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Responsables US à Gantz: le désastre du convoi humanitaire prouve la nécessité d’un plan d’après-guerre viable

Les officiels américains affirment que l'incident ne serait pas survenu si davantage avait été fait pour distribuer l'assistance aux Gazaouis, avertissant que l'incident laisse présager ce que sera l'avenir dans la bande sans alternative au Hamas clairement établie par Israël

Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.

Le membre du cabinet de guerre Benny Gantz arrive au département d'État avant une rencontre avec le Secrétaire d'État Antony Blinken à Washington, le 5 mars 2024. (Crédit : Drew Angerer/AFP)
Le membre du cabinet de guerre Benny Gantz arrive au département d'État avant une rencontre avec le Secrétaire d'État Antony Blinken à Washington, le 5 mars 2024. (Crédit : Drew Angerer/AFP)

Des proches conseillers du président américain Joe Biden ont indiqué au ministre du cabinet de guerre Benny Gantz, lors d’une visite à Washington de ce dernier qui a eu lieu en début de semaine, que la récente catastrophe survenue dans le nord de Gaza – des dizaines de civils palestiniens, désespérés, avaient été tués alors qu’ils se ruaient sur un convoi de camions transportant des aides humanitaires – soulignait, aux yeux de l’administration, l’échec d’Israël à planifier la guerre de manière appropriée, ont confié de hauts-responsables de la Maison Blanche au Times of Israel, mardi.

L’incident, survenu jeudi dernier, ne serait pas arrivé si Israël avait fait davantage pour garantir que l’assistance humanitaire arrivait bien jusqu’aux civils, selon les officiels. Ils se sont exprimés sous couvert d’anonymat, confiant le message qui a été transmis à Gantz par la vice-présidente américaine Kamala Harris, par le Conseiller à la sécurité nationale Jake Sullivan, par l’envoyé pour le Moyen-Orient de la Maison Blanche Brett McGurk, par le Secrétaire d’État Antony Blinken et par le Secrétaire d’État à la Défense Lloyd Austin pendant des échanges à huis-clos qui se sont tenus lundi et mardi.

Le Hamas affirme qu’au moins 115 Palestiniens ont été tués alors qu’ils tentaient de prendre d’assaut des camions d’aide humanitaire qui étaient entrés à Gaza aux environs de 4 heures 30 du matin – un incident qui a également fait des centaines de blessés. Le groupe terroriste accuse les soldats israéliens d’avoir ouvert le feu sur les personnes présentes. L’armée a indiqué avoir ouvert une enquête, soulignant toutefois que de nombreuses victimes ont perdu la vie dans le cadre d’une bousculade, piétinées dans le mouvement de foule entraîné par l’arrivée des camions, et elle note que les troupes n’ont tiré que sur quelques individus qui s’approchaient d’elles de manière menaçante.

L’officiel américain a dit, mardi, que le vide administratif dans le nord de Gaza qui est apparu au grand jour lors de la bousculade meurtrière donne un aperçu de ce que pourrait être la bande dans l’après-guerre si Israël ne présente pas une alternative viable à la gouvernance du Hamas, le groupe terroriste que le pays cherche à démanteler.

L’administration Biden fait, de son côté, la promotion d’une initiative régionale plus large pour le lendemain du conflit – avec une bande de Gaza qui serait remise en état par les nations arabes, notamment par l’Arabie saoudite et avec une normalisation des liens entre cette dernière et Israël. L’État juif prendrait par ailleurs l’engagement, dans le cadre de cet accord de normalisation, d’ouvrir une voie irréversible vers un état palestinien qui serait placé sous la direction d’une Autorité palestinienne réformée en Cisjordanie et à Gaza, le tout assorti d’un calendrier précis.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, de son côté, a rejeté cette proposition, déclarant qu’il ne permettra pas à Gaza de devenir le « Fatahstan » — une référence faite au parti politique du président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et une déclaration qui souligne sa détermination de longue date à refuser les efforts livrés à l’international en faveur de l’établissement d’un état palestinien. Il envisage, de son côté, de faire appel à des chefs de clans locaux, sans lien avec le Hamas ou avec le Fatah, qui pourraient fournir les services nécessaires aux Gazaouis en lieu et place du groupe terroriste, laissant l’enclave côtière coupée politiquement de la Cisjordanie.

Ce que l’armée israélienne dit être des habitants de Gaza autour de camions d’aide dans la ville de Gaza, sur une image tirée d’une vidéo diffusée le 29 février 2024. (Crédit : Aline Manoukian/Armée israélienne/AFP)

Un officiel américain a noté que le plan allait entraîner un retour de flamme, obligeant Israël à occuper indéfiniment la bande de Gaza. Les leaders israéliens insistent sur le fait qu’une occupation ne les intéresse pas mais elle sera « le résultat inévitable » de la stratégie adoptée par le gouvernement de Netanyahu, a-t-il ajouté.

« Les Israéliens continuent à évoquer le soutien des États arabes dans leurs initiatives en pensant qu’il est acquis quoi qu’il arrive, indépendamment du fait qu’il y ait ou non une voie ouverte vers un état palestinien, indépendamment du fait que nous expliquions que ce n’est pas ce qui va se passer », a déploré le responsable américain.

Netanyahu, Gantz et le ministre de la Défense Yoav Gallant ont chacun présenté des projets pour l’après-guerre à Gaza, qui envisagent que des pays tels que les Émirats arabes unis ou l’Arabie saoudite apporteront leur aide dans la redynamisation et dans la déradicalisation de Gaza sans pour autant faire état d’un quelconque horizon politique offert aux Palestiniens.

Un responsable émirati de premier plan avait déjà expliqué, au mois de décembre, qu’Abu Dhabi allait conditionner son soutien économique et politique à la reconstruction de l’enclave côtière, au lendemain de la guerre entre Israël et le Hamas, aux avancées réalisées dans le cadre de l’initiative des États-Unis qui mènera, à terme, à la mise en place d’une solution à deux États. Ryad a transmis le même message.

« Les Israéliens pourraient bien se retrouver tout seuls avec toute cette pagaille », a mis en garde l’officiel américain.

Évoquant ce sujet précis, le porte-parole du Département d’État américain, Matthew Miller, a expliqué mardi que si les États-Unis soutenaient l’objectif poursuivi par l’État juif dans sa guerre, un objectif qui est de vaincre le Hamas, ce but était toutefois insuffisant en lui-même.

Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, à gauche, lors d’une rencontre à la Maison Blanche avec la vice-présidente américaine Kamala Harris à Washington, le 4 mars 2024. (Crédit : Bureau de la Vice-présidente Kamala Harris)

« Nous allons aussi devoir vaincre l’idéologie qui est celle du Hamas et ce n’est pas quelque chose qui peut être fait sur le champ de bataille. C’est quelque chose que nous avons appris aux États-Unis, au cours de notre longue Histoire de lutte anti-terroriste… En fin de compte, il faut vaincre une idée en apportant une idée meilleure – en l’occurrence, en présentant une résolution politique plus large qui répondra aux aspirations légitimes de la population palestinienne », a dit Miller pendant une conférence de presse.

Les responsables américains ont expliqué que la colère ressentie par l’administration Biden face à la quantité d’aides humanitaires – insuffisante – qui entre actuellement dans la bande de Gaza semblait avoir eu une résonnance et ils ont noté s’attendre à ce que de nouvelles initiatives soient prises, dans les prochains jours, par Israël pour garantir qu’une assistance revue à la hausse pourra arriver jusqu’aux civils palestiniens. La principale demande émise par les États-Unis à Israël concerne l’ouverture de nouveaux postes-frontières, notamment vers le nord de Gaza, de manière à laisser les aides affluer au sein de l’enclave, avec pour objectif de minimiser l’impact des pillages ou des vols commis par les gangs, qui tentent de vendre les aides sur le marché noir.

Au sujet des changements que l’administration américaine appelle de ses vœux dans la planification de l’après-guerre à Gaza, le deuxième responsable américain a estimé qu’il était trop tôt pour anticiper une éventuelle modification, par l’État juif, de sa stratégie.

« Ce n’est pas le ministre Gantz qui prendra la décision finale, en fin de compte – et l’impact de son déplacement sera donc limité sur cette problématique, en particulier au vu du mécontentement du Premier ministre Netanyahu face à ce déplacement », a indiqué le deuxième officiel.

Netanyahu a vivement critiqué la visite prévue de Gantz, considérant qu’elle entre dans le cadre d’un effort visant à miner son autorité. Un officiel israélien a fait savoir qu’il avait ordonné à l’ambassade israélienne de Washington de ne pas venir en aide au ministre du cabinet de guerre, dont les sondages indiquent qu’il serait en mesure de l’emporter haut la main face à Netanyahu si des élections avaient lieu aujourd’hui.

Les responsables américains ont aussi indiqué que les conseillers de Biden avaient interpellé Israël sur son plan d’offensive terrestre dans le sud de Gaza, à Rafah. Gantz a présenté les propositions initiales, faites par l’armée, portant sur l’évacuation de plus d’un million de Palestiniens qui se sont réfugiés dans ce secteur et qui seraient ainsi appelés à partir vers le nord avant le déclenchement de l’opération de Tsahal, dont l’objectif est de démanteler les derniers bataillons du Hamas. Les officiels américains n’ont pas été convaincus par ces propositions, ont-ils ajouté.

Des Palestiniens déplacés se promenant dans une école de l’UNRWA abritant des Palestiniens déplacés, à Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, le 4 mars 2024. (Crédit : AFP)

Selon des communiqués émis par le département d’État et par le Pentagone, Blinken et Austin ont également tiré le signal d’alarme pendant leurs entretiens respectifs avec Gantz, mardi, en ce qui concerne la situation humanitaire à Gaza.

Blinken « a mis l’accent sur la nécessité, pour Israël, d’agir de manière urgente pour permettre la délivrance de l’assistance humanitaire à Gaza et pour améliorer sa distribution sur le territoire de la bande. La situation actuelle est inacceptable et elle ne peut pas durer », a déclaré le porte-parole du Département d’État, Matthew Miller, pendant une conférence de presse.

« Au moment où les États-Unis font tout ce qu’ils peuvent pour renforcer l’entrée des aides à Gaza, il revient à Israël de prendre aussi des initiatives dans ce sens », a continué Miller.

Blinken a « répété que les États-Unis continuent à soutenir le droit d’Israël à garantir que l’attaque terroriste du 7 octobre ne pourra jamais se reproduire sur son territoire », a ajouté son porte-parole.

De son côté, le Pentagone a annoncé que le secrétaire à la Défense « a fait part de sa forte inquiétude face à la situation humanitaire à Gaza et il a demandé au ministre Gantz son soutien dans la mise en place d’un acheminement et d’une distribution de l’assistance en plus grande quantité » dans la bande.

Austin a répété que les États-Unis demandaient à Israël de présenter « un plan applicable et crédible de protection de civils et de gestion de la situation humanitaire » avant de lancer une opération terrestre majeure à Rafah.

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu et le ministre du cabinet de guerre Benny Gantz assistant à une conférence de presse à la base militaire de la Kirya, à Tel Aviv, le 28 octobre 2023. (Crédit : Abir Sultan/AFP)

Si Gantz, de son côté, n’a émis aucun compte-rendu de ses rencontres de mardi, son bureau a fait savoir que le ministre du cabinet de guerre avait exprimé « son appréciation face au soutien apporté à Israël par l’administration dans cette période » lors de ses échanges avec Harris, dans la journée de lundi.

« Au cours de cette rencontre, Gantz a répété qu’il était impératif d’aller au bout de la mission visant à supprimer la menace que laisse planer le Hamas sur Israël ; de trouver une solution durable pour garantir que les aides humanitaires parviennent jusqu’à aux civils et qu’elles ne finissent pas entre les mains du Hamas et il a souligné l’importance d’atteindre tous les objectifs militaires de l’opération menée à Gaza, de façon à soutenir la stabilité et la prospérité de la région toute entière », dit le communiqué israélien.

« Gantz a souligné l’importance de mettre au point un mécanisme international de supervision des efforts humanitaires en coordination avec les pays de la région dans les meilleurs délais et dans le cadre de l’initiative plus large de normalisation », continue le communiqué. « Le ministre Gantz a mis l’accent, auprès de la vice-présidente Harris, sur l’engagement suprême pris par Israël concernant le rapatriement des otages et, enfin, il a fait part de sa gratitude pour les pressions significatives qui ont été exercées par les États-Unis dans ce sens, en particulier ces derniers jours ».

Après avoir rencontré des leaders du Congrès dans l’après-midi de mardi, Gantz est parti pour Londres où il doit s’entretenir avec le ministre des Affaires étrangères David Cameron. Il reviendra en Israël dans la soirée de mercredi.

Ce déplacement à Londres a aussi suscité la colère de Netanyahu, qui a là encore ordonné à l’ambassade israélienne de la capitale britannique de n’offrir aucune assistance au ministre, selon la Douzième chaîne. En conséquence, a noté la chaîne, Gantz a été placé dans l’obligation de compter sur la police britannique pour bénéficier de gardes du corps.

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