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Une des capitales de la musique arabe, Mossoul chante de nouveau

Sous les jihadistes, les instruments étaient considérés comme diaboliques, mais depuis la libération, toutes les occasions sont bonnes pour chanter, jouer ou écouter de la musique

Des irakiens écoutent de la musique dans un café de Mossoul, le 2 novembre 2018. (Crédit : Zaid AL-OBEIDI / AFP)
Des irakiens écoutent de la musique dans un café de Mossoul, le 2 novembre 2018. (Crédit : Zaid AL-OBEIDI / AFP)

Pendant des siècles, elle a produit les meilleurs artistes d’Irak et les musiciens arabes venaient de loin pour y jouer : aujourd’hui libérée des jihadistes, qui ont méthodiquement détruit auditoriums et instruments, Mossoul est bien décidée à renouer avec sa tradition musicale.

Défilés de groupes folkloriques et concerts philharmoniques, renaissance de festivals disparus il y a des années et autres fêtes familiales ou nationales : dans ce qui était encore il y a un an et demi la « capitale » irakienne du groupe Etat islamique (EI), toutes les occasions sont bonnes pour chanter, jouer ou écouter de la musique.

Sous la férule des jihadistes, les instruments étaient considérés comme diaboliques et Fadhel al-Badri devait cacher son violon. « Je n’aurais jamais pu me balader avec quand je sortais dans Mossoul », alors tenue par le « califat » auto-proclamé, dit à l’AFP ce musicien de 45 ans, au teint hâlé.

Un comble pour la ville qui a vu naître Ziriab, l’homme qui introduisit le luth en Andalousie au IXe siècle, et Kazem al-Saher, l’artiste irakien le plus connu du monde arabe, juré dans des télécrochets très regardés.

Cette photo prise le 12 mars 2017 montre des enfants irakiens assis dans les décombres d’une rue du quartier de Naplouse à Mossoul devant un tableau portant le logo de l’Etat islamique durant une offensive des forces de sécurité pour la reprise des quartiers ouest de la ville, aux mains de l’EI (Crédit : AFP PHOTO / ARIS MESSINIS)

Musiciens « repentants »

Ahmed al-Saher, lui, a dû se prêter à l’humiliante cérémonie de « repentance » organisée par les jihadistes. Comme nombre de musiciens qui n’étaient pas parvenus à s’enfuir de Mossoul, cet Irakien de 33 ans, qui a depuis repris son répertoire classique de folklore local, avait dû promettre par écrit de ne plus jamais jouer.

Sa lettre et celles d’autres musiciens « repentis » avaient ensuite été affichées dans les mosquées de la ville.

Avant même l’EI, Al-Qaïda et d’autres groupes extrémistes imposaient dans les années 2000 leur vision ultra-rigoriste de l’islam dans de nombreux quartiers de Mossoul.

Mais depuis que Bagdad a annoncé en grandes pompes la libération de la ville en juillet 2017, tout cela paraît loin. M. Badri tient désormais son violon fièrement en main dans un café où un public enthousiaste tape des mains et reprend en cœur certains refrains du folklore mossouliote, l’un des plus prisés d’Irak.

Des irakiens jouent et écoutent de la musique dans un café de Mossoul, le 6 novembre 2018. (Crédit : Zaid AL-OBEIDI / AFP) Waleed AL-KHALID / AFP)

Au milieu d’hommes et de quelques femmes, toutes générations confondues, Amné al-Hayali, 38 ans, se régale.

« Les terroristes n’ont pas réussi à tuer l’amour de l’art des Mossouliotes. Et même s’ils ont tout détruit, l’art renaît ici », assure celle qui a vite abandonné le voile noir intégral autrefois imposé par les jihadistes aux femmes.

« A présent, on chante, alors qu’avec eux on n’a connu que l’obscurité, les décapitations et les coups de fouet », poursuit-elle.

Car dès les premiers jours de leur prise de pouvoir à Mossoul, en juin 2014, les jihadistes ont été très clairs sur leurs intentions, abattant la statue qui, devant la gare centrale, célébrait le soufi Mulla Uthmane al-Mawsili, virtuose du « maqam » irakien et figure tutélaire de la ville, avant de détruire des dizaines d’instruments à cordes et à vent arrachés à leurs propriétaires au cours de perquisitions musclées.

« Mossoul est de retour »

Ils ont ensuite démoli l’auditorium de l’université de Mossoul et fermé la faculté des Beaux-Arts, ne laissant ouvert que le département de calligraphie pour garder des scribes, précieux pour l’écriture d’annonces publiques ensuite placardées dans la ville.

Quant aux librairies musicales, aux studios d’enregistrement et même aux radios locales, ils ont dû fermer car diffuser et écouter de la musique était considéré comme un « péché ».

Il n’y a plus aujourd’hui de salles de concert dans la ville où se produisaient jusque dans les années 1970 les plus grandes stars arabes. Les divas Warda al-Jazaïriya ou Sabah y avaient donné des concerts dont parlent encore les habitants.

« Il faut absolument que le gouvernement s’intéresse à Mossoul et la soutienne car elle n’a plus ni théâtres, ni cinémas, ni salles de concert », plaide le chef du syndicat local des artistes, Tahssin Haddad.

Des irakiens écoutent de la musique dans un café de Mossoul, le 6 novembre 2018. (Crédit : Zaid AL-OBEIDI / AFP) Waleed AL-KHALID / AFP)

A défaut d’auditoriums et d’autres espaces à l’acoustique appropriée, les cafés invitent régulièrement des groupes et le dernier festival de musique s’est tenu il y a quelques jours dans le stade de l’université.

Peu avant, le célèbre musicien irakien Karim Wasfi organisait un concert dans un parc de Mossoul, où l’EI entraînait des enfants-soldats.

« Mossoul est de retour », se félicite Amné al-Hayali. « Et son patrimoine culturel aussi ».

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