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Analyse

Netanyahu ne cesse d’appeler à des négociations avec Abbas. Est-il sérieux ?

Il a gelé les implantations, mais les a aussi étendues, appelle à des discussions mais les aurait refusées. Netanyahu est-il réaliste sur la paix, ou un obstacle pour la faire ?

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (au centre) avec le vice chef d'Etat-major, Yair Golan, et le président Reuven Rivlin (à droite), pour Yom HaAtsmaout, à Jérusalem, le 12 mai 2016. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (au centre) avec le vice chef d'Etat-major, Yair Golan, et le président Reuven Rivlin (à droite), pour Yom HaAtsmaout, à Jérusalem, le 12 mai 2016. (Crédit : Yonatan Sindel/Flash90)

JTA – Pour un dirigeant souvent accusé de ne pas vouloir négocier avec les Palestiniens, le Premier ministre Benjamin Netanyahu parle vraiment beaucoup de vouloir discuter avec les Palestiniens.

Dans une série de trois déclarations ce mois-ci, Netanyahu a à plusieurs reprises souligné la nécessité de la paix avec les Palestiniens. Il a dit que le processus de paix était l’une de ses priorités, et sous-entendu qu’une reprise des négociations pourrait être en cours.

Répondant à une question sur le processus de paix sur Twitter le 12 mai, pendant Yom HaAtsmaout, Netanyahu a déclaré : « il n’y a rien que je ne veuille plus ou sur lequel je suis plus actif, par plusieurs voies que vous ne connaissez pas ». Plus tard ce jour-là, s’exprimant devant les diplomates étrangers à Jérusalem, il a demandé de l’aide pour arranger une rencontre entre lui et le président de l’Autorité palestinienne (AP) Mahmoud Abbas.

« J’ai pris des mesures qu’aucun autre Premier ministre de l’histoire d’Israël n’a prises pour faire avancer la paix, a-t-il déclaré. Chaque minute où le président Abbas refuse d’accepter mon appel à la paix vole aux Palestiniens et aux Israéliens l’opportunité de vivre sans peur. »

L’engagement de Netanyahu envers un Etat palestinien, même théorique, est toujours remis en cause et divise les observateurs de la politique israélienne depuis qu’il est de nouveau Premier ministre, depuis 2009.

Ses partisans et ses détracteurs pointent différents ensembles de mesures et de déclarations qui montrent son soutien, ou son opposition, à une solution à deux états. A la suite des élections il y a 14 mois, il a rejeté la possibilité d’un Etat palestinien pendant son mandat.

Mais pendant des discussions avec les Fédérations juives d’Amérique du Nord en novembre dernier, il a déclaré qu’il « reste engagé envers une vision de deux états pour deux peuples où un Etat palestinien démilitarisé reconnait l’Etat juif, et Israël continuera à travailler pour la paix dans l’espoir que ce que l’on ne peut pas réussir aujourd’hui, on puisse le réussir demain. »

Parallèlement, Abbas a à plusieurs reprises décliné de participer à une autre série de négociations, disant qu’il ne discuterait qu’après des mesures montrant la bonne foi d’Israël. Avant la dernière série de négociations, en 2013, Israël avait libéré 82 prisonniers palestiniens avant que les deux parties ne se rencontrent. Les partisans de Netanyahu disent que la réticence d’Abbas montre que le dirigeant palestinien reste l’obstacle principal à un accord.

« Ce processus a deux côtés, et je pense que le problème central n’est pas Israël mais Abu Mazen », a déclaré Shaul Shay, ancien conseiller national adjoint à la sécurité d’Israël, en utilisant le nom de guerre d’Abbas. « Abu Mazen n’est pas prêt à conclure un accord, les choses sont donc coincées, et pas forcément à cause d’Israël. »

Abbas a préféré se tourner vers les forums internationaux, dont les Nations unies, pour reconnaitre un Etat palestinien et tenir Israël pour responsable de ce qu’il appelle des violations des lois internationales.

Plus récemment, Abbas a soutenu une initiative française pour organiser une conférence de paix israélo-palestinienne cet été, une initiative à laquelle Israël s’oppose.

L’initiative de la France n’est que l’un des trois facteurs menant Netanyahu à souligner à nouveau l’importance des négociations de paix, selon les analystes. Les autres sont la possibilité que le Parti travailliste, de centre gauche, rejoigne sa coalition, et un désir d’optimisme pour Yom HaAtsmaout.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (à gauche) avec le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas lors de la photo de famille de la COP21, la conférence des Nations unies sur le changement climatique, au Bourget , le 30 novembre 2015.(Crédit : Martin Bureau/Pool/AFP)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu (à gauche) avec le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas lors de la photo de famille de la COP21, la conférence des Nations unies sur le changement climatique, au Bourget , le 30 novembre 2015.(Crédit : Martin Bureau/Pool/AFP)

L’initiative de la France appelle à une conférence de paix régionale qui aura probablement lieu cet été. Si les négociations échouaient, la France a promis de reconnaître un Etat de Palestine, en ajoutant qu’il ne s’agit pas d’une reconnaissance « automatique ». Israël a jusqu’à présent refusé de participer, déclarant que la menace de reconnaissance d’un Etat ne donne aucune raison aux Palestiniens de négocier de bonne foi.

« La seule manière de mettre en place une paix réelle entre nous et les Palestiniens est aux moyens de négociations directes entre nous et eux, sans conditions préliminaires », a déclaré Netanyahu à son gouvernement dimanche. « Toute autre tentative ne fera qu’éloigner la paix et donnera aux Palestiniens une issue de secours. »

Netanyahu est aussi empêtré dans des négociations avec le plus grand parti d’opposition à la Knesset, le Parti travailliste, qui défend un gel des constructions dans les implantations et une reprise des négociations de paix. Des rumeurs ont couru ces derniers jours, disant que le président du parti, Isaac Herzog, est prêt à signer en échange, entre autres, du poste de ministre des Affaires étrangères. Herzog a reconnu l’existence des négociations le 12 mai sur Facebook, mais a déclaré qu’il n’était pas encore prêt à rejoindre le gouvernement.

« Si je reçois un mandat pour faire cesser la prochaine campagne de funérailles et pour bloquer le danger d’un boycott international, pour faire revenir les Etats-Unis et l’Europe dans nos alliés, pour ouvrir les négociations avec les États de la région et pour nous séparer des Palestiniens en deux États pour faire cesser la campagne incessante de terrorisme, alors je saurai que mes mains sont sur le volant », a-t-il écrit.

Les négociations de paix de Netanyahu ont pu aussi avoir été déclenchées, selon les analystes, par un besoin de donner une sorte de « discours de politique générale » pour Yom HaAtsmaout. Alors que les perspectives de paix sont faibles, a dit Shay, les relations avec les Palestiniens sont toujours d’une très grande importance.

« Pour Yom HaAtsmaout, le Premier ministre parle au peuple et évalue la situation et ce que le futur nous réserve, a dit Shay. Vous ne pouvez pas ignorer ce sujet central. »

Le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, préside une réunion du Comité exécutif de l'OLP à Ramallah, en Cisjordanie, le 1er septembre 2015. (Crédit : AFP / Abbas Momani)
Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, préside une réunion du Comité exécutif de l’OLP à Ramallah, en Cisjordanie, le 1er septembre 2015. (Crédit : AFP / Abbas Momani)

La reprise des négociations a semblé s’éloigner récemment. Une guerre brutale à Gaza a suivi l’échec des pourparlers de 2014. L’année dernière a vu la formation d’un gouvernement de droite en Israël, suivie par une vague de terrorisme qui ne commence à s’affaiblir que maintenant.

« Il voit une possibilité théorique, mais pas une possibilité pratique », a déclaré Dror Zeevi, professeur en études moyen-orientales à l’université Hébraïque, en parlant de Netanyahu. « Si tout se passe bien, il est possible qu’il soit prêt pour un accord, mais je ne pense pas que cela soit faisable dans le gouvernement actuel. »

Ceux qui soulignent que Netanyahu est sincère sur la reprise des négociations parlent de son discours de 2009 à l’université Bar-Ilan, où il s’est engagé à soutenir un Etat palestinien démilitarisé aux côtés d’Israël.

Ils notent qu’il a gelé la croissance des implantations en Cisjordanie en 2012 et libéré des prisonniers palestiniens pour reprendre les négociations en 2013 et 2014. Depuis qu’il est redevenu Premier ministre il y a sept ans, Netanyahu a appelé à plusieurs reprises à des négociations directes avec Abbas.

« Il est prêt à faire des concessions », a dit Ephraim Inbar, directeur du centre Begin – Sadat de recherche stratégique de l’université Bar-Ilan. « Tout le monde sait qu’il fera des concessions. Il était prêt à geler les implantations. Il y a des concessions qu’il ne fera pas pour des raisons sécuritaires, pour des raisons historiques, et le pays est d’accord avec lui. »

D’autres soulignent l’opposition de Netanyahu, qui a duré des dizaines d’années, à la mise en place d’un Etat palestinien avant 2009. Depuis le gel des constructions, notent-ils, Netanyahu a étendu les implantations dans toute la Cisjordanie. Et en mars 2015, deux jours avant les élections, Netanyahu avait déclaré au site d’informations israélien NRG qu’un Etat palestinien n’existerait pas tant qu’il serait Premier ministre.

Gershon Baskin, qui a assuré la communication entre le gouvernement de Netanyahu et les dirigeants palestiniens, a déclaré à JTA qu’Abbas a proposé trois fois de commencer des négociations directes secrètes avec Netanyahu. A chaque fois, selon Baskin, Netanyahu a refusé.

« L’heure n’est plus à la négociation, il faut prendre des décisions, a déclaré Baskin. [Netanyahu] ne fait rien en termes de politique pour montrer qu’une solution à deux états est ce qu’il veut. Rien sur le terrain n’indique cela. »

Mais d’autres soulignent qu’Abbas propose des « messages ambigus », comme l’institut Washington pour la politique du Proche Orient a récemment intitulé l’un de ses rapports sur le dirigeant palestinien et Israël.

« Ce n’est pas simplement qu’Abbas et l’AP ont tourné le dos à toute négociation de paix avec Israël – une position qu’ils ont maintenue depuis », se tournant vers la communauté internationale pour des communautés internationales, a écrit David Pollock, chercheur et directeur du projet Fikra de l’institut Washington. « C’est aussi qu’ils ont décidé dès lors de chercher un état indépendant pour eux sans en payer aucun prix à Israël, ni la fin des réclamations et du conflit, ni un compromis sur les réfugiés, ni un accord officiel sur tout autre sujet. En d’autres termes, leur objectif a été un territoire sans paix. »

David Keyes, porte-parole du Premier ministre, a réagi à cet article : « Il n’y a rien de vrai permettant d’affirmer que le président Abbas a proposé de commencer des négociations directes secrètes avec le Premier ministre Netanyahu. Le Premier ministre Netanayhu continue son appel au président Abbas pour une rencontre n’importe quand, n’importe où, sans conditions préliminaires. Malheureusement, le président Abbas a refusé. »

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