Les ministres reportent une réunion sur le contrôle dans les crèches
Une enfant de 14 mois est morte dans une crèche ; Une proposition de loi, repoussée pendant des années, permettrait l'installation de caméras dans les jardins d'enfants
La commission des Lois de la Knesset a essuyé de vives critiques dimanche pour avoir ajourné une réunion sur une proposition de loi qui renforcerait les contrôles sur les jardins d’enfants alors qu’une série d’abus largement médiatisés ont été dénoncés dans des garderies privées de tout le pays.
S’en est suivie une prise de becs entre le ministère des Affaires sociales et celui des Finances, le premier accusant le deuxième de freiner la loi pour éviter de financer le projet, estimant qu’il se montrait « insensible et irresponsable », selon la chaîne Hadashot. « Dorénavant, toute tragédie relèvera de sa responsabilité ».
En réponse, le ministère des Finances a fustigé les « mensonges et les pirouettes » du ministère des Affaires sociales.
« Au lieu de former les enseignants de manière à réduire le risque d’abus sur les enfants, le ministère fait le choix de déplacer le blâme sur d’autres bureaux tout en faisant des déclarations qui – si elles génèrent les gros titres dans les journaux – manquent de fondement », a fait savoir le Trésor.
D’autres militants ont également attaqué le ministère des Finances pour ses réserves présumées à allouer les millions de shekels nécessaires à l’installation des caméras dans les institutions de toute la nation.
« Le fait que des considérations financières et des batailles politiques puissent prévaloir sur la vie des enfants donne mal au coeur », a ainsi commenté Vered Windman, directrice du Conseil national pour l’enfant. « Les tragédies et les affaires horribles de ces derniers jours sont une démonstration tragique non seulement de l’importance de la loi, mais aussi de son caractère urgent ».
Cette loi de supervision, qui a été débattue et reportée pendant des années, avait passé l’étape d’une lecture préliminaire en séance plénière à la Knesset au mois de janvier mais elle n’a toujours pas été approuvée par la commission des Lois, une approbation qui lui donnerait le feu vert pour les trois votes supplémentaires nécessaires pour être définitivement adoptée.
Dimanche, dans la matinée, une enseignante travaillant dans un jardin d’enfants de Ramat Gan, une ville au centre de l’Etat juif, a vu sa détention provisoire prolongée une deuxième fois après la découverte de preuves qu’elle avait violenté des petits dont elle devait s’occuper.
Sigal Elkayam-Weiss, 36 ans, a été arrêtée jeudi après que des parents ont dénoncé des violences et des abus perpétrés au sein de la garderie, leurs enfants revenant chez eux avec des griffures, des marques de morsure et autres blessures.
Elkayam-Weiss avait été interrogée par la police une semaine auparavant et les agents avaient alors obtenu une vidéo d’incidents violents commis dans la garderie. Les images la montraient également en train de mettre les enfants – âgés de un an et demi à trois ans – dans une pièce isolée et obscure pour les punir.
Un policier avait plus tard indiqué que lorsque l’enseignante avait vu les images, elle avait admis qu’il s’agissait d’elle, qu’elle avait fait part de ses regrets et que si elle avait regardé une telle vidéo sur Internet, elle se serait interrogée sur l’identité de cet éducateur « monstrueux ».
Au cours de l’audience de dimanche qui a eu lieu devant la cour des magistrats de Tel Aviv, des parents bouleversés ont interpellé Elkayam-Weiss : « Regarde-nous dans les yeux, toi, le monstre. Tu devrais avoir honte ! Qu’as-tu fait à nos enfants ? »
Le juge a statué qu’elle resterait en détention jusqu’à mardi, après que son incarcération a été une première fois prolongée vendredi.
L’avocate d’Elkayam-Weiss, Shani Moran, a déclaré à l’audience que sa cliente n’a « pas d’antécédents criminels, elle a admis les accusations et a exprimé des regrets et du chagrin. Elle a pleinement coopéré lors de son interrogatoire. Son état mental est très mauvais et elle ne peut pas faire obstruction à l’enquête ».
C’est le troisième cas découvert ces dernières semaines d’abus semblables commis par des éducatrices de crèches sur leurs petits pensionnaires.
La semaine dernière, Ina Skivenko, 23 ans, a été inculpée pour homicide involontaire après la mort de Yasmin Vinta, 14 mois, à Petah Tikva.
Selon l’acte d’inculpation, Skivenko se serait assise le mois dernier sur la petite-fille, qui est morte par étouffement. Elle est également accusée d’avoir violenté des bébés dans au moins 10 autres cas en les frappant sur le sol, en les jetant sur des sièges, en leur donnant des coups de pied ou en les secouant.
Les forces de l’ordre ont également arrêté la semaine dernière Aviya Dahan, une enseignante de jardin d’enfants âgée de 63 ans, ainsi que son assistante de 28 ans, Lihi Ben Daniel, après qu’une vidéo a montré une série d’incidents violents survenus dans leur crèche de Givatayim, avec des pincements, des gifles données, des insultes, des rebuffades et des griffures sur les petits pensionnaires. Elles ont été assignées à résidence.
La mère de Yasmin, le bébé décédé, Dorina Vinta, qui a participé à une audience de la Knesset la semaine dernière, a dit aux parlementaires que « tandis que j’ai conscience du fait que mon bébé ne pourra jamais revenir, je veux encore protéger les autres enfants et je veux que des caméras soient installées pour eux ».
Le père de Yasmin, Vladimir, a déploré durant la réunion que la loi de supervision ait été en suspens pendant plus d’une décennie. « Je connais des milliers d’enfants qui ont été blessés dans les jardins d’enfants et, parce qu’il n’y a pas de caméras, personne ne sait ce qui est arrivé et il n’y a pas de preuves de violence », a-t-il dit.
Cela fait des années que les parents fustigent un manque de supervision et de contrôle dans les crèches israéliennes. La dernière loi sur la question a été adoptée en 1965, et un grand nombre ont affirmé que son contenu est dépassé et qu’il ne correspond plus aux normes contemporaines de vérification.
Selon la députée Yifat Shasha-Biton, issue du parti Koulanou, qui est à l’origine de cette nouvelle loi, seuls 23 % des enfants israéliens de 0 à 3 ans se rendent à des programmes supervisés de crèches.
« Plus de 70 % d’entre eux se trouvent dans des no-man’s land, où nous ne savons pas réellement ce qu’il se passe durant la plus grande partie des heures de la journée », a-t-elle dit.