Un dimanche matin sans Josy Eisenberg
Le rabbin français, familier des téléspectateurs depuis 1962, salué par Macron, représentait un lien unique avec le judaïsme pour de nombreux juifs hors de la communauté
Le dimanche matin sur le service public, le temps n’a jamais été aux polémiques. Depuis des décennies, la si laïque République a toujours su garder à la télévision un espace pour les spiritualités chrétienne, protestante, juive et musulmane. Chacun dispose d’un temps d’antenne, du « Jour du Seigneur » à la « Source de Vie », présentée depuis 1962 (!) par le rabbin Josy Eisenberg, disparu le 8 décembre à l’âge de 83 ans.
Né en décembre 1933, de parents juifs originaires de Cracovie en Pologne, Josy Eisenberg se réfugie en Suisse en 1943, et y restera jusqu’à la fin de la guerre. Sorti rabbin du séminaire israélite de France, il avait en parallèle suivi des études de Lettres. C’est à son instigation que l’émission « A Bible ouverte » devenue « Source de vie » fut créée en 1962. Assistant du grand rabbin Jacob Kaplan, il pousse ce dernier à demander à l’ORTF devenu le CSA, la création d’une émission de télévision parlant de spiritualité juive. Deux émissions de ce type existaient déjà, à destination du public chrétien et protestant.
« Mort en Normandie, où il avait une maison, il sera enterré à Jérusalem, a précisé M. Korsia au Monde, qui a salué une personnalité importante dans la « reconstruction du judaïsme français après la guerre », un homme d’une « grande intelligence » et d’une « grande curiosité ».
Emmanuel Macron a dit apprendre « avec tristesse la mort d’une grande âme du judaïsme français » dans un communiqué publié le 8 décembre.
« Pendant un demi-siècle, il n’a cessé de puiser à la source de vie d’une spiritualité à mesure humaine, et de transmettre avec bienveillance et simplicité toutes les facettes de la pensée juive, ajoute le président de la République. Lui qui avait connu la guerre et les persécutions fut un homme d’ouverture, de réconciliation et de tolérance. Il présentait chaque dimanche le visage souriant d’un judaïsme tourné vers le dialogue des sagesses ».
Celui qui a su amener la parasha de la semaine dans la petite lucarne, qui a invité les intellectuels juifs français à venir présenter leurs idées, a aussi été le co-scénariste de Rabbi Jacob, et auteur d’une quinzaine de livres dont notamment : « Livres de vie », « La cabbale dans tous ses états », et « Dieu et les Juifs » aux Editions Albin Michel.
Il aura ainsi participé à aider les Juifs de France à apaiser les contradictions parfois douloureuses entre citoyenneté française et identité juive, et donner quelques « cartouches » intellectuelles pour comprendre cette judéité « dont le quotidien et l’histoire sont intimement imbriqués avec la métaphysique, » expliquait-il à Esti, réalisatrice de la série « Juif ».
Comme l’ont exprimé plusieurs commentateurs, Josy Eisenberg fut le rabbin de nombreux juifs, de province et d’ailleurs, pour qui il fut l’un des seuls liens avec le judaïsme.
L’organisation Qualita a consacré une émission hommage au rabbin. Josy Eisenberg sera enterré le 12 décembre à Jérusalem, jour de son anniversaire.