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Face à la normalisation d’Assad, la société civile syrienne veut être entendue

Plus de 150 organisations de la société civile syrienne, réunies à Paris, ont promis de poursuivre le combat pour un "pays libre et démocratique"

Un secouriste transportant un enfant à la suite d'une attaque présumée à l'arme chimique dans la ville rebelle de Douma, près de Damas, en Syrie, le 8 avril 2018. (Crédit : Casques blancs de la défense civile syrienne via AP)
Un secouriste transportant un enfant à la suite d'une attaque présumée à l'arme chimique dans la ville rebelle de Douma, près de Damas, en Syrie, le 8 avril 2018. (Crédit : Casques blancs de la défense civile syrienne via AP)

Plus de 150 organisations de la société civile syrienne, réunies mardi à Paris, ont promis de poursuivre le combat pour un « pays libre et démocratique » face au régime de Bashar el-Assad, récemment réhabilité sur la scène arabe après 12 ans de guerre.

Venus pour la plupart de la diaspora en exil en Turquie, en Grande-Bretagne ou aux États-Unis, mais en lien avec des représentants à l’intérieur du pays, les participants ont officiellement lancé Madaniya, une plateforme d’ONG pour se faire entendre.

Ils veulent porter la voix de la société civile syrienne dans les décisions touchant à l’avenir d’un pays aujourd’hui dévasté.

« Notre vision est de créer un mouvement civil syrien uni par des valeurs communes d’égalité, de respect des droits humains, de démocratie, et une Syrie libérée de toutes formes d’influence », a lancé à la tribune son initiateur, un riche homme d’affaires britannique d’origine syrienne, Ayman Asfari, déjà à la tête d’une fondation caritative.

« Notre voulons avoir une voix forte dans le processus politique et notre objectif est de reconstruire un nouveau contrat social » a-t-il expliqué à l’AFP, assurant que l’objectif n’était pas de se substituer à l’opposition syrienne.

Refus de la normalisation 

« Nous ne voulons pas remplacer l’opposition, ni détruire le peu qu’il en reste, mais travailler avec elle », a-t-il souligné.

Le processus politique est néanmoins au point mort depuis des années, les négociations sous égide de l’ONU ayant échoué à Genève.

Minée par ses divisions, l’opposition est réduite à peau de chagrin.

La guerre en Syrie, commencée en 2011 avec un soulèvement populaire férocement réprimé dans le sang par le régime el-Assad, a ensuite mué en conflit multiforme, la Russie et l’Iran se portant au secours d’el-Assad, les Occidentaux intervenant pour lutter contre les jihadistes de l’État islamique, tandis que la Turquie s’impliquait également dans la crise.

La guerre a fait au moins 500 000 morts selon l’ONU, 7 millions de réfugiés, des centaines de milliers de disparus ou détenus, et créé un pays morcelé.

Le régime du dictateur syrien a pourtant été récemment réhabilité sur la scène régionale, en réintégrant en mai la Ligue arabe dont il avait été exclu par ses pairs au début de la guerre.

Le président syrien Bashar el-Assad présidant ses délégations lors du sommet de la Ligue arabe de Jeddah, en Arabie saoudite, le 19 mai 2023. (Crédit : Saudi Press Agency via AP)

« La communauté internationale doit comprendre que nous n’allons pas accepter cette réhabilitation, et que nous croyons toujours aux valeurs de la révolution syrienne », a déclaré Asfari. « Nous ne pouvons pas effacer d’un trait de plume les morts, les réfugiés, les détenus », a-t-il ajouté.

Justice

« Je ne vais pas normaliser avec el-Assad, je ne vais pas me taire, je continuerai jusqu’à ce que je sache la vérité », a lancé, comme en écho, Kholoud Helmi, représentante d’une association de familles de disparus, sans nouvelles depuis des années de son jeune frère arrêté par le régime.

« Ne pas savoir s’il est vivant ou mort, c’est insupportable », a-t-elle raconté, en larmes, lors d’une table ronde consacrée à la lutte contre l’impunité.

Le représentant des Casques blancs, ces sauveteurs civils qui documentent le conflit depuis plus de 10 ans, a pour sa part lancé un vibrant plaidoyer contre l’impunité.

« Nous ne sommes pas seulement des sauveteurs, nous sommes aussi des victimes – 300 membres de mon équipe ont été tués depuis le début de la guerre – et des témoins. Les cameras installées sur nos casques sont devenues les yeux qui documentent comment les Syriens sont tués chaque jour », a déclaré Farouq Habib.

Tous les intervenants ont insisté sur leur volonté de faire entendre leurs voix dans toutes les décisions concernant leur pays, qu’il s’agisse du retour des réfugiés que la Turquie veut organiser, ou de l’accès de l’aide humanitaire dans les zones rebelles.

Michel Chamas, responsable d’une association travaillant à constituer des dossiers pour la justice, a lui lancé deux messages à la communauté internationale. « Vous nous avez donné beaucoup d’argent, mais vous avez détourné les yeux, vous n’avez pas eu la volonté politique, et vous nous avez laissés devenir la proie des Russes et des Iraniens. »

Et aux Syriens en Syrie : « Faites attention à vous, restez sains et saufs. Et surtout, conservez votre humanité ».

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