Une enquête pour incitation ouverte contre un militant qui a qualifié Netanyahu de « Satan »
L’instruction d'Ami Dror, selon lequel le nom du Premier ministre devrait être effacé, survient après que Herzog a mis en garde contre les discours incendiaires qui pourraient engendrer des violences
Le bureau de la procureure générale a approuvé l’ouverture d’une enquête sur un militant de premier plan qui a menacé « d’effacer le nom du [Premier ministre Benjamin] Netanyahu » lors d’une récente manifestation anti-gouvernement qui s’est tenue à proximité du domicile du Premier ministre, ont rapporté les médias israéliens lundi, citant un responsable anonyme de l’application de la loi.
Ami Dror fera l’objet d’une enquête pour incitation présumée durant une grande manifestation devant la résidence du Premier ministre à Césarée le 20 juin. Ce rassemblement était le point culminant d’une « semaine de résistance » lancée par des groupes protestataires à la suite de l’adoption d’une loi exemptant la plupart des ultra-orthodoxes – ou haredim – étudiant en yeshiva de l’enrôlement dans l’armée.
Les informations relatives à l’enquête font suite à plusieurs cas de discours incendiaires lors de rassemblements anti-gouvernement, notamment un policier qui a crié « Je vais violer ta mère » à l’attention d’un manifestant lors du rassemblement de samedi. La belle-fille d’un otage détenu à Gaza depuis le 7 octobre a également été enregistrée en train de dire que si les captifs ne revenaient pas, les familles attendraient Netanyahu « avec une corde ».
Certains ministres ont demandé à la procureure générale Gali Baharav-Miara d’enquêter spécifiquement sur Dror.
Ce dernier a dénoncé les « ruses » de ses accusateurs et a déclaré que l’enquête ne le dissuaderait pas de protester « sans violence, sans politesse, jusqu’à ce qu’il y ait un nouveau gouvernement ».
Il a ajouté qu’il coopérerait « avec amour » à toute enquête. « J’ai beaucoup de respect pour la procureure générale et je serai très heureux d’expliquer mes propos », a écrit Dror sur les réseaux sociaux, dans une allusion manifeste aux relations tendues entre le gouvernement et le pouvoir judiciaire.
Le 20 juin, vers la fin d’un discours enthousiaste interrompu par des sirènes et des huées, Dror a qualifié Netanyahu de « Satan ». Il s’est également engagé à démolir la maison du Premier ministre et à effacer tout souvenir de lui.
« Sur les ruines de sa forteresse de Césarée, nous construirons une pelouse ; nous scellerons sa piscine avec du ciment », avait déclaré Dror.
« Le nom de Netanyahu deviendra une malédiction ; nous effacerons le nom de Netanyahu », avait-il ajouté, paraphrasant le commandement biblique d’effacer la mémoire de l’ennemi des Israélites, la nation d’Amalek.
Il avait également affirmé qu’un million de manifestants allaient s’en prendre au gouvernement du Premier ministre, composé de « conscrits », ainsi qu’à son épouse « dérangée », Sara, et à son fils Yaïr, « incitateur », que Dror avait décrit, en reprenant une autre expression biblique, comme le « fils d’une femme perverse et rebelle ».
Tout au long de son discours, Dror a fait allusion au fameux discours de Netanyahu « Ils ont peur » prononcé lors d’un meeting de campagne électorale en 1999, auquel Dror, ancien garde du corps du Premier ministre, a déclaré avoir assisté.
Lors de sa campagne pour sa réélection – qu’il avait perdue –, Netanyahu avait entonné en chœur « Ils ont peur », à l’intention de la gauche israélienne. Les détracteurs de Netanyahu citent souvent ce moment comme un tournant dans l’incitation en Israël ; le discours a été prononcé quatre ans à peine après l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin, que certains détracteurs associent parfois à l’incitation de Netanyahu.
Dans son discours, Dror avait également entraîné la foule dans un chœur de « Ils ont peur », visant la famille Netanyahu.
« Ils tremblent [de peur] », avait déclaré Dror, car « une nation de combattants, une nation de sionistes, une nation de patriotes gonflés à bloc » s’est ralliée contre le Premier ministre.
« Une nation de héros fiers de servir dans l’armée israélienne ! », avait ajouté Dror sous les applaudissements.
Le rassemblement marquait le point culminant d’une « semaine de perturbations » annoncée par des groupes de protestation face à une récente tentative législative de garantir aux ultra-orthodoxes étudiant en yeshiva l’exemption de l’obligation militaire. Ce texte a coïncidé avec la prolongation du service des réservistes pour soutenir la guerre dans la bande de Gaza. Les groupes anti-gouvernement ont considéré qu’il s’agissait d’une capitulation de Netanyahu face à ses partenaires de la coalition haredi.
Plusieurs ministres ont ensuite exprimé leur consternation face au discours de Dror sur les réseaux sociaux, et certains ont demandé à la procureure générale d’enquêter sur Dror pour incitation à la haine.
Les médias israéliens ont rapporté que le ministre de la Diaspora, Amichaï Chikli, avait écrit à Baharav-Miara pour lui demander d’enquêter sur Dror et un autre militant anti-gouvernement, Guy Tzur, pour « incitation à la violence et même au meurtre contre le Premier ministre Benjamin Netanyahu ».
Le général (Rés.) Tzur aurait déclaré que « Netanyahu est un traître, qu’il est devenu un ennemi du peuple et qu’il doit être évincé dès que possible ». On ne sait pas si Tzur fera également l’objet d’une enquête.
Dror, entrepreneur dans le secteur technologique devenu militant, a été l’une des figures de proue des rassemblements contre la réforme du système judiciaire du gouvernement annoncée l’année dernière, qui ont ensuite été axés sur la critique de la gestion de la guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza par le gouvernement. Il a été actif à la fois dans le mouvement de protestation du secteur high-tech et dans le groupe de protestation des réservistes « Frères d’armes ». Dror a également utilisé son passé de garde du corps du Premier ministre pour critiquer ce qu’il a appelé la garde rapprochée de Yaïr Netanyahu, un gaspillage selon lui.
Pendant la guerre, les manifestations anti-gouvernement de masse à Tel Aviv ont eu lieu en même temps que les rassemblements hebdomadaires organisés par les familles des otages détenus à Gaza depuis le 7 octobre, date à laquelle des milliers de terroristes du Hamas ont pris d’assaut le sud d’Israël, tuant près de 1 200 personnes et en en prenant 251 autres en otage.
Les orateurs des deux rassemblements reprochent souvent au gouvernement de ne pas avoir encore fait libérer les 120 otages restants.
Le président Isaac Herzog a dénoncé dimanche la rhétorique incendiaire.
« Ces dernières semaines, j’ai été horrifié, encore et encore, par des mots du type le plus horrible – saturés de haine, saturés de violence », a déclaré Herzog, lors de la célébration de la Semaine du livre hébraïque à la résidence présidentielle.
Le président a mis en garde contre les risques de violence si Israël ne parvenait pas à éradiquer les discours violents « contre les familles d’otages et les familles endeuillées, contre le chef et les commandants de l’armée israélienne et des agences de sécurité, contre les femmes et les membres des médias, contre le système judiciaire et les juges, contre les ministres et les membres de la Knesset et contre le Premier ministre en exercice ».