Netanyahu promet des allocations en pleine campagne électorale
Le Premier ministre dévoile un plan sans coordination avec le Trésor ; Mandelblit et la Banque d'Israël s'y opposent ; Gantz réclame un budget d'Etat

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a dévoilé, dimanche, un nouveau plan économique de dynamisation qui comprend des allocations en espèces qui seront versées à la majorité des citoyens malgré les objections du Procureur-général Avichai Mandelblit, qui a indiqué qu’il était illégal de lancer un tel programme en pleine campagne électorale.
Netanyahu a annoncé ce plan aux côtés du ministre des Finances Israel Katz, même s’il n’a été coordonné ni avec Katz, ni avec le ministère de la Justice. Katz est un très proche allié du chef du gouvernement et il s’est opposé de manière répétée aux responsables du Trésor.
Le Premier ministre a expliqué que son plan – qui, selon les analystes, n’a pratiquement aucune chance d’être approuvé – vise à aider les petites et moyennes entreprises ainsi que les demandeurs d’emploi à traverser les difficultés économiques entraînées par la pandémie du coronavirus.
« Nous présentons aujourd’hui un plan en neuf phases qui vise à relancer notre économie », a déclaré Netanyahu lors d’une conférence de presse, ajoutant qu’il s’attendait à ce que le cabinet et la Knesset le soutiennent.
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Le point majeur du plan concerne une proposition de versement d’une allocation d’un montant de 750 shekels à tous les adultes israéliens, avec 500 shekels pour chaque enfant pour les familles ayant jusqu’à quatre enfants et de 300 shekels pour tout enfant au-delà du quatrième. Les foyers les plus favorisés ne seraient pas éligibles à cette allocation.
Des versements similaires qui avaient concerné la majorité des foyers israéliens avaient été approuvés, l’année dernière, par le gouvernement.

Parmi d’autres propositions, des mesures incitant les entreprises à réembaucher leurs employés se trouvant depuis longtemps en congé sans solde ; une aide financière versée aux firmes dont les revenus ont été frappés par l’épidémie ; des allocations pour les personnes en situation de handicap ; un report des échéances de remboursement de prêts et l’octroi d’allocations-chômage à tous les auto-entrepreneurs, entre autres.
Netanyahu s’en est pris avec vivacité à Mandelblit pendant la conférence de presse après que le procureur-général a envoyé un courrier à Katz, la semaine dernière, dans lequel il faisait part de son opposition à des plans de dépenses majeurs dans un contexte de campagne électorale.
« Est-ce de l’économie électorale ? », a-t-il interrogé. « C’est une économie électorale, parce que cela va précisément aider les citoyens israéliens ? Peut-être le procureur-général me fera-t-il savoir aussi combien de vaccins je dois faire venir. Il est inconcevable de nuire à la santé des citoyens à cause des élections, et de ne pas leur offrir de soutien à cause des élections », s’est-il exclamé.
L’annonce du plan a eu lieu même si le gouvernement n’a pas adopté de budget pour les années 2020 et 2021. Netanyahu aurait éviter d’approuver un budget à dessein, pour empêcher la mise en œuvre d’un accord de partage de pouvoir qui aurait permis au ministre de la Défense Benny Gantz de lui succéder en tant que Premier ministre.

Gantz, à la tête du parti Kakhol lavan, a rejeté dimanche le nouveau plan du Premier ministre, évoquant une « démonstration de manipulation ».
« Le plan économique dont Israël a vraiment besoin a un nom : Un budget d’Etat dont Netanyahu et ses représentants ont empêché à tout prix l’adoption », a-t-il écrit sur Twitter.
D’autres leaders de l’opposition ont également fustigé Netanyahu. Naftali Bennett, chef de Yamina, a expliqué que le gouvernement « défaillant » avait récemment « empêché toute activité économique » et prévenu également l’approbation d’un budget de l’Etat.
« Et aujourd’hui, à la veille des élections, vous retrouvez soudainement la mémoire ? », a-t-il interrogé. « Le public sait reconnaître les fraudes et les fausses promesses ».
Avigdor Liberman, à la tête d’Yisrael Beytenu, a pour sa part évoqué « un pot-de-vin. »
« Nos enfants, nos petits-enfants et nos arrière-petits-enfants ne méritent pas de devoir composer avec ces prêts que Netanyahu intègre aujourd’hui dans sa politique de pots-de-vin électorale », a-t-il noté sur Twitter.
Un certain nombre de hauts-responsables du ministère des Finances auraient également critiqué le programme, selon la presse israélienne.
« Tout cela est politique », aurait déploré un officiel dont les propos ont été repris par le site d’information Ynet.
Alors que Netanyahu dévoilait cette nouvelle initiative, son adversaire de droite, Gideon Saar, présentait de son côté son propre projet économique pour le pays.

La formation Tikva Hadasha de Saar a fait savoir que son programme visait à stimuler la croissance, à améliorer les infrastructures, à faire baisser les chiffres du chômage, à venir en aide aux auto-entrepreneurs et à améliorer les conditions économiques dans les zones les plus défavorisées du pays, jurant de faire part en détail de son plan dans les prochains jours.
« Tikva Hadasha fera baisser le chômage qui a atteint des sommets à cause du coronavirus et encouragera le retour à l’emploi par le biais de subventions et d’allocations versées aux patrons qui réembaucheront leurs employés, et aussi aux employées eux-mêmes », a écrit Saar, un ancien ministre du Likud, dans une publication parue sur Twitter.
La Banque d’Israël a aussi critiqué l’idée de Netanyahu, affirmant qu’il « manque beaucoup de détails » et de données. La Banque d’Israël affirme que le manque de détails rend impossible l’élaboration d’une évaluation professionnelle de son coût, de sa nécessité et de son efficacité, et qu’elle a demandé des informations complémentaires au Trésor et à d’autres organismes.
La révélation de ce plan économique survient en amont des élections du 23 mars, qui seront le quatrième scrutin organisé au sein de l’Etat juif en l’espace de deux ans. Les sondages suggèrent que le Likud de Netanyahu devrait facilement obtenir le meilleur résultat à la Knesset mais qu’il aurait des difficultés à former un gouvernement. Toutefois, il est aussi difficile de dire si les opposants au Premier ministre sauront dépasser ce qui les sépare pour rassembler une majorité sans lui.