Gaza: Israël satisfait de la réponse de Biden mais alarmé par le parti démocrate
Lors de rencontres avec les factions israéliennes, des leaders juifs américains ont dit avoir reçu des messages de satisfaction concernant Biden - mais d'inquiétudes sur son parti
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
NEW YORK — Des responsables juifs américains et de haut-responsables israéliens issus ou non du gouvernement ont exprimé leur satisfaction devant la réponse de l’administration Biden lors du dernier conflit entre le Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas. Ils sont cependant inquiets des tendances au sein du parti démocrate – où les critiques à l’encontre d’Israël se banalisent.
Deux officiels, issus d’organisations juives américaines, ont indiqué mardi au Times of Israel que ces deux évaluations – auxquelles s’ajoute la recrudescence de l’antisémitisme aux États-Unis – ont été les principaux thèmes soulevés lors de leurs rencontres avec les dirigeants de partis issus de l’ensemble du spectre politique israélien, dont le Likud du Premier ministre Benjamin Netanyahu.
Les deux semaines et demi qui se sont déroulées depuis la guerre de onze jours dans la bande de Gaza ont été l’occasion de nombreuses visites en provenance des États-Unis, notamment de membres du Congrès, de leaders de fédérations juives et de responsables de la CoP (Conference of Presidents of Major Jewish Organizations).
Les membres du gouvernement Netanyahu ainsi que leurs potentiels successeurs dans la coalition dirigée par le chef de Yamina, Naftali Bennett, et par le responsable de Yesh Atid, Yair Lapid, ont utilisé ces entretiens pour connaître davantage les motivations de la nouvelle administration à Washington, ainsi que les tendances politiques plus larges aux États-Unis dans le sillage de la mini-guerre qui a eu lieu à Gaza, ont dit les deux participants.
« Sur l’ensemble de l’échiquier politique, les leaders israéliens ont été agréablement surpris par la réponse du président américain Joe Biden au conflit à Gaza », a dit l’un des leaders communautaires.
L’autre responsable d’une organisation juive américaine a indiqué que « les attentes face à l’administration Biden de certains des membres du gouvernement israélien les plus alignés sur Trump étaient plutôt basses ». « Ils ont réalisé que Biden n’était pas seulement un autre Obama, mais un Obama 2.0, » a ajouté la source.
Le second responsable a indiqué que Jérusalem avait particulièrement apprécié la retenue du président, qui n’avait pas publiquement appelé à un cessez-le-feu immédiat et qui avait bloqué les résolutions du Conseil de Sécurité de l’ONU à cette fin, tout en s’exprimant ouvertement sur le droit à l’auto-défense d’Israël face aux tirs de roquettes du Hamas.
L’administration Biden a vanté sa discrète diplomatie en coulisses – devant les appels lancés par ses collègues progressistes et par la communauté internationale en faveur d’un engagement plus public et plus agressif – estimant que cette politique avait permis un tournant et débouché sur une fin rapide des combats, le 20 mai.
Washington, qui a eu 80 entretiens téléphoniques avec divers acteurs régionaux, a œuvré à faire venir le gouvernement Netanyahu à la table des négociations pour le convaincre d’accepter un cessez-le-feu négocié sous l’égide de l’Égypte.
En même temps, la satisfaction de Jérusalem à l’égard de la Maison Blanche a été bousculée devant une « réelle détresse » ressentie à l’égard du parti de Biden, où certains des alliés – historiques – de l’État juif ont rejoint leurs collègues progressistes en réclamant un cessez-le-feu dès les premiers jours du conflit.
Les responsables du gouvernement israélien ont ainsi évoqué le leader de la majorité au Sénat, Chuck Schumer, le président de la commission des Affaires étrangères du Sénat, Bob Menendez, et le président de la commission judiciaire de la Chambre, Jerry Nadler – de vieux défenseurs d’Israël dont la réponse apportée aux combats à Gaza a fait naître une inquiétude toute particulière.
Les trois hommes avaient appelé à un cessez-le-feu immédiat et Menendez avait émis un communiqué, au milieu des combats, exprimant son inquiétude face à la destruction de la tour Jalaa qui abritait notamment les bureaux de certains médias et une unité du Hamas et face à la perte de vies civiles au sein de l’enclave dirigée par le Hamas. Le sénateur du New Jersey n’avait que très rarement critiqué Israël auparavant et il avait été l’un des quelques démocrates à voter contre l’accord sur le nucléaire de 2015, auquel s’opposait le gouvernement Netanyahu.
Se rappelant des raisons de la frustration exprimée par les responsables israéliens concernant les appels des démocrates à un cessez-le-feu immédiat, les responsables des organisations juives ont indiqué qu’au vu de l’absence de lien entre les Américains et le groupe terroriste du Hamas, de telles demandes émanant des députés ne pouvaient être interprétées que comme une demande unilatérale de retenue adressée à Israël, réclamant que l’État juif cesse de défendre ses citoyens face aux tirs indiscriminés des groupes terroristes palestiniens.
Les leaders communautaires juifs ont dit être entrés en contact avec les bureaux de Menendez, de Nadler et de Schumer qui ont chacun défendu leurs positionnements, affirmant qu’il n’y avait rien d’anti-israélien à appeler à un cessez-le-feu et que cela évitait la perte de vies humaines des deux côtés.
« Un grand nombre de leurs réponses ont été liées à Bibi et à un manque de confiance dans son jugement et dans son leadership », a noté un responsable, qui a exprimé l’espoir que le gouvernement qui devrait normalement prêter serment dimanche « remette le compteur à zéro ».
Pour leur part, les chefs de partis politiques israéliens – Netanyahu, Bennett, Lapid et celle du parti Travailliste Merav Michaeli ont interrogé les leaders juifs américains sur le degré d’influence de Biden, qui met le holà à de plus amples critiques d’Israël au sein du parti démocrate, a dit l’un des deux responsables.
Ils ont aussi discuté de la possibilité d’utiliser Michaeli – qui serait ministre des Transports dans le prochain gouvernement – pour présenter un point de vue plus progressiste concernant l’État juif aux députés libéraux à l’étranger.