Des journalistes agressés à Tel Aviv, la droite s’emportant contre la couverture de Gaza
L'Union des journalistes a condamné la dernière attaque en date d'une série d'agressions contre le personnel de la Treizième chaîne
Deux journalistes de la Treizième chaîne ont été attaqués au gaz poivre à Tel Aviv mercredi, dans le cadre d’une réaction de la droite contre la chaîne après qu’elle a semblé accuser le Premier ministre Benjamin Netanyahu d’avoir ordonné des frappes aériennes sur des femmes et des enfants à Gaza.
La police a ensuite arrêté un homme de 41 ans soupçonné d’avoir participé à l’agression d’un journaliste et d’un caméraman de la Treizième chaîne. Il s’agit de la dernière d’une série d’agressions commises ces derniers mois contre le personnel de la chaîne de télévision en raison de son orientation perçue comme anti-Netanyahu.
Les images publiées en ligne de l’agression de mercredi près de la plage Frishman de Tel Aviv montrent la journaliste Talya Cohen se préparant à une émission lorsqu’un homme promenant son chien passe à côté d’elle et lui dit : « Qu’est-ce que c’est que ça ? Pire qu’Al Jazeera », en référence à la chaîne qatarie. Ce commentaire fait écho à un tweet publié mardi soir par le ministre Amichaï Chikli, qui disait : « 13 Jazeera ».
Peu de temps après, l’homme est revenu sur ses pas et a arraché la housse du microphone de la journaliste. Le caméraman de la Treizième chaîne, Ivan Alekseevich, s’est alors approché de l’homme et lui a repris la housse de force.
L’homme, cette fois sans son chien, est ensuite vu en train d’asperger les journalistes de gaz poivre avant de s’éloigner.
Les forces de police se sont rendues sur les lieux et ont arrêté un suspect après une brève fouille, ont rapporté les médias israéliens.
העיתונאית טליה כהן והצלם איוון אלכסייביץ׳ מחדשות 13 הותקפו בגז מדמיע בתל אביב. למה? ככה. טינופות pic.twitter.com/KDHbommyqU
— Raz Shechnik (@RazShechnik) May 10, 2023
L’Union des journalistes en Israël a condamné l’attaque dans un communiqué, déclarant qu’elle était « le résultat direct de l’incitation effrontée qui circule depuis ce matin sur les réseaux sociaux et sur les groupes WhatsApp contre la Treizième chaîne et ses journalistes ».
« Pour ce qui est des incitateurs, les journalistes peuvent être tués », a ajouté l’Union. « Nous attendions de la police qu’elle conclue rapidement cette simple enquête et qu’elle dépose un acte d’accusation sévère et dissuasif qui enverra un message clair à tous ceux qui souhaitent nuire aux journalistes. »
Mardi soir, la chaîne a été critiquée par des experts et des hommes politiques de droite pour un texte affiché à l’écran lors de son émission principale du soir concernant les frappes aériennes israéliennes dans la Bande de Gaza qui ont tué trois membres importants du groupe terroriste du Jihad islamique palestinien et dix civils.
« Avec l’approbation du Premier ministre, des femmes et des enfants ont été tués dans l’attaque de cette nuit », lisait-on à l’écran, un texte pour lequel la Treizième chaîne s’est excusée par la suite, affirmant qu’il s’agissait d’une erreur de formulation.
Le ministre des Communications, Shlomo Karhi (Likud), qui a cherché à renforcer la Quatorzième chaîne, résolument pro-Netanyahu, au détriment de ses rivales, a déclaré que le texte ressemblait à la position du mouvement anti-Israël Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS).
Mais Karhi a également condamné l’agression mercredi. « Malgré les critiques, aussi fortes soient-elles, les journalistes ne peuvent pas être attaqués en Israël », a-t-il déclaré. « La violence ne peut pas être utilisée et les émissions ne peuvent pas être perturbées, même si vous ne les aimez pas. C’est tout simplement impossible. Le seul moyen d’influer sur les reportages tendancieux et biaisés dans les médias est d’utiliser la télécommande, la variété et la concurrence, et non la violence. Pas par la violence. »
Fin avril, lors d’un grand rassemblement de la droite exhortant le gouvernement à reprendre le processus législatif de sa réforme largement controversée du système judiciaire, une bouteille en verre a été lancée sur les journalistes de la Treizième chaîne qui couvraient la manifestation, les manquant de peu.
Fin mars, avant un autre rassemblement de droite, une équipe de la Treizième chaîne a été attaquée par des membres du groupe d’extrême-droite La Familia, provoquant l’hospitalisation du journaliste Yossi Eli pour une côte cassée et des dommages à la rate, et blessant à la tête le caméraman Avi Cashman.
En janvier, une foule en colère a attaqué une équipe de la Treizième chaîne à Jérusalem, qualifiant les journalistes de « gauchistes » et leur demandant de quitter les lieux alors qu’ils couvraient un attentat terroriste perpétré la veille dans le quartier de Neve Yaakov, dans lequel sept personnes avaient été tuées.