Les chercheurs israéliens annoncent une avancée dans la lutte contre la résistance médicamenteuse bactérienne
Une équipe de l'université Hébraïque a indiqué avoir trouvé un moyen de mesurer le temps qu'il faut pour tuer des bactéries 'tolérantes', précédemment négligées, ce qui pourrait aider à guider les décisions thérapeutiques
Les pathogènes qui développent une résistance aux antibiotiques sont l’une des menaces les plus graves que doit affronter la médecine moderne, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), mais une nouvelle recherche pourrait venir en aide aux médecins dans la lutte contre de tels germes.
Les chercheurs de l’université Hébraïque de Jérusalem disent avoir découvert une méthode simple pour mesurer la tolérance des bactéries, ou le temps nécessaire pour tuer une population bactérienne. Cela permettra aux médecins de traiter de manière plus efficace des souches sur le point de devenir résistantes au traitement, ont indiqué les chercheurs.
Cette tolérance a été « largement négligée dans les paramètres cliniques », selon Nathalie Balaban, la principale auteur de l’étude. Le protocole expose un échantillon de population d’une bactérie à différentes concentrations d’antibiotiques pour des périodes de temps variées afin de déterminer combien survivent et combien de temps.
« La mesure régulière de la tolérance peut fournir des informations précieuses sur la durée des traitements aux antibiotiques, réduire le risque de la sous-médication comme de la sur-médication », a commenté Balaban. « De plus, les données collectées à partir de telles mesures peuvent fournir une estimation réelle du degré de propagation du phénomène de la tolérance, qui est actuellement complètement inconnu ».
Actuellement, les médecins examinent la résistance bactérienne, qui est une qualité active, pour décider quel antibiotique délivrer et quel dosage prescrire au patient. La nouvelle méthode, intitulée MDK99, ou « durée minimale pour tuer 99 % de la population », mesure une qualité différente – la tolérance bactérienne, qui est inactive.
Au lieu de lutter contre le médicament, ces bactéries s’endorment par sa présence et ne meurent seulement que lorsqu’elles se réveillent. Si elles survivent, elles peuvent rapidement se reconstituer une fois que le traitement est arrêté. En mesurant la tolérance, les médecins sont en mesure de décider quel antibiotique administrer pour tuer toutes les bactéries.
Les souches résistantes continuent à croître malgré l’exposition à de fortes concentrations médicamenteuses tandis que les souches tolérantes peuvent survivre aux concentrations létales d’un antibiotique pendant une longue période avant de succomber à ses effets. La tolérance est plus commune que la résistance, comme cela a été découvert dans toutes les populations bactériennes. Elle s’associe souvent avec l’échec d’un traitement et une rechute, et elle est considérée comme un tremplin vers l’évolution de la résistance aux antibiotiques. Mais contrairement à cette dernière, la tolérance n’est que médiocrement comprise et n’est actuellement pas évaluée dans le cadre des soins de santé.
« Le manque de mesure quantitative signifie que cet aspect du traitement s’appuie très largement sur l’expérience du médecin individuel ou de la communauté », a commenté Asher Brauner, premier auteur de l’étude et étudiant en Doctorat au sein du laboratoire de Balaban.
La tolérance a été négligée
La tolérance a été négligée parce que chez les patients sains, le système immunitaire est en mesure de gérer la présence de quelques bactéries survivantes. Mais de plus en plus de malades ont dorénavant un système immunitaire plus faible que dans le passé, notamment les personnes âgées et les patients dont le système immunitaire a été compromis par des troubles ou une maladie, explique Balaban.
Les médecins sont amenés à rencontrer de plus en plus de cas d’infections qui ne sont pas résistantes mais qui ne peuvent toutefois pas être guéries par un traitement, et la tolérance serait le responsable présumé de ce phénomène.
L’étude a été publiée dans le Biophysical Journal le 20 juin. L’équipe de Balaban utilisera la méthode à l’avenir pour examiner l’évolution de la tolérance chez les patients. Cela pourrait également rendre possible la mise en place d’un système de classification pour déterminer les souches tolérantes, résistantes ou persistantes – ce qui pourrait aider à orienter des décisions thérapeutiques.
« Ce qu’il faut retenir de cela, c’est qu’il est important de terminer un traitement aux antibiotiques tel qu’il a été prescrit, même après la disparition des symptômes », a déclaré Balaban. « Un traitement partiel donne aux mutations de tolérance et de persistance un avantage sélectif et ces dernières, en retour, accélèrent le développement de la résistance ».