Un ado de 14 ans a réalisé un documentaire sur le pogrom du 7 octobre en Israël
Hillel Kornwasser, originaire de Teaneck, a trouvé les atrocités commises par le Hamas si incompréhensibles qu'il a réalisé le film "Forces of Resilience" pour les appréhender
NEW YORK – Hillel Kornwasser se souvient s’être senti désorienté en sortant de l’aéroport international de Newark Liberty en février dernier.
« On aurait dit que la température avait changé. Tout me paraissait accessoire. Tout ce que je faisais semblait secondaire », a-t-il confié lors d’une interview vidéo réalisée tôt le matin depuis sa cuisine, avant qu’il ne prenne le chemin de l’école.
Alors âgé de 13 ans, Kornwasser revenait tout juste aux États-Unis après une visite en Israël, où il s’était rendu sur le site du festival de musique Supernova, où 364 personnes ont été assassinées lors du pogrom perpétré par les terroristes du groupe palestinien du Hamas, le 7 octobre 2023. Ce voyage l’a inspiré à retourner en Israël quelques mois plus tard pour réaliser son documentaire, Forces of Resilience [Les forces de la résilience].
La première du film aura lieu le 22 décembre à Teaneck, dans le New Jersey, ville natale de Kornwasser. Pour des raisons de sécurité, le lieu de la projection ne sera communiqué qu’aux inscrits. Le film explore les différentes manières dont les individus surmontent les séquelles de l’assaut meurtrier, au cours duquel plus de 1 200 personnes ont été tuées par les terroristes du Hamas dans le sud d’Israël et 251 ont été prises en otages et emmenées dans la bande de Gaza.
Le documentaire comprend des interviews avec des survivants du festival Supernova, Daniel Sharabi et Amit Musaei, qui reviennent sur les lieux des massacres avec Kornwasser et partagent leurs souvenirs d’amis assassinés au festival Supernova. Il comprend également des entretiens avec Shabbos Kestenbaum, ancien élève de Harvard et activiste, ainsi qu’avec Jen Airley, qui, en hommage à son fils Binyamin mort au combat à Gaza, a créé Beit Binyamin, une retraite à Safed pour les soldats israéliens et les familles en deuil ou déplacées. Airley prononcera un discours lors de la première.
Kornwasser, actuellement en première année au lycée orthodoxe Yeshiva Heichal HaTorah de Teaneck, était à la synagogue le jour de Simhat Torah lorsqu’il a pris connaissance des agissements du Hamas. Les informations arrivaient par bribes, et ce n’est que plus tard dans la journée, lorsque ses amis sont venus jouer au basket, qu’il a commencé à saisir l’ampleur du massacre. Même à ce moment-là, il admet ne pas avoir pleinement réalisé l’horreur de la situation.
« À ce moment-là, je n’avais toujours pas mesuré l’ampleur de l’attaque. Une partie de moi se demandait pourquoi nous étions aussi abattus. C’était le jour de Simhat Torah, une fête joyeuse et pleine de vie. Je ne comprenais pas. C’est en partie ce qui m’a poussé à entreprendre ce projet », explique-t-il.
Après sa première visite en Israël en février, Kornwasser s’est lancé dans son projet. Il a investi dans du matériel professionnel et s’est associé au groupe de jeunes juifs NCSY, affilié à l’Orthodox Union, qui l’a aidé à produire ce film de 30 minutes.
« Mon objectif est de sensibiliser les gens à cette journée et de les inciter à réfléchir à ce qu’ils peuvent faire », a-t-il déclaré.
L’interview suivante a été éditée par souci de clarté.
The Times of Israel : Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce que vous avez ressenti dans les jours qui ont suivi votre visite en Israël l’année dernière ?
Hillel Kornwasser : J’étais un peu déprimé. Je me demandais pourquoi tout le monde ne ressentait pas la même chose que moi. Puis j’ai réalisé qu’ils ne savaient pas ce que j’avais vécu. Ils ne comprenaient pas que je venais de visiter le site du festival Supernova, où 364 personnes avaient été brutalement assassinées. Ils ne savaient pas que j’avais partagé un barbecue avec des soldats qui, une heure et demie plus tôt, combattaient à Gaza et avaient perdu cinq de leurs camarades. C’est ce que je voulais transmettre aux gens ici, en Amérique.
Vous avez dit que votre mission était de tenter de comprendre cette attaque. Pensez-vous avoir atteint cet objectif ?
Je ne pense pas qu’il soit possible de vraiment comprendre pourquoi les gens font [une telle chose]. Je dirais donc que j’ai réussi à mieux comprendre ce qui s’est passé ce jour-là et à mieux comprendre des gens comme les Airley, dont je suis devenue très proche, ou Shabbos Kestenbaum, qui est si influent et si inspirant.
Dans le film, vous demandez comment nous nous remettons du plus grand massacre du peuple juif depuis la Shoah. Avez-vous trouvé une réponse ?
Je dirais qu’il est difficile d’utiliser le mot « se remettre ». « Résilience » est probablement le mot que j’utiliserais. L’idée que l’on tombe et que l’on se relève. Vous avez encore des bleus, des entailles et des cicatrices, mais vous vous relevez quand même à chaque fois. Sinon, quel serait le sens de tout cela ? Les soldats au front ne veulent pas que nous tombions. Si c’était le cas, ils n’auraient aucune raison de se battre pour nous. Des gens comme les Airley ne veulent pas que nous tombions. C’est une question de résilience. Nous devons être fiers du Am Yisrael [la nation d’Israël].
Je n’utiliserais pas non plus le terme « se remettre », car certaines pertes sont irréparables. Des personnes ont été brutalement assassinées, et on ne se remet pas de cela. Le Hamas et le Hezbollah [groupe terroriste chiite libanais soutenu par l’Iran] existent toujours. L’antisémitisme est encore omniprésent. C’est pourquoi je parle de résilience : tomber, mais surtout se relever.
Rares sont les jeunes de 14 ans qui se plongent dans un sujet aussi tragique et brutal. Comment avez-vous géré l’aspect émotionnel de ce projet ?
Il y a eu des moments où je passais en revue les séquences pour le film, et je tombais sur des images très explicites auxquelles je ne m’attendais pas, ou sur des scènes profondément déchirantes. Parfois, je devais m’arrêter et sortir prendre l’air. Par exemple, en travaillant sur la section consacrée à Jen Airley, certains passages étaient si difficiles que j’ai dû interrompre mon travail et aller marcher. Mes parents m’ont énormément soutenu. Ma mère est psychologue et mon père est secouriste ; tous deux m’ont aidé à comprendre et à gérer mes émotions.
Dans le film, Jen Airley raconte qu’elle a ouvert la porte de sa chambre après une sieste pour apprendre que son fils avait été tué au combat, et explique que sa foi s’est renforcée depuis cette tragédie. Votre foi s’est-elle également renforcée en travaillant sur le film ?
Oui, à 100 %, ma foi s’est renforcée. Il y a eu des moments où je me suis demandé : « Pourquoi ? Pourquoi Dieu a-t-il permis cela ? Pourquoi cela s’est-il produit ? » Mais je pense qu’il y a de nombreuses façons d’appréhender le 7 octobre. J’ai choisi de ne pas m’attarder sur le « pourquoi » mais plutôt de me demander ce que je peux faire.
... alors c’est le moment d'agir. Le Times of Israel est attaché à l’existence d’un Israël juif et démocratique, et le journalisme indépendant est l’une des meilleures garanties de ces valeurs démocratiques. Si, pour vous aussi, ces valeurs ont de l’importance, alors aidez-nous en rejoignant la communauté du Times of Israël.
Nous sommes ravis que vous ayez lu X articles du Times of Israël le mois dernier.
C'est pour cette raison que nous avons créé le Times of Israel, il y a de cela onze ans (neuf ans pour la version française) : offrir à des lecteurs avertis comme vous une information unique sur Israël et le monde juif.
Nous avons aujourd’hui une faveur à vous demander. Contrairement à d'autres organes de presse, notre site Internet est accessible à tous. Mais le travail de journalisme que nous faisons a un prix, aussi nous demandons aux lecteurs attachés à notre travail de nous soutenir en rejoignant la communauté du ToI.
Avec le montant de votre choix, vous pouvez nous aider à fournir un journalisme de qualité tout en bénéficiant d’une lecture du Times of Israël sans publicités.
Merci à vous,
David Horovitz, rédacteur en chef et fondateur du Times of Israel