Arte a-t-elle censuré un docu sur l’antisémitisme qu’elle avait elle-même financé ?
Le film de 90mn, qui met en lumière les différentes manifestations de l'antisémitisme et de l'antisionisme en Europe, a été refusé par le directeur des programmes de la chaîne
La chaîne franco-allemande a-t-elle eu peur des répercussions d’un documentaire qu’elle avait elle-même commandé et financé ?
Le film de 90mn intitulé “Un peuple élu et mis à part : l’antisémitisme en Europe” réalisé par les documentaristes allemands Joachim Schroeder et Sophie Hafner a finalement été interdit de diffusion le 26 avril dernier, par Alain Le Diberdier le directeur des programmes d’Arte.
Plus qu’en France, cette décision a créé la polémique en Allemagne. « Des historiens allemands, comme Götz Aly ou Michael Wolffsohn, sont intervenus dans les médias pour prendre sa défense, dénonçant ‘la censure’ exercée par la chaîne franco-allemande, » explique Le Monde qui a consacré une enquête sur le sujet.
Ce documentaire remet en lumière les manifestations d’antisémitisme présents dans le monde musulman des banlieues, et dans les rangs de l’extrême-droite, en France et en Allemagne.
Alain Le Dibernier dit avoir refusé la diffusion pour des raisons formelles. Certes, il le considère comme un “brûlot”, dit-il au Monde, “mais la n’est pas la question. Nous n’avons jamais eu peur de diffuser des films à thèse”. Selon lui, les réalisateurs n’ont pas respecté les procédures.
“Je pense qu’ils n’ont pas apprécié que nous dressions la liste des actes antisémites et anti-sionistes commis en France depuis 2006,” explique Joachim Shroeder au quotidien du soir.
Mettre en évidence les relations entre anti-sionisme et antisémitisme est justement l’un des angles d’attaques du film, pour lequel les réalisateurs se sont rendus en Israël et à Gaza “pour examiner les récits antisémites les plus communs”.
La réalisation de ce film a suscité de nombreuses discussions dans les couloirs de la chaîne franco-allemande.
“Il faut que vous compreniez que le sujet est très délicat, lui dit un jour Marco Nassivera, le directeur de l’information d’Arte. Nous sommes coincés entre les lobbys juifs et musulmans. C’est la raison pour laquelle la conclusion de ce documentaire doit rester indéterminée”.
Ou comment, par l’entremise d’une polémique on entrevoit les coulisses de l’information, et les secrets de la représentation du Proche-Orient sur les chaînes européennes.