« Les Secrets de mon père », un film qui explique la Shoah aux enfants
Le film, de Véra Belmont, qui s’adresse aux enfants, aborde avec justesse le thème de la Shoah ; il est adapté de la BD autobiographique "Deuxième Génération" de Michel Kichka
« Les Secrets de mon père » est un long-métrage d’animation sorti en salles en France le 21 septembre.
L’œuvre, réalisée par Véra Belmont, qui s’adresse aux enfants, aborde avec justesse le thème de la Shoah. Elle est adaptée de la BD autobiographique Deuxième Génération – ce que je n’ai pas dit à mon père de l’auteur belgo-israélien Michel Kichka.
Le film démarre dans les années 1960, non loin de Lièges, en Belgique.
Michel et son frère Charly, aventureux et rebelles, vivent alors une enfance heureuse et insouciante, dans leur famille juive.
Alors que leur père passe son temps enfermé dans son bureau, les deux enfants imaginent qu’il écrit le récit de ses aventures passées en tant que pirate ou chercheur d’or. Les chiffres tatoués sur son avant-bras, 177789 ? Un numéro de téléphone à ne pas oublier – mais, quand ils composent le numéro, ils entendent qu’« il n’y a plus d’abonné ».
Leur père, Henri Kichka, est en fait occupé dans son bureau à écrire son autobiographie, Une adolescence perdue dans la nuit des camps, qui sera préfacée par Serge Klarsfeld.
Après son travail d’écriture, l’homme, jusqu’alors taiseux, n’a plus cessé de témoigner, notamment devant les scolaires, conduisant de nombreux voyages commémoratifs à Auschwitz – et ce jusqu’à sa mort, en 2020, à l’âge de 94 ans.
Par ce nouveau film, la réalisatrice Véra Belmont (« Rouge Baiser », « Survivre avec les loups »), 89 ans, productrice de Pialat, Lanzmann, Téchiné et Annaud, vient convoquer sa propre histoire.
Enfant cachée chez les religieuses pendant la guerre, elle avait 17 ans quand ses parents, des résistants communistes d’origine polonaise, l’ont emmenée visiter Auschwitz, où sa famille avait été déportée.
« J’ai toujours pensé qu’on ne pouvait pas tourner dans un camp de concentration. Comment montrer le camp d’Auschwitz ? Comment montrer ce qui est immontrable ? », a questionné la cinéaste.
En adaptant la bande dessinée de Michel Kichka, elle parvient ainsi à aborder le sujet sans montrer les camps, et à s’interroger sur le traumatisme qui a suivi pour les survivants.
« Par son élégance et sa précision, le dessin [d’animation] permet de représenter ‘l’irreprésentable’ et d’aborder les questions les plus graves avec légèreté et humour », explique la réalisatrice.
« Si la vie de la famille Kichka est marquée par la Shoah elle est aussi traversée par les petites ironies de la vie, les drôleries quotidiennes, les disputes, les histoires d’amitié et d’amour », dit-elle. « Le film ne veut négliger aucun moment de la vie quotidienne, ne rien perdre de la grande Histoire ni de celle des hommes et des femmes qui la font. »
« À l’heure où la France réédite ‘Mein Kampf’ ; où les théories raciales enflent dans le discours politique ; où l’antisémitisme, l’islamophobie, la xénophobie travaillent en profondeur le corps social ; où la stigmatisation de l’autre, de l’étranger, du jeune des banlieues, devient une ritournelle dans les médias, il paraît urgent et nécessaire de revenir une fois encore, de revenir toujours, sur la pire histoire humaine du XXe siècle », affirme la réalisatrice française.
« Il faut y revenir pour mettre en lumière combien est monstrueuse, inacceptable, l’idéologie qui sous-tend ces positions et combien les nouvelles générations doivent mesurer l’immense danger qu’elle représente. »
Présenté au dernier Festival de Cannes, le film a particulièrement conquis le jeune public, remportant le Prix des collégiens et le Prix des lycéens 2022.