Le Kibboutz qui est le plus grand producteur de loulav place ses feuilles en haut lieu
Tirat Zvi a perfectionné l'art de la feuille de palmier, faisant partie de l'industrie lucrative des Quatre espèces qui fleurit une semaine par an, pendant la fête de Souccot
A Tirat Zvi, ce sont les bouddhistes qui sont les spécialistes du loulav casher. Les ouvriers agricoles thaïs qui travaillent dans la plantation de palmiers dattiers du kibboutz sont les premiers à séparer les feuilles de palmier casher des autres. Les loulav sont l’une des Quatre espèces, un groupe de plantes rituelles utilisées pendant la fête de Souccot.
« Ils sont bouddhistes mais ils savent et ils comprennent bien ce qui rend les feuilles casher », explique Avner Rotem, qui gère les plantations de palmiers dattiers du kibboutz pendant que Somjit, un ouvrier thaï qui a refusé de donner son nom de famille, manœuvre adroitement une nacelle élévatrice vers le sommet de l’un des 13 000 palmiers dattiers utilisés pour la culture de loulav.
Il faut un peu d’entraînement pour bien saisir la longueur et l’étroitesse que les feuilles de palmier fermées, au bout redressé, doivent présenter pour répondre aux normes casher. « Ils savent que si on arrive trop tard et que si les feuilles sont déjà trop ouvertes, alors il faudra les laisser de côté et en choisir d’autres », commente Rotem.
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Les loulav proviennent des toutes jeunes feuilles qui se situent en haut des arbres, où naissent les nouvelles branches. Ils doivent être récoltés lorsqu’ils font à peu-près un mètre de longueur mais avant que les feuilles ne se divisent et ne s’ouvrent – ce qui les rend non-casher.
Sept mois par an, Somjit amène la nacelle au sommet des arbres et peut ainsi se glisser au-delà des feuilles extérieures devenues dures et qui se sont déjà divisées pour prendre la forme traditionnelle du palmier, pour accéder aux branches les plus récentes. Avec deux entailles rapides, il coupe des loulav de deux mètres de long, vérifie leurs tailles, s’assure que les bouts de ne sont pas endommagés et les place dans un carton avant de passer à l’arbre suivant.
Souccot, qui commence mercredi au coucher du soleil et durera une semaine, célèbre la récolte d’automne et rappelle les structures temporaires qui avaient abrité les Israélites au cours de leurs 40 années d’errance dans le désert après l’Exode depuis l’Egypte. Les Juifs du monde entier observent cette fête en construisant des cabanes temporaires, où ils mangent et dorment parfois. Une fois par jour, il y a la tradition des Quatre espèces : des feuilles de palmier, le myrte, le saule, et un cédrat, l’etrog en hébreu. L’origine des Quatre espèces se trouve dans le Lévitique, 23;40.
Tirat Zvi, un kibboutz religieux alangui sous le soleil de l’une des régions les plus chaudes d’Israël, dans la vallée de Beit Shean, est le plus important producteur de loulav d’Israël et en expédie environ 150 000 par an. Rotem estime que les Juifs agitent environ 700 000 loulav en Israël et 500 000 à l’étranger pendant Souccot.
A Tirat Zvi, les loulav sont récoltés sur une espèce de palmier dattier particulière, le Dery . L’histoire raconte qu’en 1985, Shabtai Kovin, un jeune rabbin de Safed, s’était aventuré dans la région de Beit Shean en quête du « loulav parfait ». (Les palmiers dattiers adorent le soleil et la vallée de Beit Shean est donc l’un des secteurs les plus prisés pour cette culture.)
Il avait rencontré des cultivateurs de Tirat Zvi et examiné toutes les espèces de feuilles de palmier qui provenaient des neuf espèces de palmiers dattiers issues du Kibboutz. Après un examen minutieux, il avait proclamé que c’était assurément le palmier dattier Dery qui produisait le meilleur loulav.
Le prix de vente des Quatre espèces est basé sur le degré de respect des produits présentés pour les normes casher. La branche de myrte, par exemple, se distingue par des feuilles qui se sont développées depuis le même point, par groupe de trois. Les prix peuvent énormément varier, certaines familles étant prêtes à offrir des sommes importantes pour pouvoir accéder à des etrog et des loulav de qualité « supérieure » ou « davantage casher ».
Ce qui est important pour le loulav, c’est les tiomet serrés – ou ses deux feuilles les plus longues. Dans l’espèce Dery, les tiomet ont tendance à croître en se resserrant davantage et plus les tiomet sont près l’un de l’autre, plus le loulav sera remarquable – et plus il sera cher.
Les Juifs du mouvement Habad favorisent, pour leur part, les etrog de la région de Calabre en Italie, qui, cette année, connaissent une grande pénurie en raison du gel. Les etrog les plus beaux ou les « plus casher », cette saison, peuvent donc atteindre un prix de 500 dollars.
Retour en 1985. Kovin a acheté 100 loulav provenant de palmiers dattiers Dery et il est retourné à Bnei Brak, où ils les a vendus en moins d’une heure. Le kibboutz, sentant une opportunité économique, a alors commencé à planter davantage de ces arbres.
Les palmiers dattiers Dery produisent également des dattes mais qui n’ont pas la qualité de l’espèce medjool, la plus populaire – ce qui explique pourquoi le kibboutz n’avait jamais planté auparavant un grand nombre de palmiers dattiers Dery.
Aujourd’hui, approximativement la moitié des 25 000 palmiers dattiers du kibboutz, répartis sur environ 150 hectares, sont des Dery. Même si les dattes restent le produit agricole le plus prisé du kibboutz, les loulav représentent environ un tiers des bénéfices réalisés dans l’exploitation.
Tirat Zvi vend ses loulav en gros, par boîtes de 40, pour approximativement 25 shekels la pièce. Ils sont considérés comme des produits haut de gamme et peuvent être présentés sur le marché à 100 shekels la feuille de palmier (sans le saule, le myrte et l’etrog). Rotem a vu des loulav de Tirat Zvi à la vente à New York au prix de 350 shekels.
Ces prix élevés signifient que les palmiers dattiers du kibboutz sont également une cible pour les voleurs. Au cours des dernières années, ce sont des centaines de loulav qui ont été dérobés sur des arbres plus petits pendant Rosh Hashana ou Yom Kippour, lorsque les champs sont vides.
Tirat Zvi exporte également des loulav en Australie, au Panama et en Argentine. Chaque loulav est emballé individuellement dans un sac plastique et arbore le logo de Tirat Zvi .
A l’origine, le kibboutz commençait à récolter des loulav pendant l’été, après Tisha BéAv. Mais dans les années 2000, il a commencé à utiliser un traitement antifongique par lavage qui permet aux loulav d’être stockés jusqu’à six mois.
Dorénavant, Rotem et ses 25 ouvriers commencent à récolter des loulav pour Souccot lorsque les enfants ôtent leurs déguisements de Pourim, au début du printemps. L’entrepôt où sont conservés les loulav contient sept réfrigérateurs qui peuvent chacun accueillir 20 000 loulav durant l’été brûlant.
Sept mois de récolte signifient qu’un palmier dattier mature peut produire environ 14 loulav par an. Les pousses de feuille grandissent de trois centimètres par jour et elles sont taillées lorsqu’elles mesurent à peu-près un mètre de longueur, ce qui signifie que chaque arbre est récolté environ une fois par mois. L’arrivée du stockage en chambre froide signifie également que les Israéliens, contrairement aux Juifs de la diaspora, n’ont plus besoin d’importer des loulav depuis le Maroc ou l’Egypte pour répondre à leurs besoins.
Parmi les ouvriers, il y a Chaim Engelen, 22 ans, qui était soldat seul à Tirat Zvi, et appartenait à un groupe de plusieurs soldats de Garin Tzabar venus du monde entier pour vivre dans le kibboutz et s’enrôler tous ensemble au sein de l’armée. « J’ai quitté l’armée le jeudi, et le dimanche, j’avais déjà commencé à travailler sur les palmiers dattiers », raconte Engelen, qui est employé sur le site depuis 13 mois. Il est dorénavant un expert de la pollinisation des dattes – chaque espèce exige un ratio de pollen différent qui est mélangé avec du talc puis saupoudré sur les fleurs femelles. Il a également appris comment lier les grappes de dattes medjool qui pèsent 25 kilos aux feuilles de palmier pour qu’elles ne se brisent pas sous leur propre poids.
« C’est intéressant de penser que quelqu’un en Californie ou à New York puisse agiter ce loulav », s’exclame Engelen, qui est originaire du Minnesota. « Mais c’est encore plus intéressant pour moi de voir le loulav – vous sortez pour le couper et six mois après, il est encore vert. C’est étonnant de constater combien il reste vert. »
Engelen indique que son travail sur la plantation n’a fait qu’accroître son intérêt pour le loulav. « Habituellement, on le voit pendant une semaine et après, on le jette, dit-il. Ici, on pense au loulav pendant presque toute l’année. On passe une bonne partie de l’année à travailler sur des choses que les gens vont brandir sept fois puis jeter à la poubelle. »
Le mercredi précédant Souccot, Somjit et les autres employés s’activaient à préparer les derniers loulav avant la fête. Ils travaillent méthodiquement, avec deux coupes par arbre, avant de passer au suivant.
« Nous avons plusieurs religions qui travaillent ici, dit Rotem. Nous avons des ouvriers musulmans et druzes, des employés bouddhistes thaïs. Nous avons également un étudiant du Népal qui travaille sur l’agriculture – et tous travaillent sur notre exploitation. »
Il dit que l’une des raisons pour lesquelles il aime travailler sur les palmiers dattiers est que toutes les parties de cet arbre ont une utilisation. « C’est écrit dans le Talmud qu’il n’y a aucun déchet dans le palmier dattier. Vous mangez son fruit, vous utilisez sa feuille, et même le tronc, nous l’utilisons pour faire des bancs. »
Il y a même une seconde utilisation pour les feuilles de palmier pendant Souccot : le schach – ou revêtement – de la Soucca (cabane) construite par les familles. Mais la récolte des dattes medjool, qui rapporte également beaucoup d’argent au Kibboutz, a commencé avant Souccot et le kibboutz n’a tout simplement pas les ressources nécessaires pour participer à cette industrie moins lucrative.
Alors que dix ouvriers viennent d’emballer les derniers milliers de loulav, un autre groupe d’employés se met à rire en voyant le tapis roulant sortir de grosses dattes juteuses dans des cartons.
« Nous n’avons tout simplement pas le temps de couper des branches de palmier pour le schach, s’exclame Rotem. Mais c’est agréable de répondre ainsi aux besoins des Juifs, de pouvoir leur offrir les meilleurs loulav que nous pouvons produire. »
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