La priorité du maire de Jérusalem ? La propreté
Depuis décembre 2018, Moshe Lion s'est attaqué au nettoyage de la capitale, réputée pour sa saleté ; Au menu : travail de sensibilisation auprès des jeunes et réorganisation

Si le vieil adage disant que la réparation des trottoirs endommagés et le ramassage des déjections canines sont ce que les résidents attendent le plus de la part de leur conseil municipal est vrai, alors le maire de Jérusalem, Moshe Lion, pourrait bien devenir un héros local.
Le slogan « Garder Jérusalem propre » a envahi l’année passée l’espace public dans toute la ville sainte, apparaissant sur les véhicules municipaux, les panneaux d’affichage, les bus et les arrêts de bus.
Les amendes pour les propriétaires de chiens qui ferment les yeux sur les déjections laissées par leur animal domestique et omettent de les ramasser sont passées de 22 shekels en 2018 à 569 shekels en 2019 – l’année où Moshe Lion a pris la tête de la mairie.
Et les projets visant à remplacer les trottoirs en asphalte par d’autres, plus élégants, fabriqués avec de la pierre de Jérusalem ou des dalles en béton se multipliaient partout avant le confinement.
Depuis qu’il a remporté les élections locales – c’était sa deuxième tentative – en octobre 2018, et après sa prise de fonction deux mois plus tard, Moshe Lion a fait du nettoyage de la ville sa priorité, voulant mettre sa réputation de saleté aux oubliettes une bonne fois pour toutes. Pour cela, il a mobilisé tous les services municipaux. Et ce n’est pas l’épidémie de coronavirus qui devrait le dissuader de mener à bien cette mission.

Moshe Lion l’affirme : « Je pense qu’une ville propre et préservée attirera des résidents ayant de la suite dans les idées, des entreprises qui ont réussi et des projets de développement, ce qui entraînera un développement économique et des offres d’emploi plus nombreuses ».
Itzik Nidam, chef du département des opérations au sein du conseil municipal – chargé, entre autres, de la collecte des déchets – dispose de chiffres impressionnants pour illustrer les progrès qui ont été réalisés.
Cette année, pas moins de 500 agents municipaux sont chargés de nettoyer les artères de circulation, les ruelles et les trottoirs – ils n’étaient que 100 l’année dernière – et l’objectif est d’en déployer 600 à terme.
Trente véhicules de nettoyage ont été ajoutés à la flotte préexistante ainsi que 13 gros camions dotés d’une grue pour ramasser les déchets les plus volumineux, comme les vieux réfrigérateurs et les déchets végétaux. Ces véhicules parcourent les quartiers selon un calendrier hebdomadaire spécifique, qui figure sur le site de la municipalité (en hébreu).
Avant, c’étaient les éboueurs des camions-poubelles ordinaires qui étaient responsables de la collecte des déchets végétaux – révélant souvent l’identité du jardinier négligeant qui, dans de nombreux cas, écope d’une amende (d’ailleurs, selon Itzik Nidam, les jardiniers qui souhaitent économiser l’eau peuvent commander des copeaux de bois pour protéger la terre de leurs plates-bandes en téléphonant au numéro d’urgence mis en place par la ville, le 106. La municipalité assure la livraison gratuitement).

L’année dernière, la municipalité a commencé à vider les conteneurs à poubelles le samedi soir, après le Shabbat. Une initiative qui a contribué à conserver la capitale plus propre pendant toute la semaine, explique Itzik Nidam.

La municipalité élimine aussi progressivement les vastes conteneurs à ordures connus familièrement sous le nom de « grenouilles » qui, en attendant, sont rafraîchis par des artistes professionnels.
Ils doivent être remplacés par des conteneurs plus esthétiques, partiellement enterrés. Environ 1 700 ont d’ores et déjà été installés dans des quartiers périphériques plus récents comme Armon Hanatziv, Gilo, Har Homa et Givat Masuah. Avec pour objectif de déployer 3 000 nouveaux conteneurs, le conseil va commencer à en introduire davantage dans la ville.
Recyclage : la capitale exploite un système combiné
Israël a un système de recyclage qui implique qu’il revient d’abord aux habitants de trier leurs ordures à la source en les jetant dans les poubelles adéquates, dont le contenu est défini par un code couleur. Ces déchets recyclés à l’origine – par opposition à ceux qui sont jetés et ne sont triés qu’ultérieurement – sont habituellement d’une qualité supérieure dans la mesure où les chances de contamination bactérienne sont inférieures (on peut citer, par exemple, les déchets alimentaires, l’huile ou les lubrifiants).
Jérusalem se distingue en la matière dans la mesure où la ville s’appuie sur un système combiné, qui voit les habitants trier certains déchets et jeter les autres dans les poubelles vertes qui accueillent les ordures ménagères – qui sont ensuite triées à la déchetterie de Greenet, située dans le nord de la capitale.

Cette double approche est probablement une bonne chose au vu de la confusion qui est susceptible de régner parmi les résidents.
Un regard rapide sur le contenu d’une poubelle verte, destinée aux déchets ménagers, révélera que les résidents ont été trop négligents, ignorants ou désorientés puisqu’ils y mettent également des bouteilles, des papiers et autres qui auraient dû être triés à la source et placés dans le conteneur de couleur approprié.
De la même manière, les recycleurs zélés, qui veulent s’assurer que leurs déchets connaîtront une nouvelle vie, ont pour leur part tendance à remplir les réceptacles destinés aux bouteilles en plastique seulement en y plaçant tous leurs autres déchets à base de plastique – notamment des sacs.
Un porte-parole de la compagnie ELA, qui est chargée du recyclage des bouteilles en plastique, clame que tous les déchets autres que les bouteilles, dans ces conteneurs, sont triés et renvoyés au recyclage.
Itzik Nidam a néanmoins une recommandation : en cas de doute, jetez vos déchets dans la poubelle verte – ils seront ultérieurement triés à Greenet.
Disparition des conteneurs de recyclage et cage à perroquets
Ces derniers mois, avant que n’éclate la crise liée au coronavirus, des rumeurs portant sur la disparition, dans les rues de Jérusalem, de poubelles de recyclage se sont répandues à grande vitesse.
Itzik Nidam confirme qu’environ 300 d’entre elles ont bien été enlevées – et il n’y en aura pas d’autres – parce qu’elles avaient été cassées ou vandalisées, parce qu’elles bloquaient le passage sur des trottoirs trop étroits ou qu’elles gênaient les résidents, qui en ont réclamé le retrait.

« Les poubelles peuvent s’avérer être une réelle nuisance », dit-il. « Il y a environ 5 000 conteneurs de recyclage à travers toute la ville, et 3 000 ne sont destinés qu’aux papiers et aux bouteilles. Un grand nombre ont été brûlés, vandalisés ou renversés. Les gens placent leurs déchets à côté, pas dedans ».
« On a même retrouvé un conteneur de recyclage à bouteille qui avait été transformé en cage à perroquets », ajoute-t-il.
« C’est parce que nous devons mettre les conteneurs dans des emplacements adaptés. Où ils ne gêneront pas les piétons et où les résidents vont probablement séparer les ordures destinées au recyclage et ne pas les laisser partout ».
Il ajoute que cent autres « centres de recyclage » – des sites, dans les quartiers, où les poubelles recueillant des objets variés sont concentrées à un seul endroit – sont prévus dans la capitale.
« Faux », les contenus des poubelles de recyclage ne finissent pas à la décharge
Autre rumeur persistante : celle que les ordures placées dans les conteneurs de recyclage finissent, quoi qu’il arrive, à la décharge générale – le site final où se retrouvent 80 % des déchets du pays. « C’est faux », martèle Itzik Nidam.
Les bouteilles en plastique – celles qui font moins d’un litre et demi et qui sont rendues aux supermarchés pour la consigne, et les bouteilles plus grosses qui sont jetées dans les cages de recyclage installées à cet effet – sont recyclées par la compagnie ELA et la matière brute est envoyée en Turquie, explique-t-il.
Le verre déposé dans les conteneurs violets (et les bouteilles en verre de moins d’un litre et demi, qui peuvent faire l’objet d’une consigne) sont emmenées au recyclage par l’organisation à but non lucratif Tamir Corporation. Le verre est ensuite broyé, fondu et servira à fabriquer de nouveaux produits. Il pourra aussi être fondu dans de l’asphalte pour les routes, des éléments de construction, etc…
Les papiers et le carton sont envoyés au recyclage à Rishon Etzion, à la compagnie Amir (Actuellement, le marché du carton s’assèche et les prix ont chuté : la Chine n’en veut plus, mais la Turquie en prendra un peu – vous devez donc continuer à le jeter dans les conteneurs à cet usage).
Les conteneurs à emballages ou à déchets électroniques sont « en cours de développement »
Jérusalem était à la traîne concernant deux types de recyclage, mais la ville rattrape son retard aujourd’hui, dit Itzik Nidam avec assurance.
La ville négocie un contrat pour le recyclage des déchets électriques et électroniques avec la M.A.I – Israel Electronics Recycling Corporation, l’une des deux entreprises autorisées par le gouvernement à prendre en charge ce type de déchets.

Jérusalem est également en pourparlers (c’est le cas depuis un moment) avec Tamir, la seule entité légalement reconnue pour traiter les déchets issus des emballages.
L’année dernière, le ministère de la Protection environnementale avait menacé la ville d’une amende de 528 000 shekels pour sanctionner son non-respect d’une loi adoptée en 2011, qui oblige les autorités locales à mettre en place des poubelles de recyclage pour les récipients et emballages.
La ville a depuis traîné les pieds, son contrat conclu avec l’entreprise Greenet permettant à cette dernière de vendre les emballages dans le cadre de son modèle économique.
Annuler cet accord aurait donc signifié, pour Jérusalem, de verser des indemnités à Greenet.

Itzik Nidam note que la menace du ministère n’a jamais été mise à exécution et que ce dernier et la municipalité ont entamé un dialogue, encore en cours, pour trouver une solution.
La ville devrait bientôt proposer un projet conjoint avec Tamir. Tâchez de prêter attention aux poubelles de recyclage orange qui ont déjà été distribuées par 93 autorités locales, et qui sont dorénavant au service de 4,5 millions d’Israéliens environ.
Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir. Il n’y a, par exemple, aucun service pour les résidents (il y en a un pour les restaurants) qui permette de recycler l’huile de cuisine – qui peut être transformée en biocarburant.
Si vous faites de la friture, ne jetez jamais l’huile utilisée dans l’évier ou dans les canalisations – placez-la dans un conteneur et jetez-la dans la poubelle qui est réservée aux déchets ménagers.
C’est la même chose pour les liquides hautement toxiques comme l’acétone et le diluant à peinture (ils sont similaires l’un à l’autre) qui nuisent à la faune et à la flore s’ils empruntent le système hydraulique. De petites quantités peuvent être absorbées par de l’essuie-tout et jetées à la poubelle.
En grande quantité, l’acétone peut être placée dans un bol en métal et laissée à l’air libre pour s’évaporer, à l’écart des êtres humains et des animaux. Le diluant à peinture, pour sa part, peut être traité pour être réutilisé.
L’éducation, l’éducation
En plus du renforcement des infrastructures matérielles pour assurer la propreté de Jérusalem, la ville explique aussi s’efforcer de sensibiliser la population via l’éducation.
A cette fin, le département des opérations a fait appel à Shai Moshe, le hissant au poste de « coordinateur de la propreté urbaine ». Sa mission : travailler avec d’autres départements pour s’attaquer au problème et effectuer un travail de sensibilisation auprès du public en utilisant tous les moyens possibles.

« On peut approcher les choses de nombreuses manières », explique-t-il, « par l’art, le théâtre, les histoires, les jeux, les concours ‘A la chasse aux déchets’, les jingles, les messages en différentes langues, ou en travaillant avec les forums urbains des quartiers ».
« Avant le confinement qui a suivi la crise du coronavirus, on travaillait avec des jeunes qui distribuaient des magnets. J’ai travaillé avec Osnat Bavli [responsable au sein de la municipalité de l’éducation au développement durable et au recyclage] pour déléguer des éboueurs dans les écoles et nous avons piloté un programme de sensibilisation à la propreté dans les écoles ultra-orthodoxes pour les filles, ce qui nous a permis de toucher 14 000 élèves ». Les écoles pour filles du quartier haredi de Ramat Polin, par exemple, ont lancé le slogan « Ramat Po Propre » – un jeu de mots signifiant « Ici, à Ramat, c’est propre ».
Ce modèle de sensibilisation s’appuie sur des campagnes nationales à succès liées à la sécurité routière et contre le ramassage des fleurs sauvages, note Shai Moshe. Dans ces dernières, les enfants avaient été exposés à deux sortes d’activités formelles et à deux sortes d’activités informelles.
« Et si les efforts sont constants et cohérents, le message est transmis », indique-t-il.
« Cela va prendre quelques années mais les programmes ont été lancés et ça fonctionne. On n’a pas encore atteint la totalité des résidents, mais cela reste notre objectif ».

Et avec une population qui ne cesse d’augmenter en Israël et dans le monde, les ordures se multiplient elles aussi.
C’est le bon moment pour se rappeler que tout ne peut pas être recyclé, que les infiltrations, dans les décharges, contribuent à empoisonner les eaux souterraines et que le recyclage des différents objets peut causer autant de pollution que leur fabrication.
Alors, si vous voulez venir en aide à l’environnement et à votre planète, n’oubliez pas : achetez moins, réutilisez et réparez d’abord.
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