Quand Obama accueillera Netanyahu, ce ne sera pas agréable, mais peut-être productif
L’accord iranien est passé. Le processus de paix est au point mort. Cela signifie qu’il pourrait y avoir moins de points que d’habitude sur lesquels se disputer, alors que les deux dirigeants tiennent leur première rencontre après une année de déconnexion amère
David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).
Le 9 novembre, le président américain Barack Obama accueillera le Premier ministre Benjamin Netanyahu à la Maison Blanche pour la première fois depuis plus d’un an. Ils feront probablement, même si ce n’est pas certain, une représentation professionnelle, voire amicale. Les dirigeants des deux États étroitement alliés. Partageant des intérêts et des valeurs. Un partenariat inébranlable. Vous connaissez le discours.
Pourtant, l’élément sur la relation vitale et durable entre les deux pays est absolument vrai.
Mais la relation personnelle entre Obama et Netaynahu est rompue depuis bien longtemps au-delà du point de non retour. Les événements de l’année passée l’ont plongée vers un nouveau fond. Netanyahu est convaincu qu’Obama a scellé un terrible accord avec l’Iran, enracinant ainsi un régime dangereux, lui donnant du liquide pour créer le chaos et laisser Israël horriblement exposé, et il n’a pas caché sa consternation.
Obama a été très irrité par l’effort public et vain de Netanyahu visant à monter des membres de son propre parti contre lui sur des objectifs clefs à l’internationale, notamment lors de son discours au Congrès.
Netanyahu pense qu’Obama donne à Mahmoud Abbas une carte blanche, même lorsque le dirigeant palestinien incite au terrorisme. Obama est convaincu que le soutien de Netanyahu pour l’expansion des implantations est central dans l’échec des efforts de paix.
Netanyahu pense qu’Obama ne « comprend » pas le Moyen-Orient sans pitié. Obama a exprimé sa désaprobation avec Netanyahu lorsqu’il a pris à partie le Premier ministre le jour de l’élection israélienne pour sa déclaration que les électeurs arabes allaient voter en masse.
Nous pourrions continuer sans fin. Espérons, pour les intérêts de leurs deux pays, que les deux dirigeants ne le veulent pas.
La visite à Washington cette semaine du ministre de la Défense Mosha Yaalon (lui-même un personnage pas franchement aimé dans l’administration Obama) semble symboliser un retour à une coopération proche.
Joseph Dunford, le nouveau président du Commandement en Chef de l’Etat Major américain, était en Israël la semaine dernière, moins d’un mois après être entré en fonction. Obama et Netanyahu ne mettront jamais le passé derrière eux, mais la rencontre à la Maison Blanche marquera probablement un effort renouvelé de voir la fin du mandat d’Obama se dérouler dans une tonalité moins discordante.
Pour aider cette cause, on peut souligner le fait les deux questions clefs, où il y a fréquemment eu des tensions, ont atteint un point où le risque de les voir se tirer dessus semble avoir été très réduit : l’accord sur l’Iran est passé. Et toute possibilité réaliste d’un accord palestinien est également finie dans un avenir proche.
Sur l’Iran, donc, ils pourraient choisir de s’affronter encore plus pour savoir s’il y avait une meilleure alternative, ou sur ce que constitue une conduite acceptable lorsqu’une nation assiégié fait pression sur une politique clef d’une superpuissance alliée.
Mais, plus probablement, le 9 novembre marquera le jour où Netanyahu a implicitement reconnu sa défaite en finissant par discuter avec l’administration sur les implications pratiques de l’accord iranien.
Si c’est le cas, les deux dirigeants et leur équipes pourront se mettre au travail afin de coordonner leurs positions sur les mesures pour contrer les menaces posées par un Iran renforcé et bientôt plus riche, et sur les réponses appropriées aux possibles violations iraniennes de l’accord. Celle-ci est une question pour laquelle Israël aurait pu jouer plus qu’un rôle au cours des derniers mois, s’il ne s’était pas opposé à l’accord avec autant d’intensité pour être, en fin de compte, mis à l’écart.
Dans la même logique de coopération, il est probable que les deux dirigeants annoncent qu’ils travaillent maintenant dur pour un nouvel accord à long terme d’aide de défense américaine à Israël. L’actuel accord cadre de 10 ans, qui fournissait pour plus de 30 milliards d’aide militaire américaine, expire en 2018.
Dans les coulisses, les équipes respectives évalueront les possibles menaces sur Israël pour la prochaine décennie, et Israël finalisera sa « liste d’achat » pour s’assurer que sa supériorité qualitative militaire est maintenue, ce à quoi est impliquée cette administration américaine, comme les précédentes.
Israël a déjà commandé plus de 30 avions de combat F-35 polyvalents, cela pourrait être 50, voire 75. Des systèmes de défense de missiles sont financés par un budget séparé, et les Etats-Unis sont bien conscients de l’impératif de maintenir et de développer le Dome de Fer et les Arrow, de déployer la Fronde de David, pour s’assurer qu’Israël puisse contrer les menaces du voisinage à Gaza, au sud Liban et en Syrie, tout comme celles d’un Iran qui développe constamment ses systèmes de missiles ballistiques.
L’implication croissante de l’Iran et de la Russie à la frontière nord d’Israël pose de nouveaux défis qu’Israël et les Etats-Unis percoivent du même point de vue.
Quant aux Palestiniens, alors que personne ne devrait sous-estimer la volonté du Secrétaire d’Etat John Kerry de faire un effort considérable pour ramener les parties à la table des négociations, et même dans les circonstances les plus délicates, le président en a probablement eu plus que sa part.
Il y a peu de chance pour que les deux parties s’accordent sur les termes en vue d’une reprise des négociations et encore moins de chance que de telles négociations puissent avancer, et le président en est bien conscient.
Lors d’une conférence de presse du 16 octobre, Obama a réitéré sa conviction de longue date que la seule façon d’assurer la sécurité d’Israël et de répondre aux aspirations des Palestiniens était via une solution à deux Etats. Mais « cela dépendra des parties » pour y parvenir, « et nous sommes prêts à apporter notre aide », a-t-il déclaré, ce qui voulait clairement dire qu’il n’était pas sur le point de lancer un nouvel effort de paix.
Netanyahu sera certainement content de ne pas devoir subir des pressions pour faire des concessions afin de permettre de nouvelles négociations. Obama voudrait surement lui dire qu’une telle satisfaction ne correspond pas à une vision à long terme, mais le fait est qu’une nouvelle tentative d’Obama de résoudre le conflit, dans le temps limité qu’il lui reste au pouvoir, n’est pas crédible. Le président ne manque pas d’autres défis, intérieurs et extérieurs. Il peut plus efficacement consacrer son attention sur d’autres sujets.
Néanmoins, les deux dirigeants devront discuter pour savoir comment empêcher une détérioration future sur le terrain, comment contrecarrer le terrorisme, comment s’opposer plus efficacement à l’incitation à la haine, comme traiter l’AP fracturée et son dirigeant affaibli, comment protéger les relations israélo-jordaniennes, comment conserver encore de la crédibilité pour une solution à deux États que Netanyahu et Abbas continuent tous les deux d’affirmer vouloir obtenir.
Obama voudrait que Netanyahu arrête la construction d’implantations, pour donner à l’AP plus d’autorité dans la zone C de la Cisjordanie, et essayer d’utiliser l’Initiative de Paix Arabe pour réchauffer les liens avec d’autres gouvernements arabes et si possible neutraliser des efforts anti-Israël par l’AP aux Nations unies.
Le Premier ministre sera réticent, le président l’avertira de ne pas approfondir le sens de désespoir des deux côtés et soulignera les dangers présentés par le terrorisme et la violence de semaines récentes. Le Premier ministre accusera Abbas et le président lui demandera d’être plus constructif.
Ils ne seront pas d’accord, comme auparavant.
Mais ils se seront rencontrés. Une rupture d’une année sera finie. Ils se seront de nouveau impliqués pour se tolérer l’un l’autre dans l’intérêt de leurs pays pendant encore 15 mois.
Pourtant, pour Netanyahu, la fin du deuxième mandat d’Obama ne viendra jamais assez tôt. Et pour Obama, ne pas avoir à inviter Netanyahu sera une des petites joies de ne plus être président.