La justice saisie sur la mise à l’écart de l’opposition pour le choix des juges
Le Mouvement pour un gouvernement de qualité voit des "considérations politiques" dans le processus de nomination après le refus de donner un siège à l'opposition dans le comité
Un mouvement de veille de la corruption en Israël a déposé jeudi une requête auprès de la Haute Cour de justice contre l’élection des représentants de la Knesset au sein du panel qui nomme les juges israéliens.
La Knesset a élu mercredi les députés Zvi Hauser (Kakhol lavan) et Osnat Mark (Likud) au comité de nomination des juges, composé de neuf membres (les autres membres occupent d’autres fonctions que celle de député). Tous deux sont membres de partis de la coalition.
Ce vote rompt avec la tradition selon laquelle un député nommé au comité représente la coalition et l’autre l’opposition.
Un jugement de 2017 de la Haute Cour par le juge Neal Hendel a suggéré que l’exigence d’avoir un député de l’opposition au sein du comité, bien qu’elle ne soit fixée dans aucune loi écrite, peut équivaloir à une « coutume constitutionnelle » contraignante.
« L’élection de représentants de la seule coalition sape l’équilibre constitutionnel atteint par la composition du Comité des nominations judiciaires, et donnera plus de poids à la coalition et aux considérations politiques dans le processus de nomination des juges », prévient la pétition du Mouvement pour un gouvernement de qualité.
Son président, Eliad Shraga, a déclaré à la radio de l’armée que le vote de la Knesset risquait de « priver l’opposition du droit d’influencer le travail de la commission ».
Selon une loi de 2002, le comité de neuf membres est composé de deux représentants de la Knesset, deux représentants du cabinet (l’un, le ministre de la Justice, préside le comité), deux représentants de l’Association du barreau israélien et trois représentants de la Cour suprême.
Cette composition, et la règle selon laquelle les nominations à la Cour suprême nécessitent sept votes, signifie que les trois juges de la Cour suprême peuvent essentiellement avoir un droit de veto sur les nominations à la Cour s’ils votent ensemble, car une majorité de sept votes ne peut être atteinte sans au moins l’un d’entre eux.
Le pouvoir exécutif dispose également d’un droit de veto, puisqu’il est représenté par au moins un député et les deux ministres du cabinet.
Mais dans l’actuel gouvernement d’union, ces votes de coalition sont répartis entre les représentants de droite et les centristes. La ministre des Transports Miri Regev représente le point de vue conservateur, tandis que le ministre de la Justice Avi Nissenkorn représente les centristes. Cette division signifie que la droite a perdu son bloc de trois membres qui peut empêcher la nomination de soi-disant juges partisans qu’elle ne veut pas voir nommer.
Pour restaurer ce bloc de trois membres de droite, le Likud a obtenu l’accord de coalition de Kakhol lavan, que les deux représentants de la Knesset soient issus de la droite. Outre Osnat Mark du Likud, Zvi Hauser appartient à la moitié centriste Kakhol lavan de la coalition, mais il est un ancien secrétaire de cabinet du Likud et reste conservateur sur les questions judiciaires.
Si la Haute Cour donne une suite favorable à l’appel du Mouvement pour un gouvernement de qualité, annulant le vote de la Knesset, cela pourrait déclencher un nouveau vote – ou le remplacement de Zvi Hauser ou d’Osnat Mark par la députée arrivée à la troisième place de l’élection de mercredi, Karine Elharrar de Yesh Atid.
Karine Elharrar est considérée comme une femme de gauche en matière de nominations judiciaires. Sa désignation à la commission parlementaire supprimerait une fois de plus la possibilité pour la droite d’opposer son veto aux nominations.
La quatrième place, mercredi (quatre candidats se sont disputés deux places), est revenue à Ayelet Shaked, députée Yamina, conservatrice de droite issue de l’opposition. Si la Haute Cour rejette Zvi Hauser ou Osnat Mark du comité, les factions de droite pourraient soutenir Ayelet Shaked, assurant ainsi à la fois un bloc de trois membres de droite et la représentation de l’opposition au sein du comité.