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Analyse

Vaccination : Israël, l’Autorité palestinienne, le Hamas et la COVID

Avec des doses non désirées d'AstraZeneca qui arrivent, et une majorité de Palestiniens non vaccinés, il y aurait une solution gagnant-gagnant. Sauf que ce n'est pas si simple

Lazar Berman

Lazar Berman est le correspondant diplomatique du Times of Israël

Un ouvrier palestinien qui travaille en Israël reçoit sa première dose du vaccin Moderna COVID-19 dans un centre de vaccination contre le coronavirus installé au poste de contrôle de Gilboa, entre Israël et la ville de Jénine en Cisjordanie, le 8 mars 2021. (AP Photo/Ariel Schalit)
Un ouvrier palestinien qui travaille en Israël reçoit sa première dose du vaccin Moderna COVID-19 dans un centre de vaccination contre le coronavirus installé au poste de contrôle de Gilboa, entre Israël et la ville de Jénine en Cisjordanie, le 8 mars 2021. (AP Photo/Ariel Schalit)

Israël, leader mondial en matière de taux de vaccination contre la COVID-19, connaît le genre de problème auquel la plupart des pays aimeraient être confrontés.

En novembre 2020, alors que le vaccin AstraZeneca COVID-19 était encore en phase d’essai, Israël a passé un contrat pour acheter dix millions d’unités de vaccin à la société britannico-suédoise. Jérusalem a depuis décidé qu’elle n’utiliserait pas ces vaccins, se reposant plutôt sur les versions plus coûteuses de Pfizer et Moderna. Mais les millions de doses sont en route, et Israël ne sait toujours pas ce qu’il va en faire.

Le responsable de la lutte contre le coronavirus, Nachman Ash, a déclaré qu’Israël étudiait la possibilité de réacheminer les vaccins vers d’autres pays, et a laissé entendre que les doses pourraient même être jetées si elles arrivaient. Il se pourrait bien que cette idée de jeter les vaccins ne soit qu’une manœuvre bureaucratique visant à envoyer un message aux autres ministères israéliens, mais il ne fait aucun doute que le sort de millions de doses reste incertain.

Le voisin le plus proche d’Israël, quant à lui, est confronté au problème inverse.

L’Autorité palestinienne (AP) peine à vacciner sa population. La semaine dernière, seuls 3,6 % des Palestiniens avaient reçu au moins une dose, et moins de 1 % étaient complètement vaccinés.

Un kit de vaccination AstraZeneca est placé sur une table dans un centre de vaccination à Bucarest, en Roumanie, le 7 avril 2021. (AP Photo/Vadim Ghirda)

Ces chiffres incluent les plus de 100 000 travailleurs palestiniens qu’Israël a vaccinés depuis mars, car ils sont en contact régulier avec des Israéliens sur leur lieu de travail. Mais Israël s’est abstenu de lancer une campagne de vaccination de l’ensemble de la population palestinienne, malgré les appels d’organisations non gouvernementales israéliennes, une pétition adressée à la Cour suprême de justice et les demandes pressantes d’experts sanitaires.

Bien qu’Israël ne soit pas juridiquement tenu de vacciner les Palestiniens, il existe de nombreuses raisons pour lesquelles cela servirait ses propres intérêts, sans parler des raisons humanitaires qui justifient le lancement d’une telle campagne.

A LIRE : Vacciner les Palestiniens * La campagne philanthropique de Michael Leven

Alors que les responsables israéliens évoquent même la possibilité d’être contraints de se débarrasser de millions de doses de COVID-19, la question doit être posée : Pourquoi ne pas les mettre à la disposition de l’AP ?

Népotisme et pénurie

L’AP a commencé à recevoir des vaccins dans le cadre du COVAX, un programme mondial de vaccination pour les pays pauvres et à revenu intermédiaire soutenu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Le programme vise à fournir suffisamment de doses gratuites pour vacciner jusqu’à 20 % de la population d’un pays participant ; environ 90 pays ont adhéré au programme.

Søren Brostrøm, chef du Conseil national de la santé du Danemark, explique lors d’une conférence de presse pourquoi le pays a cessé d’utiliser le vaccin contre le coronavirus d’AstraZeneca, le 14 avril 2021, à Copenhague. (Philip Davali/Ritzau Scanpix/AFP)

À ce jour, l’AP a reçu 271 000 doses destinées à être utilisées en Cisjordanie, dont 100 000 de la Chine et 58 000 de la Russie. La plupart des doses restantes étaient des doses AstraZeneca envoyées par le biais du COVAX.

Israël a également fait don de 5 000 doses Moderna et de 200 doses Pfizer pour le personnel médical palestinien.

La bande de Gaza dirigée par le Hamas a reçu 111 000 doses à ce jour, dont 50 000 provenant du COVAX, 60 000 doses Sputnik V russes des EAU et 1 000 doses Sputnik V de l’AP.

En outre, Israël a vacciné 107 000 travailleurs palestiniens employés par des Israéliens.

COVAX a l’intention de fournir à terme environ 400 000 doses d’AstraZeneca aux Palestiniens, selon l’UNICEF.

Des cartons de vaccin AstraZeneca COVID-19 fabriqués par le Serum Institute of India et fournis par l’initiative mondiale COVAX arrivent à l’aéroport de Mogadiscio, en Somalie, le 15 mars 2021. (AP Photo/Farah Abdi Warsameh)

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la distribution des vaccins d’AstraZeneca a été difficile. La société est au cœur d’une controverse concernant d’une part son incapacité à livrer les doses promises à l’Union européenne, et l’efficacité et le profil de sécurité du vaccin. La semaine dernière, l’exécutif de l’Union européenne a déclaré qu’il avait engagé une action en justice contre AstraZeneca pour non-respect des termes de son contrat avec le bloc des 27 nations.

Le vaccin d’AstraZeneca est moins cher et plus facile à utiliser que les vaccins concurrents de Pfizer et Moderna. Son utilisation a été approuvée dans plus de 50 pays, notamment par les 27 États membres de l’UE et l’Organisation mondiale de la santé. Mais les autorités américaines n’ont pas encore approuvé le vaccin.

Un essai britannique du vaccin d’AstraZeneca sur des enfants a été interrompu en avril, alors que les régulateurs mondiaux se sont empressés d’évaluer son lien possible avec la formation de caillots sanguins rares chez les adultes. L’autorité britannique de réglementation des médicaments considère le vaccin comme sûr et efficace, mais a conseillé aux personnes de moins de 30 ans d’utiliser un autre vaccin.

Selon un rapport de la radio de l’armée, des responsables israéliens ont été en contact avec la société pharmaceutique basée au Royaume-Uni pour annuler le contrat, mais AstraZeneca hésite à le faire, craignant la mauvaise publicité qui s’ensuivrait.

Beaucoup de possibilités

À première vue, il semble qu’Israël serait gagnant sur toute la ligne en transférant les doses non désirées d’AstraZeneca à l’Autorité palestinienne.

Un infirmier administre un vaccin Moderna COVID-19 à un autre infirmier lors d’une campagne de vaccination des travailleurs médicaux de première ligne, au ministère de la Santé, dans la ville de Bethléem en Cisjordanie, le 3 février 2021. (AP/Nasser Nasser)

Une épidémie en Cisjordanie représente un risque pour Israël, où plus de 35 % de la population, en particulier les enfants, n’a toujours pas été vaccinée.

En mars, l’Autorité palestinienne a déclaré l’état d’urgence dans les zones de Cisjordanie qu’elle contrôle, et il est toujours en vigueur. De nombreuses entreprises sont fermées et les déplacements des Palestiniens sont limités.

Les Palestiniens ont subi leur pire vague de COVID-19 en mars et avril, avec un pic de près de 3 000 nouveaux cas par jour. Fin avril, ce chiffre était tombé à 1 000 nouveaux cas par jour. La bande de Gaza dirigée par le Hamas, où les chiffres ne sont pas fiables, a enregistré des taux d’infection record le mois dernier.

Bien que la barrière de sécurité sépare la majeure partie de la Cisjordanie d’Israël et qu’il existe une barrière quasi hermétique entre Israël et Gaza, la région entière est considérée comme une unité épidémiologique. Par exemple, la section « Santé des voyageurs » des Centres américains de contrôle et de prévention des maladies mentionne « Israël, y compris la Cisjordanie et Gaza ». Parce qu’Israël et les territoires sont regroupés, le Département d’État américain a inclus le mois dernier Israël parmi les 116 pays figurant sur sa liste « Niveau quatre : Ne pas voyager », invoquant un risque « sans précédent » dû à un « niveau très élevé de COVID-19 ».

Des épidémiologistes israéliens ont déclaré au Times of Israel en janvier qu’il était dans l’intérêt général d’Israël de veiller à ce que les Palestiniens soient vaccinés aussi rapidement que possible, car les populations sont trop imbriquées pour que l’une puisse acquérir une immunité collective sans l’autre, malgré certaines affirmations contraires de dirigeants israéliens.

Le directeur général du ministère de la Santé, Moshe Bar Siman-Tov, s’exprime lors d’une conférence de presse sur le coronavirus COVID-19, au ministère de la Santé à Jérusalem, le 31 mai 2020. (Flash90)

« Le message est très simple : Nous sommes une unité épidémiologique. Autant que nous le pouvons, nous devons les aider à résoudre ce problème », avait alors déclaré l’ancien directeur général du ministère de la Santé, Moshe Bar Siman-Tov, au Times of Israel.

« Il en va de notre intérêt sanitaire et économique commun, car nous vivons dans une même zone épidémiologique, et nous devons tous participer à l’effort visant à stopper la propagation du COVID-19 dans la région », a déclaré Kamil Abu Rukun, directeur du COGAT, dans un communiqué annonçant l’opération de vaccination des travailleurs palestiniens. La même logique semble s’appliquer à la population palestinienne en général.

« Ils doivent faire partie du tableau. Nous les ignorons à nos risques et périls. Nous mettons réellement notre population en danger si nous agissons ainsi », a déclaré le Dr Manfred Green, un expert en vaccins qui a été le directeur fondateur du Centre israélien de contrôle des maladies du ministère de la Santé, [Israel Center for Disease Control].

« Il y a des Palestiniens qui viennent travailler en Israël et des mouvements d’Arabes israéliens qui se rendent dans les zones palestiniennes, ce qui est beaucoup plus courant qu’on ne le pense – pour faire des achats, pour célébrer des mariages et… pour voir la famille », a déclaré Amnon Lahad, président du Conseil national de la santé communautaire [National Council for Community Health].

Prof. Gabi Barbash, ancien directeur général du Centre médical Sourasky de Tel Aviv, le 7 avril 2020. (Douzième chaîne)

« La règle est très claire avec le coronavirus – si le virus est quelque part, il est partout. Nous avons vu avec quelle facilité le virus a franchi la Ligne verte pour se rendre à Kafr Qasim, Netanya, Haïfa », a convenu l’ancien directeur général du ministère israélien de la Santé, Gabi Barbash.

La situation du COVID-19 en Cisjordanie affecte également la reprise économique d’Israël. Tant que le virus reste hors de contrôle chez les Palestiniens, d’autres pays peuvent recommander de ne pas voyager en Israël, voire l’interdire. Une campagne de vaccination palestinienne efficace pourrait accélérer le retour des touristes dans les hôtels et les restaurants d’Israël.

Il pourrait y avoir d’autres avantages. Israël subit une pression diplomatique modérée mais persistante sur ses politiques à l’égard des Palestiniens. Les organisations internationales continuent de cibler Israël pour des politiques réelles ou imaginaires. Human Rights Watch a publié un rapport cinglant la semaine dernière, alléguant qu’Israël « commet les crimes contre l’humanité que sont l’apartheid et la persécution » et affirmant qu’Israël a une politique « globale » visant à « maintenir la domination des Israéliens juifs sur les Palestiniens ».

Le Conseil des droits de l’Homme à Genève débat d’une résolution condamnant les actions d’Israël sur le plateau du Golan, le 22 mars 2019. (Capture d’écran : UN WebTV)

En mars, le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a approuvé quatre résolutions condamnant Israël. La France, l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie ont tous soutenu la motion, qui exprimait « la vive préoccupation que suscitent les informations faisant état de graves violations des droits de l’homme et de graves infractions au droit humanitaire international, y compris d’éventuels crimes de guerre et crimes contre l’humanité, dans le territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est ».

Bien que l’administration américaine Biden ait rejeté les résolutions anti-israéliennes et le rapport de HRW, son approche d’Israël et des Palestiniens est considérée comme beaucoup moins conforme à la politique du gouvernement israélien que celle de l’administration Trump. M. Biden a rétabli le financement de l’Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient controversé, ou UNRWA, que son prédécesseur avait supprimé ; le gouvernement israélien déplore que l’agence perpétue littéralement le problème des réfugiés palestiniens en définissant comme réfugiés des millions de descendants de réfugiés palestiniens. Peu après l’investiture de Biden en janvier, les États-Unis ont déclaré qu’ils allaient rétablir le bureau de liaison de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) qui avait été fermé par Trump.

Le président américain Joe Biden au Capitole à Washington, le 13 avril 2021. (AP Photo/J. Scott Applewhite, Pool)

Mais M. Biden ne s’est pas prononcé sur une initiative de paix majeure, les partisans d’une solution à deux États s’attendant à ce que les chances d’une percée à court terme soient minces, en particulier dans le contexte de turbulences en Israël à la suite des dernières élections.

Bien qu’Israël ait bénéficié d’une série de percées diplomatiques sans précédent en signant des accords de normalisation avec des États arabes du Golfe et d’Afrique du Nord, certains de ses nouveaux partenaires semblent vouloir avancer plus lentement qu’Israël, d’autres partenaires potentiels hésitent et on ne sait toujours pas quand les liens atteindront leur plein potentiel.

Dans ce contexte, une initiative israélienne qui contribue de manière significative à la prise de contrôle de la pandémie par les Palestiniens – d’autant plus que la communauté internationale se montre lente à agir – ne peut qu’aider Israël sur le plan diplomatique. Personne ne se fait d’illusion sur le fait que les Nations unies et d’autres organisations internationales cesseront de cibler l’État juif, mais il pourrait être plus facile de persuader les partenaires européens et les États-Unis de s’opposer à de tels efforts si c’est Israël qui sauve des centaines ou des milliers de vies palestiniennes alors que les Nations unies ne parviennent pas à tenir leurs promesses. En outre, si l’administration Biden choisit de soutenir une nouvelle initiative de paix entre Israël et les Palestiniens, cela pourrait provoquer des tensions importantes avec Israël. En transférant à l’Autorité palestinienne de grandes quantités de vaccins dont elle peut se passer, Israël pourrait gagner un peu de bonne volonté à Washington avant que les deux parties ne se heurtent à de tels obstacles.

Et, bien sûr, il y a les raisons purement humanitaires d’aider les Palestiniens à combattre la pandémie. Oui, Israël fait valoir que ce n’est pas sa responsabilité légale. Et oui, le gouvernement de l’AP, largement considéré comme corrompu et inefficace, peut exacerber la crise du COVID en Cisjordanie, sans parler de la domination du Hamas sur la bande de Gaza.

Une soldate israélienne donne le biberon à un bébé syrien en Israël, dans le cadre de l’opération Bon voisin d’aide humanitaire aux Syriens touchés par la guerre civile. Photographie non datée, publiée le 19 juillet 2017. (Crédit : unité des porte-paroles de Tsahal)

Mais Israël a montré qu’il considère le fait de sauver des vies dans le monde entier comme l’une de ses missions en tant que nation, indépendamment de la politique. Il a envoyé 60 tonnes d’aide à l’Indonésie après le tsunami de décembre 2004, même si les deux pays n’ont pas de relations diplomatiques. L’année suivante, des organisations israéliennes étaient sur le terrain au Pakistan après un tremblement de terre au Cachemire. MASHAV, l’organisation israélienne de développement international, sauve d’innombrables vies en Afrique et ailleurs grâce à ses initiatives en matière d’agriculture et de santé publique. Les missions de Tsahal ont opéré en Turquie, au Népal, en Haïti et ailleurs, totalisant 27 missions humanitaires depuis 1953.

Même lorsque des civils de pays ennemis sont dans le besoin, Israël s’est montré prêt à consacrer son expertise et ses ressources pour sauver des vies. Des groupes tels que Save a Child’s Heart et Shevet Achim amènent des enfants de Syrie, d’Irak et de la bande de Gaza dans les hôpitaux israéliens, où les médecins israéliens font des heures supplémentaires pour les soigner. Après que la Syrie, ennemi acharné d’Israël, a sombré dans un chaos sanglant en 2011, des équipes médicales israéliennes ont soigné des Syriens blessés dans des hôpitaux de campagne près de la frontière et dans des hôpitaux du nord d’Israël.

Et Israël a déjà contribué de manière significative à l’effort palestinien de lutte contre la pandémie. Une grande partie de l’aide d’Israël aux Palestiniens est passée par Tsahal.

Un ouvrier palestinien se fait vacciner par le personnel du Magen David Adom israélien au point de contrôle de Shaar Efraim en Cisjordanie, le 4 mars 2021. (COGAT)

« Avec l’apparition de la COVID-19 en Israël, en Judée et Samarie et dans la bande de Gaza, l’Unité de coordination des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT), en coopération avec l’Autorité palestinienne, a lancé un large éventail d’activités pour arrêter, dans la mesure du possible, la propagation du virus », a déclaré un responsable du COGAT au Times of Israel. « Dans le cadre de ces activités, l’entrée de kits de test pour la détection de la COVID-19, ainsi que de respirateurs et d’équipements médicaux, tous offerts par la communauté internationale, a été coordonnée par le COGAT.

« En outre, une formation conjointe des équipes médicales israélo-palestiniennes a eu lieu, étant entendu que ces mesures sont nécessaires dans l’intérêt commun de la protection de la santé de tous les résidents de la région », a déclaré le fonctionnaire.

Le transfert des doses d’AstraZeneca à l’Autorité palestinienne serait conforme aux valeurs qui ont guidé la politique d’Israël depuis sa fondation et ne coûterait pratiquement rien au contribuable israélien.

Ce n’est pas si simple.

Le principe directeur d’Israël est que les Palestiniens sont responsables de la vaccination de leur propre population, conformément aux accords d’Oslo de 1993 conclus entre les deux parties, bien que certains responsables aient déclaré qu’Israël envisagerait de fournir des doses une fois que tous les Israéliens seraient vaccinés.

Il existe d’autres obstacles importants que l’obstacle juridique.

De nombreux Israéliens ne considèrent pas du tout l’envoi de doses de COVID-19 à l’AP ou à Gaza comme un acte éthique. « Je pense que nous devons admettre que ce ne sont pas des voisins sympathiques », a déclaré Efraim Inbar, président du Jerusalem Institute for Strategy and Security. « Nous n’avons pas la responsabilité morale de nous occuper de voisins qui versent de l’argent à des terroristes, qui se tournent vers des organisations internationales comme la CPI pour nous combattre. Nous sommes en guerre avec eux. Je ne me souviens pas que les Américains aient envoyé des vaccins aux Allemands pendant la Seconde Guerre mondiale. Je pense que la demande faite à Israël d’aider ses ennemis est immorale. »

« Je préfère les envoyer en Inde, pas à l’AP », a-t-il poursuivi. « L’Inde ne paie pas les terroristes ».

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, accueille Rajaei Haddad, qui a passé 20 ans dans les prisons israéliennes pour son implication dans une attaque terroriste de 1997 qui a tué Gabriel Hirschberg. (Crédit : WAFA / Thaer Ghanaim)

Même si Israël décidait de transférer des millions de doses, il n’est pas certain que l’Autorité palestinienne dispose de l’infrastructure nécessaire pour stocker et transporter les vaccins en toute sécurité, même si les vaccins AstraZeneca ne nécessitent pas les conditions d’ultra-froid des doses Pfizer.

Cela pourrait également expliquer en partie pourquoi la grande majorité des doses promises aux Palestiniens par la communauté internationale ne sont toujours pas arrivées dans les zones de l’AP. « Si c’était si simple, alors ils auraient reçu plusieurs milliers de vaccins de sources multiples, et ils auraient vacciné », a déclaré Kobi Michael, chargé de recherche principal à l’INSS et ancien chef du bureau palestinien au ministère des Affaires stratégiques. Le fait que cela ne se soit pas produit signifie qu’il y a une certaine difficulté, au niveau des infrastructures, au niveau technique, et aussi au niveau politique. »

Compte tenu des difficultés logistiques, l’Autorité palestinienne aurait besoin d’une coopération importante avec les responsables israéliens, ce qui mettrait probablement les dirigeants palestiniens mal à l’aise. L’année dernière, l’Autorité palestinienne a rejeté à deux reprises des cargaisons de fournitures médicales en provenance des Émirats arabes unis parce qu’elles avaient été acheminées via l’aéroport Ben Gurion d’Israël.

« En Cisjordanie, les Palestiniens préfèrent une coopération relativement limitée », argue Michael. « Il y a des implications pour les dirigeants politiques en termes d’opinion publique : ‘Regardez, Israël fait ce que l’AP est incapable de faire. Une fois de plus, l’AP prouve qu’elle ne sait pas comment fonctionner, qu’elle a besoin qu’Israël s’occupe aussi de la question de la santé. Alors pourquoi avons-nous besoin de l’AP ? Démantelons-la' ».

Des Palestiniens travaillant en Israël reçoivent une injection de vaccin Covid-19, au sud de Tulkarem en Cisjordanie, le 8 mars 2021. Israël administre des vaccins à environ 100 000 Palestiniens de Cisjordanie ayant un permis de travail en Israël. (Nasser Ishtayeh/Flash90)

L’AP, qui a déployé de gros efforts pour délégitimer Israël sur le plan international, voit également des avantages à sa position contre Israël lorsque son voisin est critiqué pour ne pas avoir fait plus pour l’aider, a déclaré Michael.

« Même si Israël veut en faire plus, les Palestiniens le limiteront », postule Michael. « À leurs yeux, cela légitime l’occupation ».

Les responsables de l’AP n’ont pas répondu aux demandes répétées de commentaires.

Il y a aussi la question de savoir sur combien de questions complexes les décideurs israéliens peuvent se concentrer en même temps. Israël est confronté à une saison électorale prolongée depuis 2019, qui ne semble pas sur le point d’être résolue de sitôt. Il a ses propres défis COVID-19, tout en menant une guerre de l’ombre avec l’Iran alors que son allié le plus proche, les États-Unis, s’efforce de réintégrer un accord avec Téhéran. En plus de ces questions, Israël a connu la semaine dernière sa pire tragédie en temps de paix lorsque des dizaines de fidèles sont morts écrasés lors du pèlerinage au mont Meron. « L’approche [d’Israël] de la question [sensible des élections, désormais annulées] de l’Autorité palestinienne était-elle sérieuse ? » a également demandé Michael, de manière rhétorique. « Nous n’avons pas fait ce que nous devions faire là non plus ».

Un homme allume des bougies disposées en forme du nombre 45 le 2 mai 2021, en hommage aux 45 personnes tuées lors d’une bousculade mortelle au mont Meron trois jours auparavant. (Judah Ari Gross/Times of Israel)

Même sans transférer officiellement et publiquement les doses, Israël pourrait certainement faire davantage pour aider les Palestiniens à lutter contre la pandémie, et plus particulièrement pour les vacciner. Par exemple, il pourrait ouvrir des centres de vaccination à la frontière entre les zones contrôlées par Israël et l’AP. Le personnel de ces centres pourrait être composé d’agents de santé israéliens et palestiniens, afin de protéger l’image de l’AP aux yeux du public palestinien. Le partage des programmes informatiques et de l’intelligence artificielle israéliens serait également un moyen discret d’aider les Palestiniens de manière significative sans faire trop de bruit.

« Ce type de coopération peut également créer une dynamique », a déclaré Michael, « un sentiment que la coopération sur toutes sortes de questions régionales plus larges, autour de la santé, de l’environnement, de l’eau et de l’énergie, est importante. »

Pour l’instant, du moins, il semblerait que les décideurs aient d’autres priorités.

Aaron Boxerman et Nathan Jeffay ont contribué à cet article.

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