Un kibboutz tente de sauver un ancien bain rituel découvert à proximité
Le kibboutz Hannaton est à la tête d'une collecte de fonds qui permettra le déplacement d'un mikvé de l'ère romaine vers ses propres bains rituels pluralistes
La découverte d’un mikvé de l’ère romaine sur le site d’un échangeur autoroutier actuellement en construction dans la vallée de Jezréel a réuni un kibboutz tout entier, l’Autorité israélienne des antiquités, une compagnie publique d’infrastructures et le gouvernement local autour d’un projet ambitieux commun : Aider à faire passer à la prospérité ce bain rituel.
Les résidents du Kibboutz Hannaton voisin espèrent pouvoir collecter environ
75 000 dollars – suffisamment d’argent pour dégager le bain rituel de là où il se trouve et pour le transférer, pierre par pierre, sur son territoire. Le projet est de le placer sur une colline, près du mikvé de la communauté, le seul en Israël à être ouvert à tous ceux qui désirent l’utiliser indépendamment de leur religion, de leur sexe ou de leurs croyances.
Si le rêve nourri par la communauté de Hannaton doit se réaliser, le mikvé pourrait devenir le point central d’un parc archéologique créé au sein du kibboutz et il pourrait même retrouver son usage original, permettant aux visiteurs de se plonger dans un bain rituel vieux de 2 000 ans.
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« Nous aimerions, bien sûr, sauver l’artefact en lui-même mais nous voulons plus que tout utiliser la synergie entre notre bain rituel et celui qui a été découvert pour créer davantage qu’un site antique », explique Steve Gray, l’un des membres du kibboutz qui s’est porté volontaire lors des fouilles et qui était présent lors de la découverte du mikvé.
Netivei Yisrael, la compagnie chargée de construite les infrastructures routières nationales, est prête à aider – mais elle ne peut pas utiliser les fonds publics pour contribuer à l’extraction méticuleuse du mikvé pour l’emmener ailleurs que là où il se trouve actuellement. C’est la même chose pour l’Autorité israélienne des antiquités, ravie à l’idée de créer un parc d’antiquités à Hannaton et qui prêtera des artéfacts avec joie, mais qui ne dispose d’aucun budget pour contribuer à l’initiative.
Lorsque le mikvé a été découvert, il y a quelques semaines, « j’ai été très ému », explique Yitzhaki Tishler, le responsable du projet de l’autoroute au sein de l’entreprise Netivei Yisrael. « Je me suis battu pour que le Kibboutz puisse être autorisé à tenter d’atteindre son objectif ».
Il a toutefois les mains liées par le calendrier à respecter. Les membres du kibboutz ne disposent que de quelques semaines pour collecter l’argent avant que l’autorité nationale des transports ne continue son ouvrage, qui fait partie d’un système d’échangeurs routiers complexe qui comprendra, par ailleurs, une section ferroviaire.
« Je leur ai dit que je voulais les aider à sortir de là le mikvé« , continue Tishler, qui a offert les services de l’une de ses pelleteuses pour la durée des travaux nécessaires à ce dégagement qui, selon les estimations, dureraient environ quatre jours. « Et mes patrons ont été d’accord », poursuit-il.
Les membres du kibboutz ont lancé une campagne de collecte de fonds sur Jewcer et sont entrés en contact avec d’éventuels donateurs par le biais de leurs propres réseaux, tentant de se conformer à la date-limite décidée par l’autorité en charge des travaux. Les ouvriers devraient reprendre le travail au mois d’août.
Hannaton obtiendra des aides financières de la part des autorités locales. L’adjoint au maire Avi Samovith a précisé s’être d’ores et déjà tourné vers de nombreuses instances locales, demandant des contributions.
« C’est toute une histoire d’obtenir de l’argent », s’exclame Samovith. « C’est compliqué, rien n’est inscrit dans les budgets et nous sommes en pleine crise du coronavirus. Ce serait bien plus facile si Netivei Yisrael nous accordait deux mois. Mais c’est comme ça », déplore-t-il.
« Ce n’est pas Netivei Yisrael qui va frapper aux portes pour nous », dit Gray, ancien financier qui travaillait dans une entreprise spécialisée dans les investissements de capital-risque. « Le défi, c’est de faire en sorte que les choses se mettent en place suffisamment rapidement pour qu’ils aient le sentiment qu’on va y arriver. Mais ce n’est pas le meilleur moment pour procéder à une collecte de fonds », regrette-t-il.
Gray, guide touristique qui vit à Hannaton depuis que le Kibboutz a été rénové, en 2008, est bénévole pour les travaux de fouilles, qui font partie des activités qu’il a entreprises pendant la crise du coronavirus, explique-t-il.
L’Autorité israélienne des antiquités est souvent appelée en renfort lorsque Netivei Yisrael, l’entreprise nationale chargée des infrastructures routières, travaille sur des projets d’autoroutes ou de ponts où se dissimulent des artefacts archéologiques connus. La firme gouvernementale a dépensé des centaines de millions de shekels pour des fouilles archéologiques de sauvegarde dans le cadre de projets variés au cours de la dernière décennie, selon un porte-parole de Netivei Yisrael.
Quand la première fouille a commencé, les archéologues ont tout d’abord pensé qu’ils allaient découvrir une ferme de l’ère byzantine, et des bénévoles comme Gray étaient venus prêter main-forte dans ces excavations dites « de sauvegarde. »
Mais lorsque le KKL-JNF n’avait pas autorisé que soit enlevé un chêne massif qui se trouvait au même endroit, il avait fallu revoir les contournements et les fouilles s’étaient élargies. C’était à ce moment-là que le bain rituel avait été découvert, totalement par hasard.
Cette découverte a été faite lors des deux derniers jours de fouilles, explique Gray, qui ajoute que l’archéologue à la tête des excavations était tellement excité qu’il avait attrapé une pelle et un seau pour commencer à creuser lui-même – quelque chose qu’il n’avait pas fait depuis vingt ans.
« Nous savions qu’il y avait une ferme de l’ère byzantine ici », dit Sami Kamil, archéologue arabe israélien qui supervise la région nord pour l’Autorité israélienne des antiquités.
« Mais lorsque nous avons trouvé le mikvé, nous avons soudainement compris que cette grande ferme datait de l’époque romaine et que, s’il y avait un mikvé, c’est qu’il s’agissait d’une ferme juive, parce que les fermiers juifs se purifiaient de manière rituelle avant de fabriquer leur huile et leur vin. Et le mikvé a tout changé pour nous », s’exclame-t-il.
Une fois le mikvé découvert, l’Autorité israélienne des antiquités a organisé une réunion publique pour que les locaux puissent admirer le bain rituel. C’est à cette occasion que Haviva Ner-David, rabbin et autrice qui exploite le Shmaya Mikva de Hannaton, l’a découvert pour la première fois.
Elle, comme Gray, a eu le sentiment que cela aurait du sens de transférer le mikvé à Hannaton.
« Il y a une synchronicité entre tout ça », dit Ner-David, ordonnée rabbin et pasteure interconfessionnelle, et certifiée comme conseillère spirituelle, qui a consacré une thèse de doctorat aux bains rituels à l’université Bar-Ilan.
C’est Ner-David qui a œuvré à réparer et à restaurer le mikvé d’origine du kibboutz, qui était très abîmé, après s’être installée à Hannaton, depuis Jérusalem, en compagnie de sa famille, en 2018, et avec l’aide d’un petit groupe qui s’était donné pour objectif de restaurer le Kibboutz.
« Shmaya: Un mikvé pour l’esprit, pour le corps et pour l’âme » est dorénavant le seul mikvé au sein de l’Etat juif qui puisse être utilisé par pratiquement tout le monde. Il cherche à attirer les Juifs désireux d’explorer leur spiritualité à travers le bain rituel, qu’il s’agisse de futurs mariés ou de convertis, de couples issus de la communauté LGBTQ souhaitant convertir leurs enfants, de jeunes soldats sur le point d’entrer dans l’armée ou de qui que ce soit vivant un événement spécial de son existence.
Aujourd’hui, le kibboutz a l’opportunité de développer davantage son propre programme de mikvé en déplaçant l’antique bain rituel sur son site, et peut-être en élargissant le secteur et en en faisant un parc archéologique avec l’aide de l’Autorité des antiquités israélienne.
Le secteur réservé au parc archéologique se trouverait à proximité du mikvé du kibboutz, une zone d’ores et déjà catégorisée comme un espace vert pour ce kibboutz qui ne cesse de s’agrandir.
Anat Harrel, guide touristique, résidente de Hannaton et qui fait partie de l’équipe de sauvetage du mikvé, signale la ville antique de Zippori, de l’autre côté de la vallée, où aurait vécu Anne, la grand-mère de Jésus.
« Peut-être que Jésus s’est baigné dans ce mikvé – c’est sur le chemin qu’il devait emprunter pour rendre visite à sa grand-mère et c’est à une demi-journée de marche seulement de Nazareth », dit-elle.
Pour le moment, néanmoins, le mikvé est encore installé là où il a été découvert, sur une colline ensoleillée et brûlante située à quelques minutes de Hannaton en voiture, derrière le tunnel actuellement en construction.
Les marches larges et creuses, et le bassin profond du mikvé – qui fait 4,2 mètres de long et de 3,2 mètres de large et approximativement 1,8 mètres de profondeur – sont presque identiques aux bains rituels d’aujourd’hui. Sari, l’archéologue, suppose que ces larges marches avaient été créées de manière à permettre à de nombreuses personnes de se croiser dans les escaliers.
« C’est une importante découverte pour cette région », dit Sari, qui ajoute que les fouilles continueront plus haut, sur la colline, où ont été faites d’autres découvertes.
« Maintenant, il ne nous reste plus qu’à le déplacer chez nous », ajoute Gray. « Avec de la bonne volonté et un peu de chance, on réussira ».
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