Le thème choisi cette année pour Yom HaShoah porte sur les communautés dévastées
La cérémonie commémorative annuelle à Jérusalem abordera des aspects traditionnels, mais aussi les massacres sans précédent du 7 octobre et la guerre en cours contre le Hamas
Le thème central de la cérémonie de commémoration de la Shoah de cette année a été décidé par Yad Vashem bien avant les massacres du 7 octobre, mais la résonance entre ces atrocités et le thème « Un monde perdu : La destruction des communautés juives » est particulièrement troublante.
Sous le voile de sept mois de guerre contre le groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza, ce thème évoque des associations profondes avec les communautés israéliennes à la frontière de la bande de Gaza, largement dévastées. Durant l’attaque sanglante sans précédent du Hamas, 1 200 Israéliens ont été assassinés et 253 personnes ont été enlevées dans la bande de Gaza, déclenchement le conflit en cours.
« Le thème de cette année évoque fortement le 7 octobre », a indiqué Simmy Allen, porte-parole de Yad Vashem, au Times of Israel.
La cérémonie commémorative débutera dimanche soir à Yad Vashem, à Jérusalem. Officiellement appelée Yom HaShoah, la cérémonie d’ouverture sera retransmise en direct à 20 heures, heure israélienne.
Pendant la Shoah, ce sont des milliers de communautés juives qui ont été anéanties à jamais par les nazis et leurs collaborateurs.
« Les milliers de communautés juives d’avant-guerre constituaient un pilier fondamental et essentiel de la vie du peuple juif », a déclaré Yad Vashem.
« La communauté juive, cette unité sociale unique et autonome qui a caractérisé l’existence juive dans la diaspora à travers les âges, a été brutalement frappée par la Shoah ».
Cette année, le thème de la cérémonie est illustré par l’affiche choisie pour la cérémonie, ainsi que par le travail entrepris par l’artiste résident actuel de Yad Vashem, Shai Azoulay.
L’exposition de l’artiste israélien, intitulée « Bigger Than Me », se concentre sur la petitesse de l’individu dans le contexte de la destruction. La peinture d’un jeune homme assis dans une chaussure, à la dérive dans une mer de sang, en est un exemple.
« Nous avons fait l’expérience… d’un échantillonnage de ce qu’a été la Shoah. Cela nous a donné une idée, en tant que peuple, de ce que cela signifie de vivre un pogrom, et nous étions en état de choc, comme si nos membres avaient été amputés, et cela a été un signal d’alarme », a indiqué Azoulay en parlant des massacres perpétrés par le Hamas.
Dans ses œuvres pour Yad Vashem, Azoulay a rempli des toiles de symboles de la Shoah et d’images de Marc Chagall représentant des personnes flottant dans des scènes oniriques. On retrouve à plusieurs reprises des personnages submergés, notamment dans son œuvre la plus choquante, celle du 7 octobre, où une vague sombre vient écraser les personnes qui se trouvent sous elle.
« Évidemment, il n’y a pas de comparaison possible entre le 7 octobre et la Shoah – nous ne parlons pas ici de six millions de personnes. Mais cet échantillon nous a donné une idée, c’est comme un cover [une reprise], voilà ce que cette période évoque. Tout d’un coup, les Juifs se sont réveillés, le ghetto est de retour, l’isolement », a expliqué Azoulay.
En explorant les vastes archives de Yad Vashem, l’artiste a eu le sentiment d’avoir « enfilé des chaussures qui étaient plusieurs tailles trop grandes », a déclaré Azoulay.
« Tout s’est électrifié, connecté, comme si les fils s’étaient tissés d’eux-mêmes… Les événements [du 7 octobre] m’ont transporté en pleine Shoah, et j’ai eu l’impression, pendant une seconde, que nous y étions », a déclaré Azoulay.
Vie et continuité
La journée de commémoration de la Shoah a été instituée par le gouvernement israélien en 1959 pour coïncider avec la révolte du ghetto de Varsovie. Cet acte de rébellion de masse mené en 1943 est devenu le symbole de la résistance à la Shoah.
La cérémonie va crescendo avec six survivants qui allumeront chacun l’une des six torches représentant les six millions de victimes de la Shoah. Cette année, les flambeaux seront allumés par les survivants Pnina Hefer, Allegra Gutta, Arie Eitani, Raisa Brodsky, Michael Bar-On et Izi Kabilio. De courtes vidéos sur la vie de chacun des survivants seront disponibles sur le site web de Yad Vashem.
Yad Vashem invite régulièrement les membres du public à soumettre du contenu pour commémorer la Shoah. L’affiche de cette année a été conçue par Ira Ginzburg, dont la grand-mère – Frieda Teitelman – a été témoin de l’assassinat de nombreux membres de sa famille dans les forêts d’Ukraine.
« L’histoire de ma grand-mère est une histoire de vie et de survie, et il n’y a pas de meilleur moment pour parler de la nécessité de reconstruire et d’entretenir les racines que ces jours après le massacre du 7 octobre », a expliqué Ginzburg. « Les nouvelles branches représentées sur l’affiche symbolisent le renouveau de la famille de ma grand-mère et les pousses qui émergent de la dévastation ».
Yad Vashem mène également une autre campagne de crowdsourcing sur les réseaux sociaux : « Qui est votre héros de la Shoah ? ». Depuis quelques mois, le musée a tendu la main à des dirigeants internationaux, des influenceurs et des acteurs pour créer des vidéos d’une à deux minutes sur leur héros personnel de la Shoah.
Jusqu’à présent, Yad Vashem a reçu des vidéos de « héros de la Shoah » de personnalités très médiatisées, notamment James Maslow, Ben Silverman, Patricia Heaton et Montana Tucker.
« L’objectif principal de cette initiative est de favoriser la sensibilisation à la Shoah, en particulier auprès de ceux qui sont peut-être moins informés, et d’encourager les autres à partager leurs propres héros de la Shoah », a expliqué le porte-parole Allen.
« En tant qu’influenceurs, les participants ont une occasion unique de promouvoir la compassion et la tolérance a leurs followers, en soulignant la pertinence durable de la mémoire de la Shoah dans le discours d’aujourd’hui », a précisé Allen.
Le Yom HaShoah le plus important depuis 76 ans
La communauté juive de Boston n’est pas la seule à considérer la cérémonie commémorative de cette année comme « le Yom Hashoah le plus important depuis 76 ans », compte tenu des massacres perpétrés par le Hamas et de la guerre en cours. D’autres programmes, dont « Six millions de pas« , redoublent d’efforts face à la montée de l’antisémitisme.
Le 6 mai, 55 survivants de la Shoah participeront à la 36e Marche des vivants, un rassemblement inter-générationnel qui se tiendra à Auschwitz-Birkenau, en Pologne. Sept d’entre eux ont été directement touchés par les massacres perpétrés par le Hamas en Israël.
« Le lien entre la Shoah, vécue par les Juifs il y a 80 ans, et les horreurs de l’assaut du 7 octobre souligne notre obligation collective, en tant que nation et société, de rester résiliente, de nous défendre et de continuer à façonner le récit remarquable de notre peuple », a déclaré Haim Taib, président de la Fondation Menomadin et chef de la délégation israélienne du 7 octobre à la Marche des vivants.
« Je suis fier de marcher aux côtés des personnes courageuses de la délégation du 7 octobre. Ensemble, nous renaîtrons des cendres de cet horrible attentat et nous favoriserons la prospérité et l’abondance pour les années à venir », a affirmé Taib.