Invité d’Hanouna, Jean-Luc Mélenchon revient sur les accusations d’antisémitisme
En se défendant d’être antisémite, le député a accusé le CRIF d’une "attitude insupportable" en "accrochant la pancarte d’’antisémite’ à ceux qui ne sont pas d’accord avec lui"
Interviewé jeudi par Cyril Hanouna dans l’émission « Balance ton post ! » sur C8, Jean-Luc Mélenchon, député de Marseille et président du groupe La France insoumise (LFI) à l’Assemblée, a à nouveau critiqué le CRIF.
« Il y a un problème politique du CRIF à mon égard, pas de moi à l’égard du CRIF », a-t-il exprimé, accusant le groupe, ce « truc », de « véhémence, de sectarisme ».
S’il se défend d’être antisémite, il a accusé le CRIF d’une « attitude insupportable » en « accrochant la pancarte d’’antisémite’ à tous ceux qui ne sont pas d’accord avec lui ».
Il dit ainsi avoir eu les « larmes aux yeux » après avoir été affublé de cette étiquette, revenant ensuite sur la manifestation en hommage à Mireille Knoll, de laquelle il a été « expulsé » par la Ligue de défense juive, accusant le CRIF de ne pas l’avoir défendu.
« Pas besoin d’inventer des antisémites, il y en a déjà suffisamment dans ce pays. Chaque fois qu’il y aura une bataille contre le racisme, je serai là », a-t-il conclu sur Twitter.
Pas besoin d’inventer des antisémites, il y en a déjà suffisamment dans ce pays. Chaque fois qu'il y aura une bataille contre le racisme, je serai là.#BalanceTonPost pic.twitter.com/zkYkQ2YwPK
— Jean-Luc Mélenchon (@JLMelenchon) February 11, 2021
A l’instar de Jeremy Corbyn au Royaume-Uni, Jean-Luc Mélenchon a, à de nombreuses reprises, suscité la polémique après des propos ambigus et été accusé de minimiser l’antisémitisme.
Après la marche contre l’antisémitisme de 2018, il avait accusé Francis Kalifat, président du CRIF, et la LDJ, de « faire plus pour l’antisémitisme que des dizaines de basses besognes des vecteurs antisémites ».
Kalifat avait alors dénoncé les « propos haineux » du dirigeant des Insoumis, qui « ne peuvent pas rester sans réponse ».
« Désavoué par l’opinion […], le chef communautariste du CRIF, monsieur Kalifat, demande des excuses. Incroyable arrogance ! Pitoyable esprit de revanche », avait ensuite tweeté Jean-Luc Mélenchon.
En décembre 2019, plusieurs responsables politiques l’avaient accusé d’avoir un « problème avec l’antisémitisme » après que le chef de LFI s’en était pris sur son blog aux « ukases arrogants des communautaristes du CRIF ».
Interrogé par l’AFP sur cette réflexion, l’entourage de M. Mélenchon avait affirmé que ce dernier voulait dire qu’il ne se laisserait « pas influencer par des lobbys quels qu’ils soient, financiers ou communautaristes ». Le député avait contesté toute accusation d’antisémitisme.
Aurore Bergé, porte-parole de LREM, avait elle accusé La France insoumise d’avoir, à l’instar du parti travailliste britannique (Labour), un « problème avec l’antisémitisme ».
« Il y a un problème avec l’antisémitisme depuis longtemps au Labour et c’est je pense et heureusement d’ailleurs ce qui a causé une partie de leur perte aujourd’hui et celle de Jeremy Corbyn et je pense que La France insoumise est atteinte par la même chose », avait dénoncé la députée des Yvelines au micro de Sud Radio.
« Ça fait 48 heures que tous les dirigeants de la France insoumise se relayent pour attaquer le CRIF, c’est-à-dire attaquer une association qui lutte dans notre pays contre l’antisémitisme, donc à un moment, en attaquant le CRIF, on attaque ceux qui luttent contre l’antisémitisme et je trouve que c’est assez insupportable de la part de Mélenchon », avait déploré Mme Bergé.
« La haine et le complotisme se nourrissent de sous-entendus douteux et de préjugés nauséabonds. Les propos tenus par M. Mélenchon sont choquants et inappropriés à notre débat républicain. La République est toujours plus forte quand elle est rassemblée », avait lui écrit Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur d’alors.
« Les propos de J-L Mélenchon contre le CRIF sont ignobles et relèvent de la pire tradition antisémite. Il doit présenter ses excuses et retrouver la raison républicaine. Les responsables politiques de gauche et de droite doivent condamner de tels propos », avait ajouté le ministre de l’Éducation Jean-Michel Blanquer.
Le mois précédent, en novembre 2019, Jean-Luc Mélenchon avait déjà critiqué « le communautarisme épais, violent », et selon lui « agressif » à son égard du CRIF.
Quelques mois plus tard, en mai 2020, lors d’une interview sur Radio J, il avait déclaré : « L’antisémitisme est présent mais n’exagérez pas ! Le peuple français n’est pas un peuple raciste. »
Suite à cette interview, Philippe Meyer, président du B’nai B’rith France, avait accusé Jean-Luc Mélenchon de « minimiser » l’antisémitisme en France.
« Quand Jean-Luc Mélenchon minimise l’antisémitisme. Une insulte pour tous ceux qui en sont la cible et pour la mémoire des Français juifs tués parce que Juifs. Les haines et les populismes ressortent intacts du confinement. La nécessité de les combattre aussi », avait écrit le responsable associatif sur Twitter.
L’été dernier, le député avait colporté des clichés antisémites en affirmant que Jésus avait été tué par ses « propres compatriotes », un vieux poncif considéré comme l’un des mythes fondateurs de l’antisémitisme, à l’origine d’incitations à la violence de Chrétiens contre les Juifs au fil de l’histoire. Le concile Vatican II a finalement mis fin aux accusations de déicide en 1965.
« On est habitués des provocations avec Jean-Luc Mélenchon », avait commenté Francis Kalifat, président du CRIF, à l’antenne de la chaine i24. « On pensait que ce vieux poncif antisémite de peuple déicide était derrière nous. Non, c’est sans compter avec Jean-Luc Mélenchon qui relance le concept à travers une déclaration où il accuse les ‘compatriotes’ de Jésus de l’avoir crucifié. C’est du Mélenchon dans le texte et je crois qu’il faut aller au-delà de la provocation. M. Mélenchon a franchi une nouvelle limite. »
« Mélenchon : à l’antisionisme d’aujourd’hui s’ajoute l’antisémitisme d’hier », avait écrit sur Twitter l’avocat Arno Klarsfeld.
L’avocat Gilles-William Goldnadel avait lui qualifié cette saillie de « dernière folie ». « Ainsi l’accusation du peuple déicide est reprise à l’instar de son mentor Chavez. Les Romains blanchis et Vatican II annulé. Bolchofascisme fou », avait-il ajouté.
« Non Jean-Luc Mélenchon ! Un peu d’histoire : Jésus-Christ fut condamné à la mort par crucifixion par le préfet romain Ponce Pilate, pas par ses compatriotes juifs ! La tentation était peut-être trop forte de recycler le bon vieux poncif antisémite du peuple déicide », avait quant à lui posté sur Twitter le député Meyer Habib, qui avait déjà par le passé accusé son collègue député d’antisémitisme.
« Non, il n’entretient aucune ambiguïté avec l’antisémitisme. Les Juifs auraient donc tué Jésus. Rien de neuf sous le soleil », avait réagi Sacha Ghozlan, l’ancien président de l’Union des étudiants juifs de France (UEJF).
Suite à l’intervention de son président de groupe dans « Balance ton post ! » hier, Danièle Obono, députée de Paris, a posté : « J’ai marché et je retournerai marcher contre l’antisémitisme et tous les racismes, pour rendre hommage et obtenir justice pour les victimes. Les haineux·ses auront beau nous insulter, diffamer, harceler, menacer, nous ne baisserons ni les yeux ni la garde. Jamais. »
En 2019, la même députée avait posé avec une pancarte appelant à la libération du terroriste libanais Georges Abdallah, condamné en France à la réclusion à perpétuité pour complicité d’assassinat du lieutenant-colonel Charles R. Ray, attaché militaire américain à Paris, et de Yacov Barsimentov, diplomate israélien membre du Mossad. Il est emprisonné en France depuis près de 40 ans.
Danièle Obono, députée de La France insoumise, apporte son soutien à la libération de Georges Abdallah. Merci à elle !#FreeGeorgesAbdallah
Posted by Free Georges Abdallah on Friday, March 8, 2019
En juin dernier, Éric Coquerel, député LFI en Seine-Saint-Denis, avait lui estimé que des insultes antisémites (« sales Juifs ») survenues lors d’une « manifestation contre le racisme et les violences policières » avaient été inventées et que certains détracteurs avaient voulu tendre un « piège » aux manifestants afin de « diviser les gens entre eux ».