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Coupe du Monde : Pourquoi soutenir l’Iran, un peu, et le Danemark, – toujours

Cet article est sans lien avec la Shoah et le football. Il est en grande partie léger, mais il a un peu de mordant. Si vous avez tendance à vous irriter facilement, ne le lisez pas

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

Illustration du drapeau du Danemark (Crédit : Jacob Bøtter/CC BY 2.0/Wikimedia commons)
Illustration du drapeau du Danemark (Crédit : Jacob Bøtter/CC BY 2.0/Wikimedia commons)

L’un des grands clichés du football a été inventé par l’ancien attaquant anglais devenu plus tard présentateur Gary Lineker : « 22 hommes courent après un ballon pendant 90 minutes et à la fin, les Allemands gagnent toujours. »

Avec la Coupe du Monde 2018 en Russie, l’Allemagne, quadruple vainqueur est de nouveau parmi les favoris, avec l’Argentine de Lionel Messi (deux victoires) et la France (une), derrière le Brésil, grand favori (et cinq victoires record).

Mais alors que les experts tentent de prédire de manière savante qui gagnera, je vous livre ici quelques pensées emphatiques et inexpertes sur ceux que j’aimerais voir gagner, ou du moins bien s’en sortir – pour des raisons de football et (principalement) d’autres raisons. Si vous vous offensez de la combinaison surréaliste dans un seul article de sujets sans rapport avec la Shoah et les votes de l’ONU d’une part, et des aptitudes sportives sur un terrain de football d’autre part, veuillez interrompre votre lecture ici.

En tant qu’ex-Londonien, une partie de moi nourrit encore de faibles espoirs, assombris par des années d’attentes profondément frustrantes, que les joueurs anglais vont vaincre la panique qui les envahit lorsqu’ils se retrouvent avec le ballon à leurs pieds et remportent le trophée pour la deuxième fois (après 1966 et tout ça). Je sais que ça n’arrivera pas, mais un fan a le droit de rêver. Quoi qu’il en soit, étant donné que l’Angleterre, qui a inventé le football, a été éliminée des derniers championnats d’Europe par l’Islande – un pays de 330 000 habitants – tout ce qui sera pas un résultat catastrophique constituera une amélioration.

L’autre équipe que j’aimerais le plus soutenir, bien sûr, c’est Israël. Mais en l’absence de joueurs de grande qualité et d’un entraîneur efficace, la sélection a raté la qualification – et de loin -, au cours d’une campagne lamentable qui incluait une défaite 3:0 à domicile face à l’Albanie.

Également absents, beaucoup plus surprenants, sont l’Italie, quatre fois vainqueur (que j’encouragerais plus pour la beauté de leur pays plutôt que pour le cynisme défensif de leurs joueurs), et les éternels et décevants Hollandais, parmi les plus créatifs des représentants du football, terre de Johan Cruyff et l’incomparable (pour ce fan d’Arsenal) Dennis Bergkamp (mais que je n’ai pu soutenir en raison de leur échec assez ahurissant à protéger leurs Juifs, il y a trois quarts de siècle).

Parmi ceux qui sont en lice, je ne peux pas soutenir l’Argentine, après qu’elle a annulé un match amical à Jérusalem il y a quelques jours (même si notre ambassade à Buenos Aires n’a manifestement pas de rancune), sans parler de la « Main de Dieu » de Diego Maradona, le but le plus célèbre de l’histoire de la Coupe du Monde.

Je ne peux pas soutenir l’Allemagne, lieu de naissance de mon père. Je crois que l’Allemagne en tant que nation a essayé de faire repentance pour la Shoah, mais…. Et lehavdil (hébreu pour « vraiment sans rapport »), il y a l’inoubliable affaire du gardien de but Toni Schumacher, le vilain et méchant geste contre le pauvre Français Patrick Battiston en demi-finale de la Coupe du Monde. Oui, je sais que c’était en 1982, mais regardez la vidéo et voyez si vous ne grimacez pas encore.

Plus subtil et exécuté en club plutôt qu’au niveau national, la prise de judo de Sergio Ramos sur le joueur vedette égyptien Mohamed Salah, lors de la finale de la Ligue des champions d’Europe du mois dernier, est suffisamment récente et cynique pour que je puisse dire non merci à la sélection espagnole de Ramos.

Salah s’est en quelque sorte rétabli et s’est rendu en Russie, inspirant son pays au passage, ce qui est une raison suffisante pour souhaiter le succès de l’Egypte. Salah joue un beau jeu avec le sourire aux lèvres, montrant qu’il aime ça. Ce qui est extrêmement attachant. En plus, l’Egypte est un voisin, et j’aimerais que nos voisins soient heureux. Et certains de nos autres voisins, y compris les Palestiniens, encourageront les Égyptiens – donc plus ils restent longtemps dans le tournoi, plus les gens d’ici regarderont la télévision, ce qui est beaucoup mieux que les autres choses que certains de leurs dirigeants pourraient vouloir qu’ils fassent.

Pendant que je suis dans notre région, les Saoudiens ont peut-être connu des débuts difficiles, mais ils ont laissé Air India survoler leur territoire depuis et vers Tel Aviv, ils réchauffent tranquillement les liens, et ils font de petits pas vers l’égalité des femmes, alors je suis ravi de donner un bon point israélien. Peut-être que la camaraderie dans le football peut s’étendre à la camaraderie dans la vie réelle.

Ces derniers jours, les journalistes de la télévision israélienne en Russie se sont entretenus avec des fans des pays arabes et musulmans, et les supporters saoudiens jeudi – toujours dans le meilleur des états d’esprit, avant leur défaite 5:0 face à la Russie – et ils étaient heureux de parler non seulement de football, mais de paix, avec un correspondant de Hadashot TV. Inch Allah.

Des fans saoudiens à la Coupe du monde 2018 en Russie parlent à un correspondant de la chaîne Hadashot le 14 juin 2018 (Capture d’écran Hadashot).

Les supporters de l’Iran, appréhendés par le même journaliste un jour plus tôt, étaient, à juste titre, plus prudents, mais ont accepté d’être interviewés – à condition qu’il ne s’agisse que de football. Donc, oui, j’espère que les Iraniens s’en sortent bien, mais pas trop bien. Assez bien, c’est-à-dire, pour forcer la télévision iranienne contrôlée par le régime à montrer aux gens chez eux ce qui se passe dans le monde libre (ou du moins la version de Poutine) ; assez bien, par exemple, pour augmenter la pression sur le régime pour laisser les femmes iraniennes entrer dans ses stades ; mais pas assez pour que les ayatollahs en tirent un crédit sur le plan intérieur.

Plus les Égyptiens resteront dans le tournoi, plus les gens d’ici regarderont la télévision, ce qui est beaucoup mieux que les autres choses que certains de leurs dirigeants pourraient vouloir qu’ils fassent

J’étends également ma bonne volonté sportive régionale au Maroc (envoi de forces pour lutter contre Israël lors de la guerre de Kippour, mais quelques périodes plus chaudes depuis), et même à la Tunisie, dans l’espoir qu’elle puisse à la fois rétablir les liens (après 18 ans de rupture) et reprendre le chemin de la démocratie.

Je suis sûr que certains des Israéliens d’origine russe (environ 1 sur 8) chanteront pour les hôtes, mais moi je ne peux pas, désolé, étant donné les alliances de Moscou avec les régimes d’Assad et de Khamenei. (J’imagine que Poutine aura le cœur brisé de ne pas avoir mon soutien.) Je ne peux pas non plus soutenir le Sénégal (partisan de la Résolution 2334 de l’ONU en 2016 (qui, je le sais, devrait aussi exclure l’Angleterre, la France, l’Egypte, l’Espagne et l’Uruguay, mais ils n’ont fait que voter pour elle ; le Sénégal a co-parrainé la résolution 2334).

Je ne soutiens certainement pas la Pologne (la Shoah et, maintenant, la loi « ne nous blâmez pas pour la Shoah »).

Célèbre photo de Theodor Herz sur le balcon de l’hôtel Les Trois Rois, à Bâle, en Suisse. (Crédit : CC-PD-Mark, by Wikigamad, Wikimedia Commons)

Et je ne me prononce pas, comme il se doit, lorsqu’il s’agit de la Suisse – qui a accueilli le premier congrès sioniste (1897) ; et imposé un embargo sur les armes à Israël (2002).

J’espère que le Brésil se débrouillera bien, parce que le football, c’est la vie là-bas, et parce qu’ils ont joué un rôle déterminant dans la création d’Israël, en tant que président de l’Assemblée générale des Nations unies qui a approuvé le plan de partage de 1947 qui a relancé notre État. Mais ils ont voté pour le sionisme=racisme à l’ONU en 1975. Le Mexique est aussi un bon ami d’Israël – mais il a aussi soutenu le sionisme=racisme, comme l’ont fait le Nigeria et le Portugal.

Un grand merci à l’Australie, qui a voté contre la résolution de mercredi de l’Assemblée générale des Nations unies condamnant Israël et ignorant le Hamas pour les morts à la frontière de Gaza ces dernières semaines. Et pour le Costa Rica (qui a voté contre le sionisme=racisme, et a conservé son ambassade à Jérusalem jusqu’en 2006). Un peu moins d’enthousiasme pour le Panama, qui a voté contre le sionisme=racisme et s’est au moins abstenu lorsque l’ONU a condamné la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël en décembre dernier.

Les experts nourrissent de grands espoirs pour le Pérou, et je suis heureux de soutenir un pays qui avait une ex-première dame israélienne (Eliane Karp) il y a dix ans. Je ferai attention à la Corée du Sud, parce qu’elle a des relations diplomatiques avec Israël depuis 1962 et, avec tous ces sommets de voisinage imprévisibles, elle pourrait probablement avoir besoin de tout le réconfort qu’elle peut obtenir en ce moment.

Et depuis qu’ils se sont opposés au sionisme=racisme, et sont stupéfiants à la Coupe du Monde malgré leur position insignifiante, et se vantent d’être les commentateurs les plus hystériques de tous les temps, il faut simplement garder une place dans son cœur de foot pour l’Islande.

Je n’ai pas traité de la totalité des 32 pays participants dans mon article, même si je ne suis pas l’un de ces opposants obstinés d’une grande et vaste Coupe du Monde. Plus on est de fous, plus on rit.

Quel est celui que je voudrais voir gagner ?

Au final, c’est la Belgique et le Danemark, les deux qualifiés qui sont dignes d’éloges pour leur comportement lors de la Seconde Guerre mondiale. La Belgique a sauvé la moitié de ses Juifs. Le Danemark n’a pas seulement protégé ses Juifs pendant l’occupation nazie, mais, pour citer Simon Kuper, un passionné de football à ses heures, un historien de la Shoah sur Hannah Arendt, « ils ont aussi dit aux Allemands que tuer des Juifs était une erreur ».

Christian Eriksen en action lors du CSKA Moscou – Tottenham en 2016. (Wikipedia CC BY-SA 3.0)

La Belgique, avec une équipe de joueurs impressionnants, est en fait l’un des favoris pour remporter le trophée et a pour entraîneur adjoint le français buteur record d’Arsenal, Thierry Henry. Le Danemark est beaucoup moins apprécié, mais ce sont eux qui reçoivent mon soutien (et oui, je sais que leur joueur vedette, Christian Eriksen, joue pour les Spurs).

Je défie quiconque de prendre en compte la résolution anti-Nazi du Danemark, telle que décrite par Arendt dans son Eichmann à Jérusalem, et de ne pas soutenir les Danois – dans n’importe quelle compétition, n’importe quand, n’importe où. « Pour diverses raisons », dirait Adolf Eichmann, « l’action contre les Juifs au Danemark a été un échec ».

Lisez pour savoir pourquoi, et encouragez les Danois.

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