Bennett lance un appel au public pour aider à sauver le gouvernement qui vacille
Le Premier ministre a publié une lettre ouverte à la "majorité sioniste silencieuse" d'Israël ; le pays doit choisir entre aller de l'avant ou "sombrer à nouveau dans le chaos"
Le Premier ministre Naftali Bennett a publié vendredi une lettre ouverte au public israélien, appelant à un soutien pour maintenir la coalition vacillante sur ses pieds, dans l’intérêt de la stabilité politique et du bon fonctionnement du gouvernement.
Cette missive inhabituelle, envoyée à l’occasion du premier anniversaire de la mise en place du gouvernement, intervient alors que ce dernier est passé d’une crise à l’autre depuis qu’il a perdu sa majorité parlementaire au début du mois d’avril, et semble se diriger vers son effondrement.
La lettre souligne les craintes de Bennett d’un effondrement, alors que le spectre de nouvelles élections et un défi lancé par le leader de l’opposition Benjamin Netanyahu se profilent à l’horizon.
Bennett a présenté sa coalition comme ayant apporté la stabilité politique à Israël lorsqu’elle a pris le pouvoir en juin dernier après une série sans précédent d’élections non concluantes. Le Premier ministre a supplié le public de l’aider à maintenir cette stabilité et a décrié la politique acrimonieuse d’Israël et les attaques de l’opposition.
« Il y a environ un an, l’État d’Israël a connu l’un des moments les plus difficiles qu’il ait jamais connus », a écrit Bennett.
« Chaos, tournoiement électoral sans fin, paralysie du gouvernement, les villes de Lod et d’Akko qui brûlent face à un gouvernement humilié et en conflit », a-t-il ajouté, faisant référence aux émeutes dans les villes arabo-juives pendant la guerre de l’année dernière contre les groupes terroristes de Gaza.
Israël a fait preuve d’une « terrible faiblesse face à un ennemi meurtrier qui a tiré des roquettes sur Jérusalem », a-t-il ajouté, et a été piégé par « le culte d’un seul homme et l’asservissement de l’énergie de l’État à ses besoins juridiques », en référence au chef de l’opposition et Premier ministre de l’époque, Benjamin Netanyahu, et à son procès pour corruption.
Bennett a déclaré qu’il avait bricolé sa coalition l’année dernière – à partir d’une entente de partis de droite, du centre et de gauche ainsi que de la faction islamiste Raam – pour sauver le pays, malgré les critiques sévères d’autres partis de droite.
« Nous étions à quelques jours d’un cinquième cycle électoral qui aurait fait voler le pays en éclats, et j’ai alors pris l’une des décisions les plus difficiles et les plus sionistes de ma vie : établir un gouvernement pour sauver Israël du chaos et le faire fonctionner à nouveau. Se rapprocher de personnes ayant des opinions différentes des miennes pour sauver le pays », a-t-il écrit.
Bennett a déclaré qu’il savait à l’époque qu’un puissant « serpent à venin » se retournerait contre lui, mais il s’est associé aux différents partis pour « défendre l’État d’Israël ».
Netanyahu et l’opposition qu’il dirige n’ont cessé de critiquer le gouvernement de Bennett pour avoir travaillé avec Raam, affirmant que le parti islamiste soutient le terrorisme – bien que Netanyahu lui-même aurait cherché à s’allier avec Raam avant la formation du gouvernement actuel.
« Avec mes collègues du gouvernement, nous avons ramené Israël à un niveau de fonctionnalité et de croissance », a déclaré Bennett, ajoutant qu’Israël se trouvait à nouveau à un « carrefour historique ».
« Aller de l’avant avec un État qui fonctionne, ou sombrer à nouveau dans le chaos, la haine interne, la faiblesse externe et l’asservissement de l’État aux besoins d’un seul homme », a déclaré Bennet, faisant à nouveau référence à Netanyahu.
Bennet a déploré « qu’il n’y ait actuellement qu’un seul camp sur le terrain – un serpent à venin bruyant et mortel » que représentent les législateurs de l’opposition tels que Netanyahu, Itamar Ben Gvir, Ayman Odeh et Bezalel Smotrich. « Ils suscitent la violence, l’extorsion et les ‘fake news‘, tandis que la majorité silencieuse est heureuse d’avoir un gouvernement calme et qui fonctionne. »
« Si nous ne voulons pas reculer, nous devons tous agir. Cette lettre est un appel à l’action », a déclaré Bennett.
En réponse à la lettre du Premier ministre, le Likud, parti de Netanyahu, a déclaré : « Les mensonges de Bennett ne peuvent pas couvrir le fait qu’il a cédé le contrôle du pays à Mansour Abbas [du Raam], Ahmad Tibi [de la Liste arabe unie de l’opposition] et leurs amis qui soutiennent le terrorisme. »
« Les prix de l’essence, de la nourriture et du logement battent des records alors que Bennett et [le ministre des Affaires étrangères Yair] Lapid ne font rien », a-t-il déclaré.
Le parti a promis de « tout faire pour faire tomber ce gouvernement de faiblesse et d’échec ».
Le parti d’extrême droite du Sionisme religieux a également attaqué Bennett au sujet de la lettre.
« Même un mensonge que vous répétez des milliers de fois sur des dizaines de pages ne deviendra pas une vérité », a déclaré Bezalel Smotrich, deputé du Parti sionisme religieux.
Il a également affirmé que Bennett avait empêché la formation d’un gouvernement de droite en cherchant à faire équipe avec « la gauche radicale et les partisans de la terreur antisioniste pour devenir Premier ministre à tout prix » après les élections de l’année dernière.
Alors que le parti Yamina de Bennett s’était alors déclaré ouvert à l’idée de rejoindre un gouvernement dirigé par Netanyahu, le refus de Smotrich de coopérer avec Raam a contribué à priver l’ancien Premier ministre d’une majorité.
« Bennett a trompé, triché et menti depuis le début et il continue à le faire dans cette lettre », a accusé Smotrich.
Parallèlement à la lettre, le Premier ministre a publié un montage vidéo montrant des législateurs de l’opposition lançant des attaques cinglantes contre le gouvernement, des échauffourées avec la police, des militants de droite brûlant des images des dirigeants de la coalition et traitant les gauchistes de « traîtres » méritant la peine de mort, ainsi que des reportages sur des menaces de mort.
Il a également publié une brochure numérique portant son nom, adressée à la « majorité sioniste silencieuse », qui compare l’État d’Israël aux anciens royaumes d’Israël qui ont été détruits lors de conflits internes.
Cette brochure justifie la mise en place du gouvernement et son maintien, en soulignant ses réalisations, notamment l’adoption du budget et la croissance économique.
La brochure se termine par un appel au public à « ne pas nous laisser seuls dans l’arène. Faites entendre votre voix ».
« Diffusez notre message – à savoir que des personnes décentes, aux opinions différentes, qui aiment le pays, peuvent s’asseoir ensemble et agir pour le bien du pays », a-t-il écrit. Il a ajouté que les partisans du gouvernement devraient partager la lettre, organiser des manifestations, passer des appels et se porter volontaires.
« Nous n’avons pas d’autre pays, nous n’abandonnerons donc jamais », a-t-il déclaré.
La coalition de Bennett a perdu sa majorité parlementaire lorsque Idit Silman, membre de son parti Yamina, a quitté le gouvernement début avril. Depuis lors, la coalition est sur la corde raide, la dernière crise en date étant liée à la lutte qu’elle mène pour rassembler suffisamment de soutien afin de faire passer un texte de loi clé visant à renouveler l’extension de la loi israélienne aux Israéliens vivant en Cisjordanie.
Un sondage réalisé la semaine dernière a montré que l’opposition de Netanyahu gagnait du terrain auprès des électeurs et se rapprochait de la possibilité d’obtenir une majorité à la Knesset.
La Douzième chaîne a avancé que le bloc de Netanyahu remporterait 59 sièges si les élections avaient lieu aujourd’hui, ce qui le rapprocherait d’une majorité à la Knesset, qui compte 120 sièges, mais qui laisse présager une nouvelle impasse politique si le gouvernement s’effondre. Israël a connu quatre élections exténuantes depuis 2019, les blocs opposés luttant pour former une majorité solide à la Knesset.
L’enquête a également révélé que la plupart des Israéliens pensaient que le gouvernement actuel s’effondrerait dans les six mois et que plus d’Israéliens soutenaient Netanyahu pour le poste de Premier ministre que tout autre candidat.