Le magnat juif américain de l’immobilier Sam Zell s’est éteint à 81 ans
Le milliardaire connu pour sauver des entreprises en péril, a semblé perdre la main après l'achat, en 2007, de la société de médias Tribune, qui s'est soldé par une faillite
JTA – Sam Zell, un magnat de l’immobilier de Chicago et fils de survivants de la Shoah qui a dirigé une tumultueuse acquisition par emprunt qui a entraîné la faillite de la société de médias Tribune au début des années 2000, est décédé jeudi dernier, à l’âge de 81 ans.
Avant de racheter Tribune Co. en 2007, le milliardaire était connu pour son talent à redonner vie à des entreprises en faillite. Il a développé une société d’immeubles de bureaux qu’il a vendue au groupe Blackstone pour 39 milliards de dollars en 2007. Sa société a également investi dans l’industrie manufacturière, le tourisme, la vente au détail, les soins de santé et l’énergie. Il a été le premier à utiliser les SIIC – des sociétés d’investissement immobilier qui se négocient comme des actions sur les principales places boursières.
Mais Zell a semblé perdre de sa « magie » en 2007 après avoir acheté la société Tribune et ses actifs, qui comprenaient des chaînes de télévision, l’équipe de baseball des Chicago Cubs et de grands journaux, dont le Chicago Tribune et le Los Angeles Times. La société a sombré dans ce que Zell lui-même a appelé « l’affaire de l’enfer » et a déposé le bilan en décembre 2008, un an après que Zell a privatisé la société dans le cadre d’une opération à fort effet de levier d’un montant de 8,2 milliards de dollars. Bien que l’opération ait eu lieu à un moment où le secteur des médias était en perte de vitesse, la direction personnelle de Zell et sa décision d’endetter l’entreprise ont été largement blâmées.
Le « fossoyeur » de la promotion immobilière était devenu le « fossoyeur » du monde de la presse », écrivît à l’époque un chroniqueur de Forbes.
Zell était un donateur important pour les causes juives, notamment le Centre interdisciplinaire Herzliya (IDC) en Israël, le Centre israélien pour le progrès social et économique, l’American Jewish Committee (AJC) et l’école Bernard Zell Anshe Emet Day School, nommée en l’honneur de son père, à Chicago. (Parmi ses anciens élèves figurent l’ancien maire de Chicago, Rahm Emanuel, et l’acteur Ike Barinholtz ; un lycée juif de Chicago porte le nom de Sophie, la mère de Zell).
Selon un portrait publié en 2007 dans le Forward, Zell régalait les campeurs en tant que moniteur de camp d’été juif avec des récits sur la fuite de ses parents pendant la Shoah. Selon son autobiographie de 2017, Am I Being Too Subtle ? Straight Talk From a Business Rebel (« Suis-je trop subtil ? Le franc-parler d’un rebelle des affaires »), les parents de Zell, alors connus sous le nom de Ruchla et Berek Zielonka, ont fui la Pologne au début de l’invasion nazie et se sont embarqués avec leur fille de 2 ans pour un sinueux périple de 21 mois qui les a menés en Lituanie, en Russie et au Japon avant qu’ils n’atteignent les États-Unis. Ils ont voyagé avec des visas de transit fournis par Chiune Sugihara, un diplomate japonais à Vilnius qui a sauvé des milliers de Juifs.
Zell est né le 28 septembre 1941 à Chicago. Il a obtenu son diplôme en 1963 à l’université du Michigan, où il était également membre de la fraternité juive Alpha Epsilon Pi. Il a géré des appartements pour étudiants pendant ses études et a fondé son principal outil d’investissement, Equity Group Investments, en 1968.
« Sam Zell était un [entrepreneur] visionnaire et autodidacte. Il a lancé et développé des centaines d’entreprises au cours de sa carrière de plus de 60 ans et a créé d’innombrables emplois », a déclaré Equity Group Investments dans un communiqué écrit jeudi. « Bien que ses investissements aient porté sur des secteurs d’activité dans le monde entier, il est surtout reconnu pour son rôle essentiel dans la création de la société d’investissement immobilier moderne, qui représente aujourd’hui un secteur d’activité de plus de 4 000 milliards de dollars. »
Zell s’est marié à trois reprises. Sa dernière épouse, Helen, ses trois enfants et ses neuf petits-enfants lui ont survécu.
Zell attribuait son dynamisme aux leçons qu’il avait apprises de ses parents. Dans ses mémoires, il se souvient avoir vu des images des atrocités commises dans les camps de concentration auxquels ses parents avaient échappé.
« Ces images inoubliables ont été mon introduction à la Shoah », a-t-il écrit. « Avec le recul, je constate qu’elles ont accéléré ma maturité et m’ont donné une conscience sobre du monde. Elles m’ont également beaucoup aidé à comprendre l’orientation de mes parents face à la vie – pourquoi ils poussaient si fort et étaient si déterminés à ce que leurs enfants réussissent. La réussite économique a joué un rôle essentiel dans l’obtention de leur liberté. Ils avaient fui la Pologne en partie parce qu’ils en avaient les moyens – mon père avait eu la présence d’esprit de mettre de l’argent de côté ».