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L’épisode spécial Hanoukka d’Elena d’Avalor fait avancer la représentation

L'épisode du dessin animé Disney consacré à la fête juive a cependant provoqué une polémique pour son mélange des coutumes juives

Capture d'écran de l'épisode d'Hanoukka de Disney "Elena d'Avalor", "Festival des lumières". (Capture d'écran Disney + via JTA)
Capture d'écran de l'épisode d'Hanoukka de Disney "Elena d'Avalor", "Festival des lumières". (Capture d'écran Disney + via JTA)

KVELLER via JTA — Quand Disney a annoncé qu’il diffuserait un épisode de Hanoukka pour son dessin animé populaire « Elena d’Avalor » avec une princesse latino-juive, la communauté juive était en effervescence sur internet. Moi aussi, j’avais vraiment hâte. Mes deux filles âgées de 4 et 6 ans pourraient enfin voir le judaïsme mis à l’honneur à la télévision, avec un personnage au style traditionnel.

Intitulé « Festival des lumières », l’épisode a été diffusé pour la première fois le 6 décembre aux États-Unis. Il montre les péripéties d’une nouvelle héroïne, la princesse Rebecca, alors que son navire royal s’aventure dans les eaux dangereuses au large des côtes d’Avalor. Une fois en sécurité sur terre, la Princesse Elena apprend que Rebecca était en voyage pour rentrer chez elle dans le royaume latino-juif de Galonia, afin de célébrer Hanoukka. La précieuse menorah de sa grand-mère a été perdue en mer, et la princesse ne peut pas rentrer à temps chez elle pour célébrer cette grande fête. Oh non ! Mais Elena est prête à aider une autre princesse en détresse, et c’est à ce moment-là qu’elle intervient avec sa famille. Ils apprennent tout ce qu’il faut sur le Festival des Lumières et contribuent à créer une expérience de Hanoukka ayant du sens pour tout le monde.

Dans l’épisode, les spectateurs apprennent quelques éléments sur l’histoire originale de Hanoukka, mais aussi sur la signification de la menorah et d’autres symboles propres à cette fête. Pourtant, l’élément le plus intéressant de l’épisode réside peut-être dans le fait que les fans découvrent que les Juifs latinos existent. C’est une étape assez importante en ce qui concerne la représentation, de mon point de vue.

Toutefois, des confusions et des critiques autour de l’épisode n’ont pas tardé à apparaître, alors que certains commentateurs ont été vexés par le fait que le personnage de Rebecca soit un mélange de coutumes séfarades et ashkénazes. Certains y ont vu une occasion manquée pour Disney d’exposer entièrement la culture séfarade, une minorité souvent sous-représentée au sein de cette minorité.

Mais voilà le problème : ai-je manqué le moment où l’on parlait d’une princesse séfarade Disney ? J’ai seulement entendu dire qu’il y aurait une princesse juive latina. Et ce n’est pas la même chose.

En tant que militante séfarade spécialisée dans la langue ladino, je rencontre souvent des gens qui essaient de me corriger, « Vous voulez dire, latino, n’est-ce pas ? ».

Alors, soyons clairs : le ladino est une langue parlée par de nombreux descendants de Juifs espagnols, connus comme les sephardim (séfarades), qui ont été expulsés de la péninsule ibérique au 15e siècle. Latino fait généralement référence à ceux ayant des origines en Amérique latine.

Tous les Juifs latinos ne sont pas séfarades (ni ne parlent ladino), de la même manière que tous les Juifs séfarades ne sont pas latinos. Et pourtant, la confusion sur cette différence semble être la source de beaucoup de discussions entourant l’épisode de Hannouka. Spécifiquement, beaucoup ont été déçus que l’héroïne juive latina appelle sa grand-mère bubbe, le mot yiddish ashkénaze pour « grand-mère », au lieu d’utiliser les mots latinos nona ou avuela. Ou que les latkes d’Europe de l’Est ont été préparés aux côtés des bimuelos, des beignets sucrés et frits séfarades. La robe de Rebecca arborait surtout des motifs du Moyen-Orient, mais l’utilisation du dreidel et du gelt – considérés comme des coutumes ashkénazes – semblait paradoxale.

Je suis surprise devant ces critiques, parce qu’une princesse juive latina pourrait très bien être – et serait très probablement – ashkénaze. L’Argentine, par exemple, qui compte la plus grande communauté juive d’Amérique latine, est majoritairement ashkénaze. Et alors que les bimuelos sont généralement associés aux séfarades, ils sont aussi souvent consommés en Amérique latine, avec une écriture espagnole proche : buñuelo. Il est totalement réaliste qu’une juive latina mange des bimuelos sans être nécessairement séfarade.

Capture d’écran de l’épisode d’Hanoukka de Disney « Elena d’Avalor », « Festival des lumières ». (Capture d’écran Disney + via JTA)

En outre, dans le monde globalisé d’aujourd’hui, les familles juives sont-elles réellement à 100 % séfarades ou ashkénazes ? Ou même 100 % de n’importe quoi ? Impossible. Je m’identifie comme séfarade du côté de ma mère, mais j’ai un père ashkénaze. Est-ce une shande (honte)? Pas vraiment – c’est simplement le reflet authentique de la réalité juive mondiale, aussi bien passée et présente. Il est parfaitement probable que Rebecca ait pu être une princesse juive latine avec une bubbe qui aime à la fois manger des bimuelos et du gelt. En résumé, ce mélange de traditions est l’expérience juive latino.

Disney aurait-il pu aller plus loin pour proposer une représentation moins « ashkénormative » du judaïsme ? Absolument. Aurait-il pu faire de Rebecca une héroïne juive entièrement séfarade en lui faisant appeler sa grand-mère nona, ou en ponctuant la chanson de quelques mots ladino ? Incontestablement. Mais, mon Dieu, apprécions simplement le fait qu’un épisode entier soit consacré à Hanoukka sur un dessin animé Disney. Et qu’il n’était pas en compétition avec Noël. Je ne peux pas m’empêcher de penser que c’est un énorme pas en avant – pour les Juifs et les non-Juifs.

Au final, pourtant, mon opinion – et celle de la plupart des adultes – compte-t-elle vraiment ? Le débat sur cet épisode ignore largement le public visé par ce dessin animé. J’ai lu de nombreux articles sur la manière dont les adultes juifs ont regardé cet épisode, mais qu’en est-il des
enfants ?

Capture d’écran de l’épisode d’Hanoukka de Disney « Elena d’Avalor », « Festival des lumières ». (Capture d’écran Disney + via JTA)

Dans une étude très scientifique, j’ai regardé l’épisode de Hanoukka avec mes deux filles. Pour la plus jeune fille, elle avait la réaction typique d’un enfant de quatre ans en train de regarder un dessin animé de 20 minutes, suivant les péripéties du personnage confronté à des épreuves et à des triomphes. Était-ce important que la Princesse Rebecca soit juive ? Pas tant que cela.

D’un autre côté, quand je lui ai demandé, ma fille de 6 ans a dit qu’il lui semblait étrange que Hanoukka soit choisie pour un dessin animé. Mon cœur s’est serré quand j’ai entendu cela. Le fait qu’il lui soit si étrange de voir quelque chose de juif à la télévision l’a « gênée ». Et c’est son propre mot. Elle ne voulait pas que tous ses amis, pour la plupart non-Juifs, parlent d’elle en train de célébrer Hanoukka.

Sincèrement, sa réaction devrait nous faire repenser certaines des critiques négatives du programme. Elle était gênée parce qu’il était aussi extraordinaire de voir des éléments juifs présentés à la télévision. Cela devrait être la preuve que nous en avons plus besoin. Il est bien que Disney ait pris l’initiative et ait vu le besoin de partager, ne serait-ce même une tranche de culture juive sur l’un de ses programmes populaires.

Capture d’écran de l’épisode d’Hanoukka de Disney « Elena d’Avalor », « Festival des lumières ». (Capture d’écran Disney + via JTA)

Alors ne nous préoccupons pas trop de savoir si « Elena d’Avalor » a dépeint correctement les caractéristiques ethniques ou religieuses présentées (même s’il est toujours intéressant d’en discuter). Reconnaissons plutôt le besoin d’avoir des programmes jeunesse qui soient à la fois un miroir et une fenêtre sur la vie juive. Laissons nos enfants avoir une vision normalisée d’eux-mêmes sur les grandes chaines de télévision et donnons aux autres la chance de voir ce qui rend le judaïsme si merveilleux.

Même édulcoré, l’épisode « Festival des Lumières » était imprégné d’une symbolique réelle. Elena pouvait voir que la Princesse Rebecca aime vraiment Hanoukka, et tout ce que cela représentait pour sa famille. Je veux cela reste l’élément principal à retenir pour mes enfants et leurs amis, et non pas de savoir si une Juive latina peut avoir une bubbe (ce qui, comme nous l’avons démontré, est possible).

Y a-t-il d’autres mesures à prendre en ce qui concerne la représentation de toute la diversité et des coutumes juives à la télévision ? Naturellement. Mais gardons à l’esprit une des leçons centrales de l’épisode du « Festival des Lumières » : il est important de profiter au maximum de ce que nous avons.

Cet épisode spécial de Hanoukka avec une princesse juive a été une grande chance pour Disney et pour tous ses spectateurs, alors profitons-en au maximum.

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