Avant les festivals d’été, un nouveau réseau pro-israélien veille en Ecosse
Des Israéliens se sont heurtés à un mur de manifestants pro-palestiniens au Festival Fringe d'Édimbourg l'été dernier. Cette année, une nouvelle confédération d'Amis d’Israël monte la garde

LONDRES – Ce mois-ci un groupe de militants pro-israéliens s’est assis pendant des heures dans une chambre étouffante de Glasgow, qui abrite la plus grande communauté juive d’Ecosse.
La plupart des militants, qui planifient une conférence dans la ville qui se tiendra le 20 août, sont des non-Juifs plutôt enthousiastes.
Dirigés par Nigel Goodrich, un ancien prédicateur laïc de l’Église libre d’Écosse, ils ont mis en place un réseau de groupes d’Amis d’Israël et l’Ecosse, longtemps radiée comme infréquentable pour la communauté pro-Israël, pourrait connaître une renaissance.
Ils sont sept à ce jour : Glasgow, Edimbourg, Aberdeen, Ecosse du nord-est, Grampian, les Highlands, et, avec une délicieuse ironie, Dumfries et Galloway – ce dernier toponyme étant aussi le nom de famille du plus infâme militant anti-Israël de Grande-Bretagne, George Galloway.
Au moins deux autres groupes sont prévus, l’un dans la vallée de Forth et un autre dans les Borders.
Quand le premier groupe à Edimbourg a été formé en mars, 220 personnes sont venues ; en mai dernier, à Glasgow, seulement 120, mais les organisateurs soutiennent que beaucoup plus étaient intéressés. Une conférence des Amis d’Israël de Highland est prévue pour le 19 septembre et les rues d’Inverness seront prises d’assaut par des stands pro-israéliens.
Goodrich, la voix douce et plein d’humour, dit que l’appétit pour des Amis pour Israël est extraordinaire.

« Nous avons réuni des gens qui se soucient d’Israël pour une variété de raisons différentes ». Beaucoup d’entre eux, croit-il, sont des chrétiens frustrés par l’attitude du leadership de leur église. « Par exemple, l’Eglise d’Écosse ne soutient pas Israël. »
C’est un euphémisme. L’Eglise d’Ecosse a publié un rapport controversé en 2013 qui remettait en question le droit divin des Juifs en Terre d’Israël, et les résolutions de l’an passé ont été de nouveau déposées, demandant à l’Eglise d’imposer des mesures de BDS contre Israël.
Maintenant, regroupés sous la Confédération des Amis d’Israël en Ecosse, les troupes de Goodrich sont dans les rues semaine après semaine, défiant les perceptions. Et ils reçoivent d’ores et déjà des commentaires intéressants.
« Ce sont généralement des gens qui nous disent qu’ils sont malades d’entendre parler des Palestiniens tout le temps », déclare la présidente des Amis d’Edimbourg, Dorothé Kaufmann.
Chaque fois que son groupe met en place un stand ou distribue des tracts, elle dit que les gens « ne peuvent croire qu’Israël est un Etat d’apartheid, mais ils disent qu’ils ne reçoivent aucun autre message – de sorte qu’ils sont très heureux de lire notre matériel. »
« Nous avons quatre objectifs », dit Goodrich. « Nous voulons participer au processus politique, localement et nationalement ; nous travaillons sur la sensibilisation de la population, avec nos stands de rue, mais nous avons aussi organisé des conférences, des soirées-cinéma, et même des séances de dégustation où nous offrons la nourriture israélienne. »
« Nous voulons atteindre, autant que possible, les chrétiens dans les églises et appeler à leur soutien ; et nous voulons aussi attirer des étudiants et des jeunes, et leur offrir un soutien et une formation sur la meilleure façon de plaider en faveur d’Israël », explique Goodrich.
L’impact des groupes d’Amis ne peut encore être mesuré pleinement, mais Goodrich est convaincu que « très lentement, mais certainement, nous changeons le narratif ici ».
« Nous disons aux gens que nous sommes pro-Israël, pro-palestiniens et pro-paix. La Campagne de solidarité pour la Palestine (PSC) n’a pas grand-chose à répondre à cela », dit-il.
Il y a d’autres signes de changement dans le Festival annuel d’Edinburgh et le programme Fringe qui attire des milliers de visiteurs internationaux en Ecosse chaque été.

Edimbourg est devenu un autre terme pour politisation du conflit israélo-palestinien, atteignant son paroxysme l’été dernier lorsque le théâtre Underbelly a dû annuler des représentations de la troupe israélienne Incubator, en raison de protestations du PSC. Il a été estimé que les manifestations ont affecté au moins 15 autres lieux aux alentours d’Underbelly.
Une grande partie de la colère des manifestants, descendus dans les rues tandis que la violence faisait rage à Gaza, était dirigée contre Incubator, qui avait reçu de l’argent du gouvernement israélien pour amener la production à Edimbourg.
Le directeur de la compagnie de théâtre, Arik Eshet, a déclaré au Guardian en 2014 que le gouvernement israélien « finance de l’art pour de l’art. Il peut être opposé au gouvernement, mais nous ne sommes pas censurés. Chaque groupe qui vient au Fringe d’autres pays est incapable de venir sans l’aide du gouvernement. »
Eshet ajoute, sombrement : « Le Fringe est connu pour accepter tout le monde, comme un lieu de liberté de discours et de liberté d’expression. Je pense que le festival perd du terrain devant ceux qui crient plus fort. »
Le Festival et le Fringe de cette année sont très différents et il semble y avoir très peu d’événements au Moyen-Orient liés cette année à une performance du pianiste américano-israélien, Yefim Bronfman, et à un stand-up intitulé Free Gaza! de quatre comédiens réputés sur le circuit britannique, dont le comédien juif Ivor Dembina.
Et puis il y a la pièce comique « 5 Kilos de sucre », apportée à Edimbourg par le Tik-sho-ret Theatre Company, basé à Londres.
Écrite par Gur Koren, la pièce est jouée à Tel-Aviv, mais la société n’a pas demandé de financement auprès de sources officielles israéliennes. Au lieu de cela, elle est soutenue par deux organismes de bienfaisance juifs, le Andrew Balint Charitable Trust et le Shoresh Charitable Trust.
Ariella Eshed, metteur en scène et traductrice de la pièce, reconnaît que la fureur de l’été dernier a eu un effet sur sa décision contre la quête de financement auprès du gouvernement.
« Les manifestants en ont fait la raison ‘officielle’ [de la perturbation de la pièce d’Incubator] il sera donc intéressant de voir s’ils maintiennent leur argument », dit Eshed.
Les acteurs de Tik-sho-ret, deux Israéliens et deux Britanniques, sont basés à Londres. « Nous avons été énormément aidés par les Amis d’Israël d’Edimbourg, qui sont entrés en contact avec nous quand ils ont entendu que nous venions et ont beaucoup aidé, avec la publicité. Certains d’entre eux ont déjà acheté des billets et savoir qu’il y a des gens là-bas qui aiment ce que nous faisons est vraiment très réconfortant », dit Eshed.
Les pièces ont été écrites en réaction à l’annulation de l’année dernière d’événements culturels – y compris le Festival du Film Juif au Tricycle Theatre de Londres – et un spectacle anti-esclavagiste controversé à Barbican, « Exhibit B », qui a dû être annulée en raison de problèmes de sécurité. Les attaques contre Charlie Hebdo jettent une ombre, également.
« Tout au long de ce processus, je me suis véritablement sentie comme si je marchais sur une corde raide. Des questions angoissantes sont restées sans réponse : dois-je censurer une pièce sur la censure de l’art si elle est offensante ? Comment puis-je m’assurer que nous obtiendrons un ensemble équilibré d’opinions ? Est-il possible de prendre une position neutre en présentant ces pièces explosives ? Comment puis-je faire durer le débat, en évitant un retour de bâton ? Comment puis-je assurer que je ne cause de difficultés à personne, y compris à moi-même ?’, dit la directrice de Walking the Tightrope, Cressida Brown.
« Le fait que la question de la liberté d’expression semble si compliquée à négocier en ce moment est exactement la raison pour laquelle je pense que nous devrions la soulever », poursuit Brown.
Un des contributeurs est Caryl Churchill, un patron du PSC, dont la pièce de 2009 « Sept enfants juifs », a indigné plus d’un dans la communauté juive.
Il a même été traité d’antisémite par le critique de théâtre du Jewish Chronicle, John Nathan. Cette fois, Churchill propose une courte pièce de théâtre intitulée « Les billets sont maintenant en vente », qui, dit-elle, examine la relation entre la politique et l’art en démontrant l’effet du parrainage sur le contenu artistique.
Après la représentation des huit pièces de théâtre – du 5 au 31 août au Underbelly à Edimbourg – des séances de questions-réponses sont prévues avec des experts invités, y compris des journalistes, des universitaires, des personnes reliées aux arts – et même des diplomates.
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