L’opposition blâme la coalition après l’abaissement de la note d’Israël par Moody’s
Pour Yaïr Lapid "tout s’effondre" sous la coalition Netanyahu ; pour Liberman, "Netanyahu détruit l'économie" ; Lazimi, du parti Avoda, dénonce la "parade de faux récits"
Des députés de l’opposition ont attaqué la coalition de Benjamin Netanyahu samedi après que l’agence de notation Moody’s a abaissé les perspectives économiques d’Israël de « positives » à « stables ».
Le chef de l’opposition, Yaïr Lapid, a déclaré que le gouvernement était à l’origine de « l’effondrement » du pays et qu’il devait annoncer immédiatement l’arrêt de ses projets visant à réformer radicalement le système judiciaire.
Dans sa décision, Moody’s a cité la « détérioration de la gouvernance d’Israël » dans le cadre des efforts largement controversés du gouvernement, qui, selon les critiques, éroderont et mettront même fin au système démocratique de gouvernance d’Israël.
« Cette annonce… est la preuve que le coup d’État du régime met en danger les moyens de subsistance de chaque citoyen israélien. Les mensonges et les tentatives de rejeter la faute sur les autres ne serviront à rien dans ce cas », a écrit Lapid sur Twitter.
« Les faits sont clairs : le gouvernement que j’ai dirigé leur a transmis une économie forte et prospère, et sous le mandat du [Premier ministre Benjamin] Netanyahu et du [ministre des Finances Bezalel] Smotrich, tout s’effondre », a déclaré Lapid.
« Ils devraient annoncer qu’ils mettent fin à la folie législative et qu’ils s’occuperont de l’économie et des moyens de subsistance des citoyens du pays », a déclaré le dirigeant de Yesh Atid.
Fin mars, Netanyahu a annoncé une suspension du processus législatif visant à remanier la Cour suprême, alors que la coalition et l’opposition tiennent des pourparlers pour tenter de parvenir à un consensus sur la réforme judiciaire, mais le Premier ministre a également souligné que le processus législatif reprendrait même si aucun accord n’était conclu.
Le chef d’Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, ancien ministre des Finances, a déclaré que la dégradation de la note était un « tremblement de terre économique » et que le Premier ministre « détruisait l’économie israélienne ».
« En avril de l’année dernière, lorsque j’étais ministre des Finances, Moody’s a relevé les perspectives d’Israël à un niveau ‘positif’, et j’ai laissé au gouvernement actuel une économie en croissance et un excédent budgétaire d’environ 10 milliards de shekels. Et voilà qu’au bout de trois mois, nous sommes au bord de l’effondrement économique », a déclaré Liberman.
« Le manque d’intérêt pour le coût de la vie, le populisme bon marché, la promotion des intérêts personnels et les priorités de Netanyahu et de son gouvernement vous coûtent cher, à vous, citoyens du pays », a ajouté Liberman.
La députée Naama Lazimi (Avoda) a dénoncé la « parade de faux récits » qui circulent sur les réseaux sociaux par les partisans de la refonte.
« ‘C’est la faute des manifestants’ – c’est un mensonge, c’est le contraire. ‘Vous [l’opposition] en êtes heureux – nous sommes choqués, et nous ne faisons que présenter la réalité. Il ne s’agit que d’une société [de notation] sur trois’ – la tendance est claire. L’économie reste stable – les institutions s’affaiblissent, il y a de la corruption, les capitaux et les investissements fuient, les services sociaux sont réduits », avait écrit Lazimi, appelant les citoyens à se joindre aux manifestations anti-réforme de samedi soir.
La députée Efrat Rayten (Avoda) a déclaré que « l’orgueil a bouché les oreilles et fermé les yeux des dirigeants du coup d’État », ajoutant que « même l’appel téléphonique paniqué et désespéré de Netanyahu à l’agence de notation n’a pas réussi à réparer les énormes dégâts causés par ce gouvernement maléfique ».
La Douzième chaîne a rapporté que ces derniers jours, Netanyahu et le président Isaac Herzog, qui accueille les négociations de compromis sur la réforme, ont eu des discussions urgentes avec des hauts fonctionnaires de Moody’s afin de rassurer l’agence.
Benny Gantz, le chef du parti HaMahane HaMamlahti qui participe également aux négociations sur la réforme à la résidence présidentielle, n’a fait aucun commentaire public.
Le rapport de l’agence de notation a confirmé vendredi les craintes d’un abaissement de la perspective de crédit d’Israël, comme Moody’s l’avait annoncé le mois dernier.
Les manifestations hebdomadaires de masse dans tout le pays contre les projets du gouvernement visant à remanier le système judiciaire se sont poursuivies, même après que Netanyahu a mis le processus législatif en pause. Les membres de la coalition se sont engagés à le poursuivre après les congés de Pessah de la Knesset.
Vendredi, l’agence a déclaré que ce changement – qui intervient juste un an après que Moody’s a revu à la hausse les perspectives de crédit d’Israël – « reflète une détérioration de la gouvernance d’Israël, comme l’illustrent les récents événements liés à la proposition du gouvernement de réformer le système judiciaire du pays ».
« Bien que des manifestations de masse aient conduit le gouvernement à suspendre le processus législatif et à rechercher le dialogue avec l’opposition, la manière dont le gouvernement a tenté de mettre en œuvre une réforme de grande envergure sans rechercher un large consensus indique un affaiblissement de la force institutionnelle et de la prévisibilité politique », peut-on lire dans le rapport de huit pages de Moody’s, rédigé dans des termes très durs.
Bien que les perspectives de crédit d’Israël aient été revues à la baisse vendredi, l’agence a maintenu la note de crédit actuelle du pays à A1, citant « la forte croissance économique et l’amélioration de la solidité fiscale ».
L’économie israélienne, selon Moody’s, « s’est avérée résistante à de nombreux chocs économiques et géopolitiques au cours des dernières décennies et s’est développée à un rythme rapide, aidée par les industries de haute technologie mondialement compétitives d’Israël ». « Les projections de base de Moody’s tablent sur la poursuite d’une croissance robuste à moyen-terme. »
« L’économie israélienne s’est développée à un rythme rapide au cours des dernières années, avec une moyenne de 4,1 % sur les dix dernières années, jusqu’en 2022, aidée dans une large mesure par les industries de haute technologie mondialement compétitives et de plus en plus diversifiées », a déclaré l’agence.
Le secteur israélien de la high-tech a longtemps été présenté comme le principal moteur de la croissance économique du pays, représentant 49 % du total des exportations et générant environ 15 % du PIB en 2022.
Il a été un élément clé de l’opposition au paquet de réformes du gouvernement, certaines entreprises transférant des fonds importants à l’étranger et menaçant de se délocaliser si la démocratie était mise à mal.
Moody’s a averti vendredi que les notes de crédit d’Israël pourraient également être « soumises à des pressions à la baisse si les tensions actuelles devaient se transformer en une crise politique et sociale prolongée ayant un impact négatif important sur l’économie, éventuellement lié à une baisse substantielle des entrées de capitaux dans l’important secteur de la high-tech et à la délocalisation d’entreprises israéliennes à l’étranger ».
Moody’s a déclaré que si le gouvernement israélien menait effectivement des délibérations, il avait également « répété son intention de modifier le mode de sélection des juges ». Cela signifie que le risque de nouvelles tensions politiques et sociales au sein du pays subsiste. Mais si un compromis est trouvé « sans aggraver ces tensions, les tendances économiques et fiscales positives que Moody’s avait précédemment identifiées seront maintenues ».
Au début du mois, l’OCDE a averti que le rythme de croissance économique du pays devrait se ralentir et que « les risques sont orientés à la baisse, en raison d’une forte incertitude au niveau mondial et national ». L’organisation prévoit un ralentissement du taux de croissance du PIB, qui devrait passer de 6,4 % l’année dernière à 3 % en 2023 et à 3,4 % en 2024.
Vendredi, la publication de l’indice des prix à la consommation (IPC) de mars, une mesure de l’inflation qui suit le coût moyen des biens ménagers, a montré une augmentation de 0,4 % par rapport à février. L’IPC a oscillé au-dessus de 5 % en termes annuels au cours des six derniers mois, en deçà de la fourchette cible de 1 % à 3 % fixée par le gouvernement.
La hausse de l’inflation s’est produite malgré les mesures prises par la Banque d’Israël pour la freiner. Au cours de l’année écoulée, la Banque centrale a régulièrement augmenté son taux d’intérêt de référence, qui est passé d’un niveau record de 0,1 % en avril dernier à 4,5 % au début de ce mois, afin de tenter de freiner la croissance des prix.
L’inflation a été plus lente à diminuer en partie à cause de la faiblesse du shekel, qui rend les produits importés plus chers. Depuis le début de l’année, la monnaie locale s’est dépréciée d’environ 4 % par rapport au dollar américain. L’indice du dollar américain, qui mesure le billet vert par rapport à six grandes monnaies mondiales, a baissé d’environ 2 % depuis le début de l’année 2023.
Sharon Wrobel a contribué à cet article.