Un foyer se bat pour protéger ses résidents handicapés sous les roquettes
La structure du Negev de l'organisation ALEH n'a que 45 secondes pour abriter ses résidents atteints de handicaps physiques et mentaux - parfois graves - dans des espaces protégés

Au cours d’une sirène d’alerte rouge, les résidents du secteur situé à proximité d’Okafim, à environ 30 kilomètres de Gaza, ont devant eux 45 secondes pour se ruer vers une zone protégée. Un court laps de temps pour toute personne désireuse de se mettre en sécurité mais un véritable défi pour les 120 résidents du foyer Negev-Nahalat Eran de l’ALEH, en situation de handicaps physiques et mentaux qui, pour la plupart, ne jouissent que de peu de mobilité, si ce n’est d’aucune.
« C’est une situation très compliquée et c’est vraiment un moment difficile pour nous », commente Avi Wortzman, directeur-général de la structure, qui est l’un des quatre foyers résidentiels de l’ALEH sur le territoire israélien.
« Nous avons des personnes avec des handicaps cognitifs et physiques qui sont complètement dépendants du personnel en ce qui concerne le déplacement vers un espace sécurisé », dit-il. « Ces personnes ne peuvent pas se déplacer d’elles-mêmes et nous devons garantir qu’en 45 secondes, tout le monde se trouvera en lieu sûr. »
L’ALEH est la plus importante organisation au sein de l’Etat juif travaillant avec un public en situation de handicap mental et physique parfois grave et de tous les âges. Il y a environ 450 résidents permanents dans les quatre structures de l’ALEH du pays, à Jérusalem, Gedera, Bnei Barak et dans le Negev, et plus de 12 000 personnes s’y rendent dans le cadre de son hôpital de jour.
Wortzman explique qu’au cours des périodes d’attaques lourdes à la roquette dans le sud, le personnel doit amener le plus grand nombre de résidents que possible – et autant d’équipements – dans des zones sécurisées de la structure, qui sont blindées contre ce type de frappes. Certains résidents qui nécessitent des installations médicales plus poussées ne peuvent pour leur part pas être déplacés. Chaque bénévole ou membre du personnel a la responsabilité d’un résident spécifique, pour garantir que personne ne sera oublié.
Ce qui signifie qu’au moment où les sirènes retentissent, la majorité des résidents se trouvent déjà en lieu sur et que le personnel ne doit s’inquiéter que de certains qui restent dans le bâtiment. « C’est difficile à voir parce que habituellement, les malades ont beaucoup d’espace – ils sortent à l’extérieur et ils se promènent dans le jardin – et pendant ces moments d’attaque, tout le monde se trouve dans un seul espace vite surpeuplé », poursuit Wortzman. « Mais le plus important est de s’assurer qu’ils vont bien et qu’ils sont en sécurité ».
Il explique que le personnel fait de son mieux pour conserver l’emploi du temps habituel en dépit de la situation. Si les résidents ont des séances d’équithérapie au programme, le responsable peut ainsi faire venir un poney dans la zone protégée pour rendre visite aux résidents.

Il tente aussi de jongler entre les besoins du personnel et des bénévoles. Certains bénévoles venus de l’étranger découvrent les alertes « Code rouge » pour la toute première fois. Le conseil des parents a décidé de faire livrer de manière régulière des pizzas et du chocolat aux employés et aux résidents pour les aider à conserver le moral.
« Nous devons aussi nous assurer que les employés vont pouvoir sortir et souffler », dit Wortzman. « Ils ont l’impression d’être chez eux, ils ont l’impression que ce sont leurs enfants. Et nous nous inquiétons donc pour eux comme nous le ferions pour nos enfants biologiques ».

Wortzman explique qu’en raison de leurs handicaps, un grand nombre de résidents ne sont pas en mesure de comprendre la situation. La plus grande partie d’entre eux ne parle pas, même si l’organisation utilise un certain nombre de thérapies de communication alternatives de pointe.
« Nous ne savons pas ce qu’ils comprennent mais nous pensons que la majorité d’entre eux ne comprend pas la situation », dit Wortzman. « C’est plus dangereux parce que si vous ne comprenez pas que lorsque vous entendez les sirènes, vous devez vous rendre dans l’espace sécurisé, cela signifie que c’est exclusivement de la responsabilité du personnel de les y emmener ».
Dans la nuit de samedi, il y a eu plus de dix alertes rouges au foyer de l’ALEH. Dix fois où les employés de l’ALEH se sont rués pour s’assurer que l’ensemble des résidents se trouvait bien en sécurité – même si Wortzman dit ne pas se souvenir du nombre exact. Si les combats doivent continuer, les résidents pourraient être envoyés dans d’autres foyers du territoire – ce qui serait une tâche compliquée dans la mesure où de nombreux malades ont des besoins d’équipements médicaux spécifiques qui rendent difficiles les transports.
« Nous espérons seulement le retour au calme », explique-t-il.