Une enquête ouverte après que des ministres ont accusé Jacob Bardugo de chantage
Si des agents ont été en contact avec le ministre de la Justice, le ministre des Sports et le ministre des Communications, il n'est pas certain que ces derniers - ou l'un d'entre eux - acceptent de témoigner

La police a ouvert une enquête après que trois ministres du Likud, le parti au pouvoir, ont accusé Jacob Bardugo, une personnalité du monde des médias considérée comme un proche du Premier ministre Benjamin Netanyahu, d’avoir tenté de les faire chanter.
Des accusations qui ont été formulées la semaine dernière par le ministre de la Justice, Yariv Levin, par le ministre de la Culture, Miki Zohar, et par le ministre des Communications, Shlomo Karhi. Bardugo aurait menacé de conséquences fâcheuses les personnalités qui n’accepteraient pas de se plier à ses exigences – des conséquences dont la nature n’a pas été précisée.
Selon la chaîne publique Kan, la police a été en contact avec les trois ministres au cours du week-end.
Dans son reportage, la chaîne a indiqué qu’il fallait encore déterminer « si la peur de Bardugo et de Netanyahu fera son effet et s’ils chercheront à éviter de témoigner ».
Le quotidien Haaretz a signalé que Levin n’avait pas l’intention de se présenter devant les enquêteurs. De son côté, Zohar a fait savoir qu’il allait partir à l’étranger dans les prochains jours et qu’il apporterait ultérieurement les informations nécessaires à la police, tandis que Karhi a annoncé qu’il entrerait en contact avec les forces de l’ordre dans les prochains jours.
Dans une déclaration faite dimanche, Zohar a expliqué : « On m’a demandé de témoigner dans le dossier Bardugo mais je ne vois rien de criminel dans sa conduite et il n’y aura donc pas de plainte déposée en mon nom ».

Kan a indiqué que la décision d’ouvrir une enquête avait été prise après que des consultations ont été organisées avec la procureure-générale Gali Baharav-Miara, le procureur de l’État Amit Aisman et le chef du département des enquêtes de la police, le commissaire adjoint Boaz Blatt.
La semaine dernière, Levin avait été le premier à accuser publiquement Bardugo – un commentateur intervenant sur les plateaux de la Quatorzième chaîne, une chaîne de télévision de droite, et au micro de la station Radio Galey Israel.
« Cet homme me calomnie de manière obsessionnelle sur toutes les plateformes et tous les jours, tout cela en raison d’affaires personnelles. C’est irrespectueux, ce n’est absolument pas approprié. Cela ne vient aider qu’un seul individu – cet individu qui se fait appeler le président de la Cour suprême. Il veut m’affaiblir de l’intérieur », avait indiqué Levin dans une interview accordée à Radio Galey Israel.
Levin se refuse à reconnaître la nomination d’Isaac Amit au poste de président de la Cour suprême.
« Lorsque quelqu’un vient me voir en me présentant des exigences que personne ne peut décemment accepter et qu’il me dit : ‘Si vous ne répondez pas à ces exigences’… mais je ne ne veux pas utiliser les mots qu’il a prononcés », avait ajouté Levin, sans donner plus de détails.
Suite aux propos tenus mardi par Levin, le député Naor Shiri, élu sous l’étiquette du parti d’opposition Yesh Atid, avait écrit en urgence une lettre adressée à Baharav-Miara et au chef de la division des enquêtes et des renseignements de la police, exigeant qu’ils ouvrent une enquête criminelle sur Bardugo.
Bardugo a nié les accusations lancées par le ministre de la Justice dans un entretien accordé à Galey Israel, affirmant qu’il avait des « désaccords idéologiques » avec Levin et d’autres ministres de droite.
« Les propos de Levin ont été portés à un niveau très étonnant », a-t-il dit, accusant la gauche de chercher à semer la discorde au sein de la droite de l’échiquier politique. « Mais je ne vais pas me taire, même si cela doit mettre en colère quelques-uns ».
Dans un communiqué, la station de radio a fait part de son soutien à Bardugo, ajoutant qu’elle « rejetait avec dégoût les déclarations qui ont pu être faites par des politiciens de faible envergure ».

Récemment, Bardugo s’est laissé aller à de vives critiques de Levin – il n’a pas épargné non plus Karhi et Zohar – pour l’incapacité de la coalition à faire avancer son programme législatif et pour des graffitis qui avaient été peints à la bombe sur son habitation, entraînant une querelle ouverte qui dure depuis plusieurs mois. Levin, Karhi et Zohar sont tous des membres éminents du Likud, le parti au pouvoir de Netanyahu.
« Jacob Bardugo ne représente pas la droite, il se représente lui-même », a écrit Karhi dans un post paru mardi sur X. Il a dit que l’éditorialiste était « un personnage puissant qui essaie de diriger le pays en fonction de ses intérêts personnels ».
« Les menaces, les pressions et les mensonges, nous connaissons cela, cela nous est familier. Mais nous ne nous laisserons pas décourager. Nous n’avons pas été élus pour plaire aux commentateurs qui parlent dans un micro mais pour servir le peuple d’Israël », a ajouté Karhi dans sa publication, appelant Levin à « ne pas avoir peur ».
Dans un autre message, Zohar a apporté son soutien à Levin, « qui mène avec vigueur l’importante réforme du système judiciaire et qui fait face à des menaces en Israël et à l’étranger ».
« Comme d’autres ministres, j’ai moi aussi été confronté aux menaces proférées par Jacob Bardugo, qui a des intérêts particuliers et qui pratique l’intimidation à l’encontre des représentants élus de la droite d’une manière méprisable », a écrit Zohar.

Au mois de février, Bardugo avait accusé les trois ministres du Likud d’incitations à la violence – et une inscription peinte à la bombe, qui disait « vous êtes un porte-parole, vous êtes coupable », avait été écrite dans la foulée sur le mur de son habitation. L’accusation avait été lancée alors que Zohar s’était emporté, la veille, contre l’éditorialiste au cours d’un entretien accordé à Galey Israel. Il avait alors estimé que le commentateur portait atteinte à la droite, notant qu’il avait appelé les électeurs à quitter le Likud pour rejoindre le parti Otzma Yehudit du ministre de la Sécurité nationale d’extrême-droite Itamar Ben Gvir.
Jeudi, l’émission d’investigation « Uvda », qui est diffusée sur la chaîne d’information N12, a fait savoir qu’il y a trois ans, Bardugo avait demandé à Zohar, avant qu’il ne devienne ministre, d’aider un membre de sa famille qui postulait à un poste à responsabilité dans la fonction publique et qu’il y a six mois, il lui avait demandé de l’aider à garantir qu’une certaine société de production obtiendrait bien un contrat avec son ministère. Une demande à laquelle Zohar n’aurait pas donné suite.