Les exigences de Smotrich sont une « annexion de facto », dit La Paix maintenant
HaTzionout HaDatit insiste pour que l'administration civile, qui gère les affaires civiles en zone C, soit transférée au ministère des Finances sous la direction de Smotrich
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
L’organisation militante de gauche La Paix maintenant a averti que si le parti d’extrême droite HaTzionout HaDatit obtenait le contrôle de l’administration civile, qui gère certains aspects des affaires civiles dans près de 60 % de la Cisjordanie, ceci pourrait se solder par une « annexion de facto » du territoire par Israël.
Lors des négociations menées avec le parti Likud du futur Premier ministre Benjamin Netanyahu, en vue de former une coalition, le parti HaTzionout HaDatit a exigé que l’administration civile soit transférée du ministère de la Défense au ministère des Finances.
Le leader à la tête de HaTzionout HaDatit, Bezalel Smotrich, le futur ministre des Finances, est impatient de prendre le contrôle de l’agence et de faire avancer son programme d’expansion des implantations israéliennes en Cisjordanie, et de contrecarrer les aspirations palestiniennes à un Etat indépendant sur le territoire.
Pour Smotrich, le contrôle de l’agence constitue un moyen d’étendre la souveraineté israélienne en Cisjordanie, remplaçant l’administration militaire du territoire par un contrôle direct du gouvernement central et de ses ministères.
Ses opposants ont fermement dénoncé la perspective d’une telle initiative, affirmant qu’elle équivaudrait à une annexion de facto de la zone C – les 60 % du territoire de Cisjordanie où se situent les implantations israéliennes et où Israël maintient un contrôle militaire et administratif sur les populations israélienne et palestinienne.
Malgré les progrès qu’il aurait réalisés dans le cadre de ses négociations avec d’autres partenaires de coalition potentiels, les discussions du Likud avec Smotrich se sont enlisées dans des accusations mutuelles. HaTzionout HaDatit affirme que Netanyahu est revenu sur ses promesses et le Likud accuse le parti d’extrême droite de faire des demandes disproportionnées.
Dans une longue déclaration à la presse mercredi, HaTzionout HaDatit a affirmé qu’après la demande de Netanyahu à Smotrich de renoncer au poste de ministre de la Défense, un accord avait été conclu pour le nommer aux Finances et lui confier la responsabilité de l’administration civile.
Selon ses dires, les négociateurs de HaTzionout HaDatit auraient été informés, mardi soir, que Smotrich ne se verrait pas confier « l’entière autorité » sur l’administration civile.
Le Likud a réagi en assurant n’avoir, à aucun moment des négociations, accepté de transférer une quelconque branche de l’administration au ministère des Finances.
L’administration civile est essentiellement chargée de la planification et de la construction dans la zone C en Cisjordanie, ainsi que de l’application des mesures contre les constructions non autorisées, que ce soit par des habitants israéliens ou par des Palestiniens.
L’agence est en outre responsable des infrastructures civiles telles que le pavage des routes et la fourniture d’eau et d’électricité.
Quelque 491 000 Israéliens vivent dans des implantations en Cisjordanie, dont la totalité se trouve dans la zone C. Les données démographiques concernant les résidents palestiniens de la zone sont difficiles à obtenir, les estimations allant de 100 000 à plus de 200 000.
L’administration civile est une agence du ministère de la Défense qui dépend du coordinateur des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT), un département dirigé par le général de division Ghassan Alian de Tsahal.
Shaqued Morag, directeur de l’organisation La Paix maintenant, qui s’oppose au contrôle israélien de la Cisjordanie, a déclaré que le transfert de l’administration civile du ministère de la Défense vers un autre département gouvernemental pourrait, sous certaines conditions, constituer une annexion de facto de la zone C.
Si Smotrich place les fonctions de l’administration civile sous la tutelle du ministère des Finances, ou de tout autre ministère, cela constituerait une prise de contrôle par le gouvernement israélien de ce qui était auparavant une administration militaire, a déclaré Morag.
Le programme du parti HaTzionout HaDatit appelle en fait à la suppression de l’administration civile et au transfert de ses pouvoirs aux ministères concernés – un objectif qui, selon lui, sera atteint par voie législative.
La section de son manifeste électoral traitant de cette question s’intitule « Souveraineté de facto : suppression de l’administration civile et transfert de la responsabilité des implantations en Judée et Samarie [Cisjordanie] aux ministères du gouvernement. »
Si l’Administration civile était maintenue telle quelle, mais seulement transférée du ministère de la Défense au ministère des Finances, cela ne modifierait pratiquement rien à la situation. Mais si seule la responsabilité de l’Administration civile à l’égard des résidents israéliens de la zone C était assumée par le gouvernement central d’Israël, tandis que l’autorité sur la population palestinienne du territoire restait entre les mains de l’Administration civile, un tel régime reviendrait à une forme d’apartheid, affirme Morag.
« Smotrich considère la zone C comme un territoire israélien et il compte y concrétiser sa vision de la suprématie juive, ce qui signifie qu’il autorisera le développement d’implantations sur les terres palestiniennes et fera tout ce qui est en son pouvoir pour supprimer la minorité de Palestiniens vivant dans la zone C, ce qui revient à une annexion de facto du territoire », a-t-elle déclaré.
« Annexer la zone C signifie laisser les zones A et B [sous contrôle palestinien] sans contiguïté territoriale. Ce qui constitue une menace importante pour la viabilité d’une solution à deux États. »
Le parti HaTzionout HaDatit affirme qu’il n’est pas raisonnable que les plus de 491 000 citoyens israéliens vivant dans les implantations de Cisjordanie soient soumis à un régime militaire, ce qui complique considérablement leur vie, notamment en ce qui concerne les projets de construction de maisons et de développement des implantations.