Démissions au sein du contrôle de l’État autour des frais légaux de Netanyahu
Trois membres du contrôle de l'État sur le départ après que le nouveau contrôleur de l'État leur a reproché d'avoir demandé au Premier ministre de rendre les fonds non autorisés
Trois membres du bureau du contrôleur de l’État ont démissionné jeudi autour d’un désaccord portant sur leur appel à ce que le Premier ministre Benjamin Netanyahu rende les centaines de milliers de shekels que son cousin lui a donnés pour payer sa défense.
En juin dernier, le comité des autorisations a en effet ordonné à Netanyahu de rendre quelque 300 000 dollars à l’homme d’affaires américain Nathan Milikowsky, la troisième demande du Premier ministre d’être autorisé à bénéficier d’aides financières pour ses frais de justice ayant été refusé.
Ce panel est chargé de superviser les finances des fonctionnaires de l’État pour éviter tout risque de conflit d’intérêts. Il a expliqué son rejet de la demande de Netanyahu en avançant qu’il était inapproprié que des bienfaiteurs étrangers — le comité a également refusé que l’homme d’affaires Spencer Partridge finance les frais du chef du gouvernement — participent financièrement à la défense du Premier ministre pour une affaire judiciaire dans laquelle il est soupçonné d’avoir justement accepté des cadeaux de riches bienfaiteurs en Israël et à l’étranger, la fameuse Affaire 1 000.
Il a également estimé qu’une telle aide ne devait être sollicitée que si un fonctionnaire de l’État en avait besoin. Quand il a demandé à l’intéressé de soumettre une évaluation de sa fortune, celui-ci a refusé.
Le travail du comité a désormais pratiquement pris fin avec la nomination d’un nouveau contrôleur de l’État, Matanyahu Englman, un candidat au poste soutenu par Netanyahu et élu par la Knesset il y a quelques mois.
Cette semaine, La Treizième chaîne a rapporté qu’une réunion avait eu lieu le mois dernier entre Englman et les membres du panel. Au cours de celle-ci, le contrôleur s’en est vivement pris à eux verbalement, qualifiant leur appel à Netanyahu à rendre l’argent à Milikowsky d’outrepassement de l’autorité du comité.
« Votre travail est de décider d’autoriser ou non, rien de plus. Ne dirigez pas mon bureau », a ainsi été cité Englman par La Treizième chaîne.
La démission de ces trois membres, le juge à la retraite Ezra Kama et les avocats Nurit Israeli et Avigdor Ravid, constitue principalement un acte de protestation, leur mandat de deux ans devant prendre fin à la fin du mois prochain.
Leurs remplaçants seront désignés par Englman.
Le président du comité, le juge à la retraite Shalom Brenner, n’a pas quitté ses fonctions. Son mandat doit lui aussi prendre fin en septembre.
La saga Netanyahu a déjà provoqué le départ d’un ancien président du comité, l’ancien juge Oni Habash, nommé en 2012. Il a en effet quitté son poste en mars pour protester contre ce qu’il a qualifié de « pression politique » dont le comité faisait l’objet autour de la même question.
Netanyahu a sollicité ces soutiens financiers pour l’affaire 1 000 dans laquelle il est accusé de fraude et d’abus de confiance. Il est également visé par des accusations dans d’autres enquêtes, les affaires 2 000 et 4 000. Le procureur général Avichai Mandelblit a laissé entendre qu’il pourrait être inculpé pour corruption dans l’affaire 4 000.
Mandelblit a fait part de son intention de mettre en examen Netanyahu, selon les résultats d’une audience préliminaire.
Netanyahu dément tous les charges retenues contre lui dans les trois affaires et accuse les médias et les magistrats militants de se livrer à une chasse aux sorcières contre lui.
Ce dernier conflit au sein du contrôle de l’État met en exergue ce que de nombreux observateurs et officiels de longue date du bureau qualifient de changement radical dans ses fonctions depuis l’arrivée d’Englman.
Le mois dernier, Haaretz rapportait qu’Englman comptait réduire les effectifs chargés d’enquêter sur les cas de corruption et se concentrer sur son rôle plus traditionnel et moins controversé de critique interne policé de la bureaucratie étatique.
Ces nouveaux projets comprennent la fermeture complète du département en question ainsi que l’introduction de commentaires positifs dans les rapports sur les organismes publics.
Englman, comptable de formation et ancien directeur éducatif du prestigieux Technion et responsable du Conseil de l’enseignement supérieur, a été intronisé le 1er juillet dernier. Il est le premier contrôleur de l’État depuis trois décennies à ne pas être un ancien juge.
Il a pris la succession de Micha Lindenstrauss et Yosef Shapira, qui ont fait du poste un organe clé de surveillance de la corruption — s’attirant les louanges d’ONG, mais également les critiques de certains responsables politiques et officiels dénonçant l’extension du rôle du bureau.
Ce dernier, qui est également l’organe gouvernemental chargé d’étudier les plaintes de la population, sert sous l’égide de la Knesset et est habilité à examiner toutes les agences gouvernementales, même les plus secrètes. Du fait notamment du travail de Lindenstrauss, le bureau a considérablement développé son rôle de supervision, les rapports de ses centaines de magistrats et comptables ayant donné lieu à des changements de politique et administratifs.
L’accent mis par Lindenstrauss sur les problèmes de corruption lui a valu les critiques de certains qui estiment qu’il a outrepassé ses fonctions, car le rôle du contrôleur n’est pas de faire office de service d’enquête criminelle. Ses détracteurs l’ont également accusé de fuites dans les médias sur les enquêtes pour corruption.
Mais d’autres l’ont applaudi pour ses enquêtes, et pour sa connaissance des médias, estimant que sous son mandat, le contrôle de l’État a permis de décourager efficacement les vélleités de corruption des fonctionnaires.
Englman fait partie des détracteurs de Lindenstrauss. Lors d’une interview récente accordée à Israel Hayom, il appelait à une critique « plus respectueuse » des organes d’État.
« Le contrôleur est chargé de critiquer, pas de faire appliquer la loi », a-t-il dit. « Le défi central de ce poste est de coopérer avec les organes audités. Les inspections ne doivent pas seulement désigner les manquements, mais également d’encourager l’excellence et la bonne gouvernance. Il faut le faire en veillant à ce que les examens soient respectueux des agences qu’on critique et en protégeant leur capacité à prendre des décisions…. Les critiques doivent reposer sur le respect, un élément de la boîte à outil d’un manager ».