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En Syrie, la guerre entre dans sa dixième année sans issue en vue

Appuyé par la Russie, l'Iran et le Hezbollah, le régime d'Assad a repris plus de 70% du territoire, où un principal front demeure: la région d'Idleb, ultime grand bastion jihadiste

Le président syrien Bashar el-Assad visitant ses troupes (Crédit : AFP)
Le président syrien Bashar el-Assad visitant ses troupes (Crédit : AFP)

La Syrie entre dans sa dixième année d’une guerre dévastatrice, sans issue en vue pour ce pays devenu un terrain d’affrontements des grandes puissances, où les civils continuent de payer le plus lourd tribut.

Jamais les Syriens, descendus dans la rue en mars 2011 pour réclamer démocratie et liberté, n’auraient imaginé que leur « révolution » se transformerait en un conflit qui a fait plus de 380 000 morts.

Quant au président Bachar al-Assad, neuf ans après, il semble plus que jamais indéboulonnable.

Appuyé par la Russie, l’Iran et le groupe terroriste du Hezbollah libanais, son régime a repris plus de 70 % du territoire, où un principal front demeure : la région d’Idleb, dans le nord-ouest, qui représente l’ultime grand bastion jihadiste et rebelle.

La guerre a laminé l’économie et rasé des dizaines de villes, provoquant l’exode de plus de 11 millions de personnes : des déplacés ou des réfugiés se pressant parfois aux frontières de l’Europe.

Les réfugiés syriens, bloqués entre les frontières jordaniennes et syriennes, qui attendent pour traverser en Jordanie, au passage de la frontière de Hadalat, à l’est de la capitale jordanienne Amman, le 14 janvier 2016 (Crédit : AFP / KHALIL Mazraani)

Il s’agit de la plus grande vague de déplacements au monde depuis la seconde guerre mondiale.

Et le pays reste l’échiquier où s’affrontent des puissances internationales et régionales, notamment la Russie et les Etats-Unis ou la Turquie, Israël et l’Iran.

« Ce n’est pas un simple conflit international », résume l’analyste Fabrice Balanche.

« Destruction et exil »

En mars 2011, c’est dans la ville de Deraa (sud) que l’étincelle de la révolte s’est allumée.

Une quinzaine d’adolescents, inspirés par le Printemps arabe en Tunisie et en Egypte, ont écrit sur les murs de leur école des slogans anti-Assad.

Le mouvement s’est étendu mais avec la répression, des factions rebelles ont vu le jour, financées et armées par certains pays du Golfe et soutenus par les Occidentaux. Le conflit s’est complexifié avec la montée en puissance des jihadistes, notamment du groupe Etat islamique (EI).

Des années d’offensives ont mis en déroute cette organisation, qui a fait régner la terreur au Moyen-Orient et mené des attentats sanglants en Europe.

Photo prise le 13 janvier 2020 lors d’une tournée de presse organisée par la coalition dirigée par les Etats-Unis pour lutter contre les restes du groupe de l’Etat islamique, montre une vue des dommages à la base aérienne militaire d’Ain al-Asad abritant des troupes américaines et d’autres troupes étrangères dans la province occidentale irakienne d’Anbar, suite à une attaque de missiles iraniens (Ayman HENNA / AFP)

Malgré l’éradication en mars 2019 de son « califat » en Syrie par des forces kurdes soutenues par une coalition internationale dirigée par Washington, l’EI mène toujours des attaques meurtrières.

Quand l’EI a conquis en 2014 sa province natale de Deir Ezzor (est), Omar Abou Leila a fui à l’étranger.

Fondateur du site d’information « Deir Ezzor 24 », ce jeune homme reproche à la communauté internationale de s’être focalisée dans la lutte antijihadistes, éclipsant l’objectif de la « révolution », à savoir la chute d’Assad.

Mais si le régime se maintient toujours, cinq armées étrangères continuent d’intervenir en Syrie.

Outre la Russie, l’Iran a déployé des forces, Téhéran cherchant à consolider son corridor vers la Méditerranée.

Malgré un retrait amorcé fin 2019, des troupes américaines sont toujours présentes dans le nord-est, où les Kurdes jouissent d’une semi-autonomie.

L’objectif pour Washington : sécuriser les hydrocarbures mais surtout enrayer l’influence iranienne.

Dans cette même optique, Israël mène régulièrement des frappes contre des positions du régime, de l’Iran ou du Hezbollah.

Des images satellites montrant les dommages causés à l’aéroport international de Damas le 13 février, par des frappes aériennes attribuées à Israël, qui ont été diffusées par ImageSat International, le 17 février 2020. (Crédit : ImageSat International)

La Turquie voisine, qui soutient des groupes armés locaux et a déployé des troupes dans le nord, a lancé plusieurs offensives contre les forces kurdes.

Début mars, Ankara a négocié avec Moscou la suspension d’une offensive du régime contre la région d’Idleb, mais la trêve reste fragile.

« C’est fini »

L’assaut, relancé en décembre, a provoqué la fuite selon l’ONU d’environ un million de personnes, poussées vers la frontière turque, faisant craindre à Ankara un nouvel afflux sur son territoire.

Refusant ce nouveau fardeau alors qu’elle accueille déjà 3,6 millions de Syriens, la Turquie a annoncé fin février l’ouverture de ses portes à tous les demandeurs d’asile souhaitant rejoindre l’Europe.

A terme, Damas veut reprendre l’ensemble du pays. Mais pour des experts, la Turquie devrait préserver une bande de territoire dans le nord syrien, où seraient confinés les civils et combattants anti-Assad.

« L’année 2020 sera sans doute la dernière d’un conflit ouvert », pronostique M. Balanche, estimant que le pays sera partagé entre « un protectorat russo-iranien » et la présence turque.

« Assad va (…) être réélu en 2021 », estime l’expert. « Le régime va imposer une chape de plomb (…) car sa priorité est la restauration du système sécuritaire ».

Des ONG continuent de dénoncer les arrestations arbitraires parmi ceux soupçonnés d’être contre le régime. Selon elles, des dizaines de milliers de personnes ont été victimes de disparitions forcées par le gouvernement ou les factions armées.

Omar al-Hariri, qui s’est réfugié à l’étranger après la reconquête par le régime de sa province de Deraa en 2018, n’a plus aucune illusion.

« Si aujourd’hui vous demandez aux gens s’ils souhaitent revenir à l’avant 2011, la majorité vous dira oui. Mais de toute façon, il n’y a plus rien à dire, c’est fini ».

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