Netanyahu couvre les implantations d’amour, mais c’est loin d’être réciproque
Irrités par les démolitions d’avant-poste, certains ont hué le Premier ministre et n’accordent que peu de crédit à ses promesses. Et il ne s’agit que de ceux qui n’ont pas boycotté le jubilé

KFAR ETZION, Cisjordanie – Même s’il a fait de son mieux pour flatter les Israéliens de Cisjordanie en les couvrant de louanges et de promesses, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a été chaleureusement accueilli mercredi à la cérémonie officielle célébrant les 50 ans d’implantations en Cisjordanie et sur le plateau du Golan.
Alors qu’il commençait son discours en remerciant les quelque 2 500 personnes présentes pour leur « accueil chaleureux », un groupe d’une dizaine d’habitants de l’avant-poste illégal de Netiv Haavot s’est frayé un passage au milieu de la foule avec des panneaux l’appelant à empêcher les démolitions prévues dans leur quartier du Gush Etzion. « Assez de démolitions », pouvait-on lire.
Netanyahu a dit au public que le gouvernement « s’occup[ait] des familles » de l’avant-poste. La Haute cour de Justice a ordonné la démolition de certaines structures avant le 8 mars 2018, car elles sont construites sur des terrains palestiniens privés.
Malgré les garanties, et même s’il a cité le nom de plusieurs dirigeants des implantations, qu’il a décrits comme des « amis chers », Netanyahu n’a été que tièdement applaudi durant son discours. La réaction la plus enthousiaste a eu lieu à la conclusion de celui-ci, quand le Premier ministre a rendu hommage à l’armée israélienne.

Les protestations et le manque d’enthousiasme du public reflètent la déception profonde de nombreux habitants des implantations devant l’incapacité de Netanyahu à éviter les ordres de la Cour contre les avant-postes illégaux, même si son gouvernement a souvent été décrit comme le plus pro-implantations des dernières décennies.
L’année dernière, l’avant-poste d’Amona a été démantelé tout comme plusieurs maisons de l’implantation voisine d’Ofra ont été jugées construites sur des terrains palestiniens privés, et Netiv Haavot est le prochain sur la liste, malgré les efforts du gouvernement pour reporter les évacuations ordonnées par la cour.
Même si son gouvernement a approuvé la construction de milliers de nouveaux logements en Cisjordanie ces dernières années, Netanyahu a aussi indiqué qu’il était prêt à travailler avec Washington pour restreindre certaines constructions, irritant les dirigeants des implantations qui espéraient une construction sans entrave pendant le mandat du président américain Donald Trump.
Comme il l’a fait dans une célébration similaire en août, Netanyahu a juré de ne pas déraciner une implantation israélienne de plus. « Les implantations sont importantes pour vous, tout autant qu’elles le sont pour moi », a-t-il affirmé.
Cependant, dans un communiqué publié après la cérémonie, des représentants de Netiv Haavot ont indiqué qu’ils n’étaient pas impressionnés. « Le Premier ministre pense-t-il que la démolition prochaine de notre quartier n’est pas la même chose qu’un déracinement ? », ont-ils demandé de manière rhétorique.

La foule rassemblée devant l’amphithéâtre où avait lieu la cérémonie, et où de nombreux gradins réservés aux responsables du Gush Etzion sont restés vides, était encore plus dure.
Plus d’une centaine de militants de La Paix maintenant, association anti-implantation, ont accueilli le cortège de Netanyahu quand il est arrivé sur le parking du complexe de Kfar Etzion, au sud de Jérusalem. Les manifestants critiquaient la politique du gouvernement en Cisjordanie.
Les organisateurs critiquaient à la fois le mouvement des implantations et ce que certains ont décrit comme la nature politique de l’évènement, qui a parfois été utilisé comme une tribune par la droite de la coalition gouvernementale de Netanyahu.
« Nous sommes ici parce qu’il n’y a aucune raison de se réjouir », a dit aux manifestants Avi Buskila, directeur exécutif de La Paix Maintenant. « Nous sommes tous témoins d’un évènement politique maquillé en cérémonie ‘officielle’ », a-t-il ajouté, faisant référence au statut de la cérémonie publique. « Nous sommes ici pour faire entendre la voix de la grande majorité des citoyens d’Israël, qui désirent vivre et s’opposent fermement à l’entreprise d’implantation. »

La cérémonie a attiré l’attention des médias cette semaine, notamment après la diffusion d’un reportage sur la Première chaîne, qui affirmait que l’Union sioniste et Yesh Atid, deux partis de l’opposition, boycottaient l’évènement. Des députés de droite et des dirigeants des implantations ont alors fustigé les deux partis.
Avi Gabbay et Yair Lapid, dirigeants respectifs du Parti travailliste, force majoritaire de l’Union sioniste, et de Yesh Atid, ont chacun publié un communiqué démentant cette information et accusant leurs détracteurs et le gouvernement Netanyahu de jouer une politique mesquine. Gabbay a indiqué que la politisation de l’évènement lui posait problème, mais pas les implantations, et Lapid a affirmé qu’un représentant de son parti centriste serait présent à la cérémonie.
Au final, le seul député de l’opposition présent était Haim Jelin, de Yesh Atid. Même s’il a pris soin de mentionner qu’il désapprouvait la politique du gouvernement en Cisjordanie, Jelin a dit au Times of Israël qu’il était « attristé » d’être le seul député qui ne fasse pas partie de la coalition à être présent. « C’est un évènement qui est censé lier le peuple plutôt que de le diviser », a-t-il dit.
Le député a poursuivi en soulignant avoir « le mouvement des implantations dans le sang. »
Les ambassadeurs du Kenya, de Birmanie, du Rwanda, d’Angola et du Népal étaient présents.
Jon Chessoni, envoyé diplomatique du Kenya, a dit au Times of Israël que sa présence n’indiquait en aucun cas l’approbation des implantations israéliennes en Cisjordanie par son pays. « Je soutiens la solution à deux états, a-t-il dit. Je suis venu ici par respect pour le gouvernement israélien qui m’a invité. »
En plus des rumeurs de boycott de l’opposition, les juges de la Cour suprême avaient indiqué mardi qu’ils ne se rendraient pas à la cérémonie, jugeant qu’il était « inapproprié » que des représentants de la Cour s’y rendent. Mercredi, dans sa réponse à une pétition de l’ONG pro-implantation Regavim, la présidente de la Cour, Miriam Naor, avait affirmé que l’évènement public était « dévoué à une partie. »

S’adressant à des journalistes avant la cérémonie, la ministre de la Culture, Miri Regev, a critiqué les propos de la présidente de la Cour suprême. « Je la respecte, mais elle a franchi ici une dangereuse ligne rouge de la démocratie israélienne. »
« Le gouvernement d’Israël est le seul qui détermine si une cérémonie est une cérémonie officielle, a ajouté Regev. Ceci renforce ceux qui boycottent Israël, le mouvement BDS et l’UNESCO. »
Alors que le message envoyé par ceux qui n’étaient pas présents a pu sembler confus, ceux qui sont venus, notamment plusieurs personnes assises au fond qui ont hué Netanyahu vers la fin de son discours, espéraient que leur désapprobation était bien claire.
« C’était une cérémonie charmante, mais j’espère que le Premier ministre a reçu le message : notre soutien pour lui n’est pas inconditionnel », a dit Shira Flaster, une habitante de Nokdim, alors qu’elle quittait l’amphithéâtre.
« Nous le respectons, et reconnaissons qu’il nous représente bien dans le monde, mais ce n’est pas suffisant. »
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