Plus d’un million de juifs poseront leurs téléphones ce Shabbat
Encourager les gens à se déconnecter, à se promener et à partager un repas avec des amis, c'est l'initiative du Shabbat Project qui se déroulera dans 1 400 villes de 98 pays
Cette semaine, plus d’un million de juifs à travers le monde feront une pause dans leur vie moderne bien remplie pour allumer des bougies, chanter et/ou savourer des repas communautaires sous les auspices du Shabbat Project (le projet Shabbat). L’initiative annuelle veut amener les juifs à célébrer la journée du repos prévue par le calendrier juif en se déconnectant le temps d’une journée et en renonçant à certaines activités proscrites par la Torah.
Le projet a été lancé par le grand rabbin d’Afrique du Sud Warren Goldstein en 2013, a rapidement fait boule de neige, et est devenu un succès. Cette année, le Shabbat Project, qui commence le vendredi 26 octobre au coucher du soleil et dure 25 heures, jusqu’à la fin de la journée de repos juive, fédérera des participants dans plus de 1 400 villes de 98 pays dans le monde.
Le grand rabbin Goldstein, qui est orthodoxe, a déclaré que l’un de ses principaux objectifs lors de la création du programme était celui de réunir tous les groupes de juifs – comme en témoigne le slogan de ce projet : “Keeping it Together” (Garder [le Shabbat] ensemble).
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« Nous avons tant d’étiquettes et de caractéristiques qui nous séparent les uns des autres. Le Shabbat Project vise l’unité des juifs. C’est un message très fort », a-t-il déclaré.
Les événements proposés par les communautés locales sont variés. Dans le cadre d’une initiative « Radical Hospitality », les Juifs de San Diego ont organisé plus de 1 000 repas de Shabbat chez des particuliers dans toute la région. Dix villes des États-Unis organiseront des « Pink Challah Bakes » à l’occasion du mois de la sensibilisation au cancer du sein. Un bar à Grenoble, dans le sud-est de la France, est en train de préparer une soirée de théâtre d’improvisation sur le thème du Shabbat.
Selon Goldstein, le projet s’adresse aux juifs de tous niveaux d’observance.
« Le Shabbat Project a deux dimensions », explique Goldstein. « Les événements – les ‘challah bakes’, les soirées havdalah, les repas de Shabbat – tous les différents aspects de la célébration. C’est une partie importante du projet. »
Mais, ajoute-t-il, il y a aussi « l’aspect de la famille ou de l’individu – qui qu’il soit – qui garde le Shabbat, et le fait de le faire d’une manière qui les aide à reprendre contact avec eux-mêmes ».
Alors que Goldstein cite l’unité juive comme l’un des facteurs de motivation du Shabbat Project, il y a un plus gros enjeu potentiel. Selon le midrash (Shemoth Rabbah, 25:12), « Rabbi Levi dit : ‘Si tout Israël n’observait correctement le Shabbat qu’une seule fois, cela ferait venir le [messie] fils de David, car il équivaut à tous les commandements.' »
Le chanteur juif Mordechai ben David a même dédié une chanson à ce midrash, intitulée justement « Just One Shabbos (And We’ll All Be Free) » [Un seul Shabbat (et nous serons tous libres)].
Tous liés
Le dynamisme juif d’Afrique du Sud a sans aucun doute façonné l’approche unitaire du projet.
Les juifs de tous les horizons sont liés par des valeurs aussi bien ancestrales que pro-israéliennes, a fait observer Goldstein, ajoutant que le mouvement des libéraux y est « relativement peu développé » mais entretient « de bonnes relations » avec les orthodoxes.
« Ce qui est étonnant dans la communauté juive sud-africaine, c’est que des juifs de différents niveaux d’observance se lient les uns aux autres, sont amis et font partie de la même famille. Il y a un énorme esprit d’inclusion, d’intégration et sans jugement », a déclaré M. Goldstein.
« Tout le travail que je fais dans le cadre de mon engagement avec le gouvernement sud-africain et dans la société sud-africaine, je le fais au nom de tous les juifs d’Afrique du Sud, quels qu’ils soient et d’où qu’ils viennent », a déclaré Goldstein.
Goldstein a du pain sur la planche pour représenter la communauté juive locale. L’Afrique du Sud est l’un des pays les plus critiques d’Israël en dehors du monde islamique, et le parti au pouvoir, l’African National Council (ANC), a décidé l’année dernière de demander au gouvernement de déclasser son ambassade en Israël.
L’ANC a également exprimé par le passé son soutien au mouvement de boycott, de désinvestissement et de sanctions (BDS), notamment en réclamant en 2014 une interdiction par tous les partis de se rendre en Israël.
Néanmoins, a précisé M. Goldstein, la communauté juive est libre d’exprimer sa position pro-israélienne sans crainte de représailles.
« C’est une démocratie ouverte et libre – vous pouvez exprimer ce que vous voulez. La communauté juive est donc libre d’exprimer ses opinions sur Israël, ce que nous faisons à maintes reprises », a ajouté M. Goldstein.
« Il est de notoriété publique que les relations entre Israël et l’Afrique du Sud ont été difficiles, mais il est également important de garder à l’esprit le point de vue du gouvernement sud-africain en général et pas seulement celui de l’ANC. »
« Il y a un grand nombre d’églises en Afrique du Sud qui soutiennent ouvertement Israël, représentant des millions et des millions de Sud-Africains », a-t-il dit, notamment la Zionist Christian Church [Eglise chrétienne sioniste] – la plus grande Eglise en Afrique du Sud – qui a envoyé une délégation en Israël au début de cette année.
Le grand rabbin Goldstein a déclaré que la communauté juive sud-africaine et d’autres partisans d’Israël travaillaient beaucoup sur le terrain pour lutter contre les « distorsions insidieuses et fausses » du BDS. L’un des principaux objectifs stratégiques du judaïsme mondial aujourd’hui est de faire en sorte que le BDS soit « rapidement et complètement vaincu ».
Le grand rabbin a cité une multitude d’organisations étudiantes juives florissantes, dont l’Union sud-africaine des étudiants juifs (South African Union of Jewish Students – SAUJS), qui a beaucoup fait pour combattre le BDS sur les campus. Il a affirmé que l’atmosphère sur les campus à l’égard d’Israël est comparable à celle qui règne n’importe où ailleurs dans le monde.
« L’Afrique du Sud a une très profonde tradition de respect des droits de l’Homme. La devise du pays est ‘L’unité dans la diversité’, ce qui signifie que l’accent est mis sur le respect des opinions de chacun, c’est la raison pour laquelle l’Afrique du Sud affiche un des taux d’antisémitisme les plus bas du monde », a ajouté Goldstein.
Interrogé sur l’élargissement du fossé religieux et politique entre Israël et la Diaspora, et sur le fait que les juifs de la Diaspora s’identifient de moins en moins à l’État juif, Goldstein a déclaré que sa communauté n’était dans une large mesure pas affectée par ce phénomène.
« La communauté ici est très liée à Israël », a-t-il dit. « Je ne perçois aucun sentiment d’éloignement ou de distance. Traditionnellement, les juifs d’Afrique du Sud ont toujours été très sionistes. Ils sont nombreux à se rendre en Israël, et les taux d’alyah sont bons, et en augmentation. »
Ce sentiment de proximité est peut-être renforcé par le fait que les cérémonies religieuses telles que les conversions, les mariages et les divorces célébrés en Afrique du Sud sont pour la plupart reconnus par Israël sans trop de difficultés.
Invité à expliquer pourquoi les juifs d’Afrique du Sud sont relativement bien lotis par rapport aux autres communautés de la Diaspora, Goldstein a expliqué que c’est probablement parce que ces pratiques concernant la vie quotidienne sont souvent effectuées par le tribunal rabbinique local qui a « une réputation internationale exceptionnelle et un niveau halakhique très élevé ».
En fait, Goldstein est moins préoccupé par les relations entre Israël et la Diaspora que par l’impact positif du Shabbat Project sur la population en Israël même.
Soulignant que plus de 300 villes de l’Etat juif participent cette semaine au Shabbat Project, Goldstein a déclaré que des initiatives comme celle-ci vont à l’encontre de l’idée commune selon laquelle la société israélienne est profondément divisée sur le plan religieux.
« Le projet réunit les différentes composantes de la société israélienne qui, oui, sont parfois divisées », a dit M. Goldstein. « Mais cela prouve qu’il y a matière à opérer des rapprochements et à construire des ponts, il y a tellement de bonne volonté avec laquelle on peut travailler. »
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