Israël en guerre - Jour 432

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Un ancien refuznik appelle les Juifs à faire leur alyah

Yossef Mendelevitch est revenu en Russie pour raconter son militantisme juif et ses années passées au goulag

Rabbi Yossef Mendelevitch à l'aéroport Pulkovo de Saint-Pétersbourg, le 30 novembre 2014. (Crédit : Cnaan Liphshiz / JTA)
Rabbi Yossef Mendelevitch à l'aéroport Pulkovo de Saint-Pétersbourg, le 30 novembre 2014. (Crédit : Cnaan Liphshiz / JTA)

ST PETERSBOURG, Russie – Par la fenêtre arrière d’une voiture noire du KGB, Yossef Mendelevitch pouvait voir des étudiants de son âge pressés de terminer leurs examens.

C’était le 15 juin 1970, et Yossef Mendelevitch, âgé de 23 ans à l’époque, venait d’être arrêté avec onze complices pour avoir tenté de détourner un avion pour s’échapper d’Union soviétique.

Sur le tarmac d’un aéroport à l’extérieur de Saint-Pétersbourg – qui s’appelait encore Leningrad – des agents de la police secrète soviétique ont arrêté les conjurés avant qu’ils puissent monter dans l’avion monomoteur qui devait se diriger vers Israël.

Mendelevitch a passé les 11 années suivantes en prison et au goulag, où il a enduré, pour son « militantisme juif » un traitement cruel et un harcèlement sans répit.

On lui a refusé une dernière visite de son père malade pour le punir d’avoir porté une kippa et il s’est fait nourrir de force après une grève de la faim de 56 jours qu’il a entreprise pour protester contre la privation de nourriture casher et l’interdiction de prier.

« Je me souviens que je me disais : ils mènent leur petite vie tranquille, tandis qu’il sont en train de détruire la mienne, » a raconté Mendelevitch qui retournait dimanche à St Petersbourg pour la première fois depuis sa libération en 1981.

Mais sa vie était bien loin d’être détruite.

Aujourd’hui rabbin vivant à Jérusalem et père de sept enfants, Mendelevitch a reçu des Juifs locaux, la semaine dernière, un accueil digne d’un héros. Ceux-ci ont afflué pour l’entendre rappeler sa tentative de détournement que beaucoup considèrent comme le coup d’envoi de la campagne internationale massive pour libérer les Juifs restés derrière le rideau de fer.

Lors de la conférence juive organisée par Limmud FSU [une organisation qui réunit des communautés autour de séminaires d’étude], Mendelevitch avait besoin à lui tout seul de deux sessions – chacune réunissant une centaine d’auditeurs – pour transmettre les détails du déroulement de l’audacieuse opération connue sous le nom d’ « Opération Mariage ».

Mais Mendelevitch avait un autre objectif en revenant à cet endroit qui « ne rappelle pas de bons souvenirs ». Il voulait encourager les participants à faire leur alyah.

« Il y a 100 000 Juifs dans cette ville, mais seulement 350 d’entre eux sont venus à cette conférence de Limmud FSU, » a confié Mendelevitch à JTA. « La plupart d’entre eux, issus de mon peuple, se sont perdus en cours de route à cause du même système qui a essayé d’arracher mon identité. Je leur raconte mon histoire. Ils peuvent tirer leurs propres conclusions. »

Faisant partie des leaders de l’opération de détournement, Mendelevitch a grandi parmi les militants sionistes qui donnaient des cours du soir, des cours d’hébreu
« underground » à Leningrad et à Riga [aujourd’hui capitale de la Lettonie] alors sous contrôle soviétique. Mendelevitch est né à Riga et était en charge du contingent letton de la cellule de détournement.

Le groupe était dirigé par Mark Dymshits, un ancien pilote de l’armée soviétique, qui a été condamné à mort avec Eduard Kuznetsov, un anticommuniste notoire. La peine a été commuée, mais elle a suscité l’indignation internationale et a réussi à attirer une attention sans précédent sur les prisonniers juifs d’Union soviétique.

Étonnamment, les membres du groupe savaient très bien qu’ils seraient arrêtés, a révélé Mendelevitch.

« Dans la nuit qui a précédé le détournement, notre équipe campait dans les bois près de l’aéroport », a-t-il rappelé. « Deux voitures Volga noires du gouvernement se sont arrêtées à côté de notre feu de joie, au milieu de nulle part, et des agents du KGB ont commencé à rôder avant de disparaître. Nous savions qu’ils avaient l’œil sur tous nos mouvements. »

Le groupe a décidé d’aller de l’avant de toute façon, « au moins pour faire en sorte que le monde entende notre cri, » a-t-il confié.

Parmi les millions ce ceux qui ont pu entendre ce cri, il y avait un jeune ingénieur juif de Donetsk, un certain Natan Sharansky.

L’ancien refuznik incarcéré en 1977 pour « activisme sioniste » est devenu un symbole pour tous les militants des droits de l’homme qui se sont mobilisés à travers le monde pour sa liberté. Sharansky a été libéré en 1986.

« Nous n’avions pas CNN, pas d’Internet. Personne ne savait quoi que ce soit, » a déclaré Sharansky à JTA. « Et si le régime soviétique a parlé de l’incident surtout pour des raisons de propagande, cela a réussi à percer un mur de silence et a eu un impact énorme sur le mouvement pour libérer les prisonniers de Sion. »

Le président Reagan et le vice-président Bush rencontrent Avital Sharansky (épouse du dissident soviétique alors emprisonné Natan Sharansky) et Yosef Mendelevitch, mai 1981 (Crédit : le personnel de la Maison Blanche / Wikipedia)
Le président Reagan et le vice-président Bush rencontrent Avital Sharansky (épouse du dissident soviétique alors emprisonné Natan Sharansky) et Yosef Mendelevitch, mai 1981 (Crédit : le personnel de la Maison Blanche / Wikipedia)

Les condamnations à mort au procès de Leningrad – le nom donné par les médias russes aux tribunaux fantoches qui ont puni Mendelevitch et son équipe – « ont joué sans aucun doute un rôle important dans ma décision de commencer mon militantisme », a déclaré Sharansky.

« Et le fait de réaliser qu’il y avait des gens prêts à mourir pour la liberté a non seulement permis de galvaniser les protestations en Occident, mais a réussi à devenir le premier point de ralliement. »

Pour Mendelevitch, ce « succès de propagande » comme il le qualifie, lui a coûté cher dans sa propre vie.

Au goulag, il a été mis en isolement pour avoir refusé de retirer la kippah qu’il avait fabriquée en découpant le bord de son uniforme de prisonnier. On a intimé l’ordre à Mendelevitch d’enlever le morceau de tissu pour voir son père malade, qui avait parcouru des centaines de kilomètres pour voir son fils une dernière fois.

« Je savais que ce serait la dernière fois, » a déclaré Mendelevitch.

« Mais j’étais un soldat et un représentant pour le peuple juif. Cela peut semble très dur par rapport à un père mourant. Il faut aussi ajouter que toute faiblesse aurait invité mes ravisseurs à m’écraser – un signe que moi, qui avait travaillé dur pour être considéré comme un religieux fanatique immunisé à la logique soviétique, allait peut-être finir par craquer ».

En 1981, un jury du KGB a informé Mendelevitch qu’il n’était plus un citoyen russe. Peu après, cela l’a transporté dans ce qu’il décrit comme « l’un des moments les plus heureux de ma vie. »

Pourtant Mendelevitch dit qu’il ne porte à ses ravisseurs aucune rancune particulière.

« Certains d’entre eux ont commis des actions immorales, mais finalement, ils étaient les serviteurs d’un régime que j’avais juré de combattre, » a-t-il assuré. « Je suis tombé en captivité, ce qui arrive souvent à ceux qui luttent. Mais je ne peux pas dire que j’étais une victime du régime soviétique. J’étais un combattant. »

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