Netanyahu détrôné par la relève des leaders qu’il a tenté en vain d’écraser
La nouvelle coalition marque la relève de la garde, poussant au pouvoir des politiciens plus jeunes, rompus aux médias, dont beaucoup étaient les apprentis du Premier ministre

Pour la majeure partie du monde, le Premier ministre Naftali Bennett est une figure inconnue. De Washington à Londres, de Pékin à Moscou, chaque détail le concernant est recueilli et scruté en ce moment. Qui est ce nationaliste de droite de 49 ans, ancien chef de cabinet de Benjamin Netanyahu, qui est désormais Premier ministre d’Israël ? Une chose est sûre : il n’a pas la maîtrise de la scène mondiale dont jouissait son prédécesseur.
Mais il y a une autre chose que le monde devrait savoir : De profonds changements se profilent en Israël.
La prestation de serment du 36e gouvernement signifie un changement de garde. Le nouveau gouvernement marque une étape importante en mettant fin à l’ère d’un Premier ministre de 71 ans, né un an après la création de l’État, tout en poussant la jeune génération israélienne, férue de haute technologie et de médias, vers le pouvoir.
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Bennett et Netanyahu sont d’une génération totalement différente ; il en va de même pour le partenaire de Bennett dans le gouvernement de partage du pouvoir, Yair Lapid. Sur les 28 membres du cabinet, un seul est d’un âge proche de celui de Netanyahu : le nouveau ministre des Affaires de la diaspora, Nachman Shai, 74 ans.

Le plus jeune chef de parti de tous les partis souligne ce changement radical : Le président du parti Raam, Mansour Abbas, né en 1974, a 25 ans de moins que le Premier ministre sortant. Abbas est sur le point de devenir le premier dirigeant arabe israélien, depuis un demi-siècle, à diriger son parti politique au sein d’une coalition gouvernementale.
Nouveaux leaders, nouveaux médias
Les nouveaux dirigeants politiques ont également atténué l’avantage de Netanyahu dans un domaine clé : Son adoption rapide des nouveaux médias et sa capacité à les utiliser à son avantage.
Alors que Netanyahu a été perçu au fil des ans comme un magicien de la technologie et des médias, nombre de ses successeurs ont bâti leur fortune dans l’industrie de la presse. Lapid, Merav Michaeli du parti travailliste, Nitzan Horowitz du parti Meretz et Gideon Saar de Tikva Hadasha ont tous travaillé comme professionnels de l’information en tant que chroniqueur, reporter ou présentateur.

Ils n’hésitent pas à utiliser leur savoir-faire médiatique. Ils écrivent de longs posts sur Facebook, parlent facilement aux caméras. Lorsque Netanyahu a adopté, en un clin d’œil, les nouvelles plateformes de médias sociaux, ils étaient juste derrière lui.
Au cours de la dernière décennie, aucun d’entre eux n’a eu à sa disposition, les moyens dont disposait Netanyahu : d’innombrables collaborateurs et assistants, des budgets énormes, etc.
Néanmoins, ils ont tenu le coup : Lapid a utilisé ses talents d’écrivain et son style de présentation cool ; Bennett a réalisé des briefings Zoom et des conférences de presse rapides et sophistiqués à la manière de Cuomo ; Michaeli a fait entrer la caméra dans son salon avec ses célèbres résumés hebdomadaires et a maintenu un flux Instagram populaire.

Même le néophyte politique Abbas est rapidement devenu un magicien de la communication. Il a donné ses conférences de presse en s’adressant à la nation à 20 heures.
Il y a deux semaines, alors que des négociations de coalition se déroulaient dans un hôtel de Ramat Gan, Abbas était le seul homme politique à se faire un devoir de traverser le hall d’entrée lorsqu’il entrait et sortait, laissant les journalistes le poursuivre pour saisir ses commentaires en direct.
Ayant travaillé avec Netanyahu, ils en ont eu assez
Un autre élément commun qui mérite d’être souligné, est que beaucoup de ceux qui sont sur le point de déloger Netanyahu, étaient ses apprentis politiques.
Bennett était le chef de cabinet de Netanyahu, Ayelet Shaked de Yamina était directrice du bureau politique de Netanyahu, et Avigdor Liberman était le directeur général du Likud, un conseiller principal de Netanyahu et un partenaire politique lorsque le Likud et Yisrael Beytenu se sont présentés sur une liste combinée aux élections de 2013. Le chef du parti Kakhol lavan, Benny Gantz, était le chef d’état-major sous Netanyahu, Lapid était un ministre de premier plan dans son gouvernement de 2013, et Saar, du parti Tikva Hadasha, était le secrétaire du cabinet de Netanyahu ainsi qu’un ministre de premier plan sous lui.
Et plus bas dans la liste des législateurs de Tikva Hadasha, les connexions continuent : Zeev Elkin était un ministre du cabinet de Netanyahu ainsi qu’un confident du Premier ministre, Yoaz Hendel était le directeur de la communication de Netanyahu et Zvi Hauser est un ancien secrétaire de cabinet.

Les législateurs qui constituent les bases de la prochaine coalition d’Israël ont étudié dans l’académie de Netanyahu, apprenant des meilleurs. Il s’agit de la prochaine génération de leaders. Ils ont atteint cette position grâce à lui, mais aussi malgré lui.
La nouvelle génération de dirigeants en a eu assez de vivre dans l’ombre de Netanyahu, un homme qui serait apparemment incapable d’attribuer aux autres le mérite de ses succès. Il n’a pas su reconnaître le travail et le dévouement des autres, et a été presque incapable de déléguer des responsabilités ou de donner à quiconque la possibilité d’agir comme bon lui semblait. Et maintenant, après de nombreuses années, cette centralisation du pouvoir et cet égocentrisme ont joué un rôle clé dans son retrait de la scène.
Lorsque le parti Kakhol lavan a été formé en 2019, Netanyahu avait l’habitude de tourner en dérision le fait que la faction avait quatre dirigeants – Gantz, Lapid, Moshe Yaalon et Gabi Ashkenazi. « Combien de chaises sont nécessaires pour remplacer un Premier ministre ? », plaisantait-il.

Cependant, de par sa nature, le gouvernement entrant, qui comprend huit partis très hétéroclites, dont beaucoup de chefs sont d’anciens protégés de Netanyahu, rejette l’idée qu’une seule personne soit suffisamment importante pour occuper seule la barre.
Pour survivre, la coalition a besoin que tous ses composants tirent ensemble pour rester à flot. Aucune des pièces constitutives ne peut être abandonnée.
Ce n’est pas encore la fin de l’ère Netanyahu. Mais c’est peut-être la fin du leadership individuel, non collaboratif et solitaire.
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