leurs maisons.
Les deux hommes sont sortis jusqu’à deux heures du matin, lundi, a déclaré l’épouse de Tomer, Basya Ben Shushan, au Times of Israel, et ils sont revenus plus tard pour aider à libérer des habitants impuissants bloqués dans leurs habitations.
Sur la page Facebook de Basya, un appel à l’aide a été publié lundi après-midi pour un homme qui avait besoin d’un transport dans l’urgence pour son équipement médical.
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« Mon mari est en train d’évacuer une maison… La maison est complètement envahie par les eaux. Il peut secourir la femme et ses deux chiens mais le mari est attaché à des réservoirs d’oxygène et nous avons besoin d’un camion médical pour l’évacuer », a-t-elle écrit. Une réponse au post a établi, deux heures plus tard, que l’homme avait été secouru.
Basya, née à Houston, dit que la ville a été prise par surprise. « Nous avons déjà dû gérer des ouragans et des inondations – chaque année, on traverse un tel événement, mais c’est vraiment, vraiment effrayant », confie Basya.
La communauté juive de Houston, qui se concentre au sud-ouest de la municipalité, a été particulièrement frappée par la tempête. Des douzaines de familles juives ont été déplacées, selon l’organisation JFS (Jewish Family Service), dont le bâtiment lui-même a été endommagé par les eaux. Ce qui a été également le cas de plusieurs synagogues et d’un centre communautaire juif.
La congrégation des synagogues orthodoxes unies (UOS) de Houston « a subi des dégâts catastrophiques », selon un post sur Facebook qui a également fait état d’un appel à l’aide pour reconstruire la synagogue.
Rafi Engelhart, directeur de la branche de l’UOS dans le mouvement Worldwide B’nei Akiva (WBA), le plus important groupe de jeunes sionistes dans le monde, a aidé à sauver la vie de huit personnes lorsque l’une de ses voisines, une technicienne en soins médicaux d’urgence, est parvenue à se procurer un canot pneumatique de sauvetage.
Engelhart et sa famille avaient trouvé refuge dans l’habitation d’un autre voisin dans leur quartier de Willow Meadows, dans une maison qui avait été construite sur des fondations en hauteur pour la protéger des inondations. Mais même ainsi, a confié Engelhart, dès dimanche matin, l’eau a menacé de pénétrer à l’intérieur de la maison.
Ce ‘shliach’ (émissaire) de WBA âgé de 29 ans a parlé au Times of Israel depuis cette habitation, qui est l’une des 100 000 maisons qui étaient encore privées d’électricité lundi.
Engelhart a expliqué que la technicienne en soins médicaux d’urgence avait nagé le long d’un pâté de maisons lorsqu’elle avait appris que le bateau gonflable se trouvait dans le garage d’une famille qui s’était repliée à proximité, sa maison étant complètement submergée, et ce alors qu’il y avait une dizaine de mètres d’eau dans la rue.
Lorsque Engelhart a vu le canot, il n’a pas hésité à sauter dedans. « Je n’allais pas la laisser partir toute seule », a-t-il dit.
« Cela arrive et il faut simplement faire avec. Votre corps se met en mode de survie, et vous ne faites tout à coup que ce qui est strictement à faire et vous ne vous inquiétez du reste qu’après », a-t-il ajouté.
Ils sont partis secourir une famille qui avait été piégée au dernier étage de sa maison. « Ils allaient bien », a commenté Engelhart, « mais ils étaient coincés dans le grenier et l’eau continuait à grimper. Nous avions peur qu’ils n’aient pas d’autre endroit où se réfugier ».
Ils sont également passés devant une autre famille qui était bloquée et qui attendait qu’un proche vienne les secourir. « Nous n’allions pas attendre », a expliqué Engelhart, « alors nous avons pris à bord la mère et la fille et nous les avons ramenées ici avant de retourner chercher les autres ».
Originaire de Cleveland, Engelhart s’est installé en Israël à l’âge de 18 ans avant de revenir aux Etats-Unis pour offrir des activités sociales dans la communauté juive pour les enfants et les jeunes adultes. Aux côtés de son épouse Stacey, il se consacre depuis l’année dernière à la communauté de Houston.
Alors qu’ils se trouvaient sur le canot, les deux sauveteurs ont également entendu qu’il y avait une nonagénaire, de l’autre coté de la rue, dont les lumières étaient allumées à 4 heures du matin. Les voisins, inquiets, n’étaient pas parvenus à contacter le fils de la vieille femme. Engelhart et la technicienne ont donc apporté des outils et, en l’absence d’une réponse, sont entrés par la force dans la maison. « Malheureusement », dit Engelhart, « nous sommes arrivés trop tard ».
Avec des douzaines d’habitations abandonnées dans la communauté juive, Basya Ben Shushan rapporte des cas de pillage. « Les gens qui ont évacué leurs maisons se font voler ce qu’ils possèdent – c’est très triste », déplore-t-elle.
Et pourtant, dit-elle, « nous n’avons jamais vu un tel niveau d’eau. Monter au premier étage, puis au deuxième étage, nous n’avions jamais connu ce type d’inondation. Les gens, pour le moment, sont simplement heureux de quitter leur maison vivants ».
La tempête tropicale Harvey a d’abord touché terre en tant qu’ouragan de quatrième catégorie, dans la nuit de vendredi, à proximité de Corpus Christi, au Texas, avec des vents dépassant les 209 kilomètres heures. Elle s’est ensuite retirée avant de revenir, perdant, cette fois-ci, de la vitesse rapidement. L’ouragan a alors été rétrogradé en tempête tropicale.
Tandis que les vents ont plané à 64 kilomètres heures, la tempête a été à l’origine de pluies sans précédent sur la quatrième plus grande ville des Etats-Unis, causant des inondations dévastatrices. Et, facteur aggravant, cette dépression exceptionnelle ne s’est déplacée qu’à la vitesse de 8 km/h.
La communauté juive s’est rassemblée pour fournir une aide d’urgence à ceux qui sont dans le besoin. Le centre communautaire Evelyn Rubenstein avait heureusement commencé à collecter du matériel d’urgence avant même l’arrivée de la tempête, et a servi de lieu de distribution.
Le site Chabad.org a fait savoir que des représentants du mouvement ont aidé les victimes de la tempête à trouver des abris, qu’ils ont distribué des repas casher dans les refuges et dans les hôtels, et qu’ils collectent actuellement des fonds pour les reconstructions – tout en gérant les dégâts faits par les eaux dans leurs propres habitations.
« Il y a eu beaucoup d’aide et de soutien de la part de la communauté juive avant la tempête également », dit Engelhart. « Attendre les gens qui n’auraient peut-être pas pu partir se réfugier ailleurs ou ceux qui ont pu avoir besoin d’une aide supplémentaire. Nous avons été en contact via WhatsApp et nous avons mis au point des mises à jour, nous savons quelles sont les maisons qui ont été inondées, quels sont les quartiers qui ont été inondés ».
Même si le post, sur Facebook, publié par l’UOS a déploré la dévastation de son propre bâtiment, la congrégation a offert une assistance en mettant en place une équipe de réponse et a attiré l’attention sur la situation critique des autres congrégations qui ont été également touchées.
« Je pense que nous nous associerons pour reconstruire la ville, mais il y a beaucoup de dégâts à réparer et j’ai vraiment peur d’entendre le bilan des victimes qui sont décédées », dit Basya Ben Shushan.
Ce bilan s’élèverait à 10 personnes pour le moment, selon les estimations, un chiffre qui est susceptible d’augmenter avec le retrait des eaux.
« Les gens sont sur les toits, à bord de canots pneumatiques et il y a des gens qui n’ont aucun moyen de faire savoir qu’ils sont dans le besoin », ajoute-t-elle.
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